16ème Symposium International sur le Virus de l’Hépatite C - du samedi 3 octobre au mercredii 7 octobre 2009 Lieu : Nice Acropolis

Nouvelles pistes thérapeutiques et découvertes sur le mode d’action du virus

Du 3 au 7 octobre, Nice Acropolis accueille les plus grands spécialistes mondiaux du virus de l’hépatite C (VHC), avec le soutien de l’Association européenne pour l’étude du foie (EASL) et de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS). Cinq jours pour découvrir les nouvelles pistes thérapeutiques et les dernières avancées sur la compréhension du mode d’action du virus. Après Paris en 2001, c’est la seconde fois que la France accueille cette manifestation, signe de l’excellence des scientifiques hexagonaux sur le sujet, et du dynamisme de l’ANRS qui finance de nombreux projets. Près de 1000 participants sont attendus du monde entier. A cette occasion, l’ANRS organisera en partenariat avec l’association SOS hépatites Paca une conférence-débat avec le grand public, à Nice, le samedi 3 octobre.
Des pistes thérapeutiques prometteuses…

A l’heure actuelle, près de 50% des patients infectés par le VHC de génotype le plus fréquent guérissent au bout d’un an grâce aux traitements disponibles (ribavirine et interféron pégylé). Et grâce aux formidables efforts de ces dernières années, de nouveaux antiviraux encore plus efficaces vont prochainement arriver sur le marché (inhibiteurs de protéase, puis de polymérase). Mais les scientifiques ne relâchent pas pour autant leurs efforts dans la recherche de stratégies thérapeutiques complémentaires. « Afin de limiter l’apparition de formes virales résistantes, de réduire les effets secondaires et de diminuer les échecs thérapeutiques, il est indispensable de continuer à rechercher des molécules qui s’attaquent au virus différemment », explique en effet le Professeur Jean-Michel Pawlotsky[1], Président du symposium.


A Nice, plusieurs intervenants présentent donc de nouvelles pistes prometteuses dont voici quelques exemples :

- Nouveaux inhibiteurs de polymérase

L’équipe de Jean-Michel Pawlotsky a découvert que certains flavonoïdes inhibent l’ARN polymérase, un complexe enzymatique indispensable à la multiplication du virus[2]. Extraites de certaines plantes tel le Chardon-Marie, ces molécules sont naturelles, non toxiques et chimiquement transformables pour en améliorer l’efficacité. Bien tolérées, certaines sont d’ailleurs utilisées en thérapeutique de confort (infusion, additifs alimentaires). Soutenus par l’ANRS, ces travaux ouvrent la voie au développement de puissants inhibiteurs de polymérase à base de flavonoïdes.

- Inhibiteurs de l’entrée virale

Egalement soutenus par l’ANRS, Thomas F. Baumert (Inserm U748, Strasbourg) et ses collègues ont quant à eux démontré qu’un anticancéreux, l’Erlotinib, empêche le VHC de pénétrer dans les cellules du foie en agissant sur certaines enzymes de la famille des kinases[3].

A Lille, Paris et Lyon, plusieurs laboratoires sont également en pointe sur cette nouvelle approche complémentaire qui s’attaque à une des premières étapes du cycle viral. Durant le symposium, l’ANRS organise une session spéciale dédiée à cette thématique de l’entrée virale.

- Bloquer l’assemblage viral

Pour sa part, l’équipe de Jean Dubuisson (Institut de biologie de Lille, CNRS) s’est intéressée à une étape bien plus tardive dans le cycle du virus. Soutenue par l’ANRS, leur étude démontre que la protéine virale « NS2 » joue un rôle important dans l’assemblage des éléments constitutifs du VHC via son interaction avec deux autres protéines du virus, « p7 » et « E2 »[4]. Ainsi, cette interaction apparaît comme une cible potentielle pour de futurs antiviraux. Encadrés par Nicole Zitzmann (Oxford Glycobiology Institute, Royaume-Uni), des chercheurs ont parallèlement réussi à déterminer la structure tridimensionnelle de la protéine p7 grâce à des techniques innovantes fondées sur la microscopie électronique. Un résultat qui pourrait aider au développement éventuel d’un inhibiteur spécifique[5].

- Inhibiteurs de la réplication virale

De leur côté, Philippe Gallay (The Scripps Research Institute, La Jolla, Etats-Unis) et ses collègues ont analysé le mécanisme d’action des inhibiteurs de la cyclophiline, une protéine humaine qui s’associe avec la protéine virale « NS5A » pour permettre la réplication du virus[6]. Ce type d’inhibiteurs pourrait faire son apparition sur le marché dans les années à venir. En outre, comme la cyclophiline n’est pas spécifique au VHC, son inhibition pourrait être efficace dans la lutte contre d’autres virus.

Dans le même temps, l’équipe de Min Gao (Bristol Myers Squibb CO, Wallingford, Etats-Unis) s’est concentrée sur la « NS5A ». Ces scientifiques sont parvenus à identifier de puissants inhibiteurs de cette protéine, également indispensable pour réguler la réplication du VHC[7].


L’hépatite C en bref

L’hépatite chronique C est une inflammation chronique du foie provoquée par le VHC (virus de l’hépatite C). La maladie peut se traduire par divers symptômes peu spécifiques, le plus souvent une grande fatigue. Plus grave, le VHC est une cause majeure de cirrhose et de cancer du foie. Il se transmet principalement par contact direct avec du sang humain.

L’Organisation Mondiale de la Santé estime que 170 millions de personnes sont infectées par le VHC à travers le monde, soit 3% de la population, avec 3 à 4 millions de nouveaux cas chaque année.

