Utiliser des embryons d’oiseaux pour de nouvelles thérapies anti-cancéreuses

Pouvoir bénéficier rapidement et à l’envi de répliques fidèles de tumeurs d’un patient, y cribler de nouvelles molécules anti-cancéreuses, prédire la réponse tumorale et développer une médecine personnalisée. Quel industriel du médicament, quel médecin n’en a pas rêvé ? Voilà l’ambition affichée par la toute jeune start-up Oncofactory, créée en mars 2016 par deux chercheures CNRS, Valérie Castellani-Lincontang et Céline Delloye-Bourgeois de l’Institut Neuromyogène (CNRS/Université Claude Bernard/Inserm), et Yannis Robin-Lespinasse, business développeur et actuel président de la start-up. Les recherches réalisées au laboratoire ont abouti à la mise au point d’un nouveau modèle animal pour la production de tumeurs dans des tissus ciblés : un modèle embryonnaire de poule.

Par la micro-greffe de cellules humaines issues d’un neuroblastome - un cancer pédiatrique du système nerveux périphérique - dans un embryon aviaire, les chercheurs ont réussi à produire des tumeurs dans des organes homologues à ceux atteints chez l’enfant. Le procédé a été étendu à d’autres types de cancers, comme les tumeurs cérébrales, les cancers du sein et du poumon, et a entrainé avec succès la production, chez l’embryon aviaire, de tumeurs dans des sites connus de métastases. Cette technologie a fait l’objet de deux dépôts de brevet².

Le modèle proposé par Oncofactory présente de nombreux avantages par rapport aux modèles généralement utilisés, les modèles murins immunodéprimés PDX. Par définition, le système immunitaire de l’embryon aviaire n’est pas encore développé : il ne peut donc pas y avoir de rejet des cellules xénogreffées. Par ailleurs, le modèle induit une production tumorale dans des délais très courts : 48 heures environ pour tumeur primaire, contre plusieurs semaines pour les modèles murins. Enfin, le procédé ne requiert qu’une très faible quantité de cellules cancéreuses et peut être appliqué à des prélèvements congelés. S’appuyant sur des essais menés à des stades précoces du développement embryonnaire, il bénéficie également d’une réglementation éthique extrêmement favorable.

Alors que 80% des essais cliniques de nouvelles molécules anti-cancéreuses échouent à cause des faibles facultés mimétiques des modèles précliniques utilisés, Oncofactory offre une réponse à un besoin pressant en modèles innovants. La start-up a été primée au 17e Concours national d'aide à la création d'entreprises innovantes i-LAB 2015 dans la catégorie Emergence. Développée à partir de lignées cellulaires humaines, la technologie est désormais opérationnelle pour une création de tumeurs ciblées à partir de prélèvements de patients, des essais thérapeutiques et une évaluation en médecine personnalisée. En collaboration avec le laboratoire de recherche d’origine et différents centres hospitalo-universitaires, Oncofactory démarre un programme de développements cliniques comprenant la production et la caractérisation de tumeurs issues de patients et leur corrélation avec les thérapies préconisées, afin de valider l’efficacité prédictive du modèle.

Le projet d’origine, sélectionné en 2015 par le programme de prématuration du CNRS pour être accompagné et soutenu dans ses premières étapes de développement, a bénéficié d’un accompagnement scientifique, financier de 160 000 € (fonctionnement, équipement, recrutement d’un ingénieur) et stratégique (contribution à l’étude de marché, rédaction de brevet et extension PCT). Le parrain de ce projet en prématuration est Bernard Daugeras, co-fondateur d'Auriga Partners et membre de l'Académie des technologies.

¹ CNRS/Université Claude Bernard/Inserm.

² WO2016005398 (Modèle animal pour l'étude du neuroblastome) publié le 14 janvier 2016 en copro. CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1.

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