13 Avril 2011
|2,6 millions d’enfants mort-nés en 2009
Nouvelles estimations mondiales et par pays publiées dans une série du Lancet
Genève, 14 avril 2011 : Près de 2,6 millions d’enfants mort-nés ont été comptabilisés dans le monde en 2009, d’après le premier ensemble complet d’estimations publié aujourd’hui dans une série spéciale de la revue médicale The Lancet.
On enregistre chaque jour plus de 7200 mortinaissances – des décès qui interviennent au moment même où des parents espèrent accueillir une nouvelle vie – dont 98 % dans des pays à revenu faible ou moyen. Les pays à revenu élevé ne sont pas épargnés, avec un enfant mort-né sur 320 naissances – taux qui a peu changé au cours de la dernière décennie.
Les nouvelles estimations montrent que le nombre de mortinaissances dans le monde n’a baissé que de 1,1 % par an, passant de 3 millions en 1995 à 2,6 millions en 2009. Cette baisse est encore plus lente que la réduction de la mortalité de la mère et de l’enfant au cours de la même période.
Les cinq principales causes de mortinaissance sont les complications lors de l’accouchement, les infections de la mère pendant la grossesse, les troubles comme l’hypertension ou le diabète chez la mère, le retard de croissance intra-utérin et les anomalies congénitales.
Quand et où surviennent les mortinaissances ?
Près de la moitié des mortinaissances, soit 1,2 million, surviennent au moment du travail. Ces décès sont directement liés au manque de soins qualifiés à ce moment critique pour la mère comme pour l’enfant.
Les deux tiers surviennent en milieu rural, où il n’existe pas toujours de personnel obstétrical qualifié – en particulier des sages-femmes et des médecins – pour prodiguer les soins essentiels au cours de l’accouchement et pour les urgences obstétricales, y compris les césariennes.
Le taux de mortinaissances varie considérablement selon les pays, les plus bas étant enregistrés en Finlande et à Singapour (2 pour 1000 naissances), et au Danemark et en Norvège (2,2), et les plus hauts au Pakistan (47), suivi du Nigéria (42), du Bangladesh (36), et de Djibouti et du Sénégal (34). Les taux varient également considérablement à l’intérieur même des pays. En Inde, par exemple, ils vont de 20 à 66 pour 1000 naissances selon les différents états.
On estime que 66 % des mortinaissances – soit près de 1,8 million – surviennent dans une dizaine de pays : l’Inde, le Pakistan, le Nigéria, la Chine, le Bangladesh, la République démocratique du Congo, l’éthiopie, l’Indonésie, l’Afghanistan et la République-Unie de Tanzanie.
Si l’on compare les taux de mortinaissances en 1995 et 2009, les progrès ont été les plus faibles en Afrique subsaharienne et en Océanie. Toutefois, de grands pays ont progressé, comme le Bangladesh, la Chine et l’Inde, avec une estimation combinée de 400 000 mortinaissances en moins en 2009 par rapport à 1995. Le Mexique a dans le même temps vu son taux de mortinaissances divisé par deux.
« De nombreuses morts à la naissance sont invisibles car elles ne sont pas enregistrées et ne sont pas considérées comme un problème de santé publique majeur. Or la mort d’un enfant à la naissance est une tragédie pour les femmes et les familles. Nous devons reconnaître cette perte et tout faire pour l’éviter. Les mortinaissances doivent être inscrites au programme d’action pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant », a déclaré le Dr Flavia Bustreo, Sous-Directeur général de l’OMS chargée de la santé familiale et communautaire.
Des interventions bien connues visant les femmes et les enfants permettraient d’éviter également des morts à la naissance
La série montre que le meilleur moyen de prendre en charge le problème de la mortinaissance est de renforcer les programmes de santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant qui existent déjà en se concentrant sur les interventions essentielles qui présentent également des avantages pour les mères et les nouveau-nés.
D’après une analyse à laquelle a contribué l’OMS dans la série Stillbirth du Lancet, jusqu’à 1,1 million de mortinaissances pourraient être évitées moyennant une couverture universelle par les interventions suivantes :
- Soins obstétricaux d’urgence complets 696 000
- Dépistage et traitement de la syphilis 136 000
- Dépistage et traitement du retard de croissance intra-utérin 107 000
- Dépistage et traitement de l’hypertension gravidique 57 000
- Repérage et information des mères ayant dépassé 41 semaines de gestation 52 000
- Prévention du paludisme, y compris au moyen de moustiquaires et de médicaments 35 000
- Complémentation en acide folique avant la conception 27 000
- Dépistage et traitement du diabète pendant la grossesse 24 000
Le renforcement des services de planification familiale sauverait également des vies en réduisant le nombre de grossesses non désirées, en particulier parmi les femmes à haut risque, réduisant ainsi les mortinaissances.
D’après le Dr Carole Presern, Directeur du Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant, et elle-même sage-femme qualifiée, « Si toutes les femmes avaient accès à un personnel obstétrical qualifié – sagefemme et, si nécessaire, médecin – pour recevoir des soins essentiels et pour des actes tels que les césariennes d’urgence, nous enregistrerions une baisse spectaculaire du nombre de mortinaissances. »
Un problème négligé
Malgré leur nombre, les mortinaissances sont relativement négligées. Elles ne figurent pas dans les objectifs du Millénaire pour le développement concernant l’amélioration de la santé maternelle et la réduction de la mortalité de l’enfant.
Les estimations ont été obtenues au moyen d’un modèle statistique partant des registres des naissances et des décès (données d’état civil) de 79 pays, d’enquêtes réalisées dans 39 pays, et d’études provenant de 42 pays. Des systèmes d’état civil déficients, en particulier dans les régions où surviennent la plupart des mortinaissances, limitent la quantité de données disponibles et empêchent le calcul d’estimations précises. Les registres d’état civil doivent être améliorés de sorte que toutes les mortinaissances soient comptabilisées.
Les nouvelles estimations visent à améliorer les connaissances au sujet de l’étendue du problème et à appeler l’attention du public et des professionnels sur les mortinaissances comme un problème de santé publique mondial important.
Près de 69 auteurs de plus de 50 organisations de 18 pays ont rédigé les six articles scientifiques, deux comptes rendus de recherche et huit commentaires sur le sujet qui figurent dans la série Stillbirth du Lancet, dont l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’Institut norvégien de santé publique ont été à l’origine.
Engagement de l’Organisation des Nations Unies
En septembre 2010, le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a présenté la Stratégie mondiale pour la santé de la mère et de l’enfant visant à sauver 16 millions de femmes et d’enfants au cours des cinq prochaines années. Dans le cadre de la Stratégie, de nombreux pays se sont engagés à améliorer l’accès à la planification familiale, aux soins prénatals et à des accoucheuses qualifiées, ce qui devrait entraîner une baisse des mortinaissances.
En septembre de cette année, une session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies sera consacrée aux maladies non transmissibles (MNT). Ces maladies, notamment le diabète et l’hypertension, sont des facteurs de risque de mortinaissance.