En France métropolitaine, on estime qu’environ 360000 personnes âgées de 18 à 80 ans sont porteuses d’anticorps contre le VHC : 65% d’entre elles auraient une infection en cours, et 47% ne sont pas dépistées. L’hépatite C est à l’origine de 2600 décès par an sur le territoire.

Les pays en développement sont bien plus touchés que ceux d’Europe de l’Ouest ou d’Amérique du Nord. Ainsi, le VHC affecte plus de 5% de la population en Afrique, plus de 4,5% en Méditerranée Orientale et près de 4% en Pacifique Occidental.

…Aux découvertes sur la manière dont le virus détruit le foie…

Comment le virus de l’hépatite C détruit-il le foie ? « Jusqu’ici, les recherches menées sur le sujet indiquaient que le VHC s’attaque au foie indirectement, via l’inflammation qu’il génère, explique Jean-Michel Pawlotsky. Mais plusieurs études présentées à Nice révèlent que des mécanismes d’action bien plus directs entrent en jeu. » En voici quelques exemples :

- Sans inflammation, le virus provoque quand même la fibrogenèse

Une autre expérimentation pilotée par Jean-Michel Pawlotsky montre que les protéines virales provoquent une fibrogenèse dans le foie de souris génétiquement modifiées pour ne pas développer de phénomène inflammatoire[8]. Chez l’humain, la fibrogenèse se traduit par l’apparition de fibres, pouvant conduire à la cirrhose et au cancer. Soutenus par l’ANRS, ces résultats pourraient un jour déboucher sur la mise au point d’agents anti-fibrosants.

- Le virus induit un stress qui conduit à la mort les cellules infectées

D. Lorne Tyrrell (Université d’Alberta, Canada) et ses collègues ont mis à jour un deuxième mécanisme. Selon leurs travaux, le VHC induit un stress oxydatif et un stress du réticulum endoplasmique qui conduisent à la mort programmée (apoptose) les cellules du foie infectées[9]. Le stress oxydatif se traduit par l’accumulation de composés toxiques à l’intérieur des cellules. Quant au stress du réticulum endoplasmique, il correspond à la synthèse de protéines anormales au sein du réseau de membranes intracellulaires, sous l’action des protéines virales. Sachant que l’apoptose est une étape intermédiaire entre cirrhose et cancer, cette découverte pourrait contribuer au développement d’anticancéreux pour les cirrhotiques.

- Le virus modifie l’expression de certains gènes humains

Une étude conduite par Arvind H. Patel (Université de Glasgow, Royaume-Uni) indique un troisième mode d’action : le VHC modifie aussi l’expression de certains gènes du malade associés au cancer[10]. Pour y parvenir, il interagirait avec une protéine spécialisée dans l’épissage, étape indispensable dans la transmission des informations génétiques nécessaire à la synthèse des protéines. Reste à savoir si ce mécanisme conduit à l’apparition de tumeurs.

L’ANRS fortement impliquée dans la recherche sur les hépatites virales

En 2008, l’ANRS a consacré près de 25% de son budget aux hépatites virales, répartis sur 58 projets.



Le 2 juin 2007, l’Agence a ouvert un site de recherche principalement dédié à l’hépatite C au Caire en Egypte, pays où le virus touche 10 % de la population.
Depuis 1999,  « l’ANRS et les hépatites », c’est : 216 projets de recherche et 95 bourses financés, 24 essais thérapeutiques, 24 études physiopathologiques, 3 cohortes et 20 études en sciences sociales.
… Mais toujours pas de vaccin en vue

« Des avancées notables sur les mécanismes immunitaires induits par le VHC sont également présentées à Nice, précise Jean-Michel Pawlotsky. Mais force est de constater que les immunologistes sont encore très loin de la mise au point d’un vaccin préventif. Pourtant, celui-ci représente la seule solution économique pour les pays du Sud qui n’ont pas les finances nécessaires pour s’approvisionner en traitements curatifs, ni pour mettre en place les infrastructures adaptées pour le dépistage, le traitement et le suivi des malades. » Il reste donc beaucoup à faire dans ce domaine. En outre, l’épidémie galopante d’hépatite C est sous-estimée dans nombre de ces pays.

« En revanche, dans les pays industrialisés dont le système de santé permet l’accès aux soins et offre une couverture sociale, on espère pouvoir guérir la très grande majorité des patients infectés par le VHC d’ici une vingtaine d’années », annonce le Président du symposium. Pour atteindre cet objectif, les spécialistes comptent notamment sur les inhibiteurs de protéase dont la commercialisation est prévue d’ici deux ans, et sur les inhibiteurs de polymérase qui devraient arriver sur le marché d’ici trois à quatre ans. Toutefois, l’enjeu consistera à mettre au point les meilleures combinaisons thérapeutiques avec les traitements actuels.

Enfin, une fois gagné, ce combat permettra d’en mener d’autres. « En effet, toutes les connaissances accumulées sur le VHC peuvent servir dans la lutte contre d’autres pathologies liées aux virus de la famille des Flaviviridae, telles la dengue et la fièvre jaune qui représentent des problèmes de santé publique majeurs », conclut Jean-Michel Pawlotsky.


Les spécialistes viennent à la rencontre du public

A l’occasion du 16ème Symposium international sur le virus de l’hépatite C (3 - 7 octobre),
l’ANRS organise, en partenariat avec l’association SOS hépatites Provence-Alpes-Côte d’Azur,
une conférence-débat avec le grand public sur les hépatites virales B et C.

Cinq spécialistes répondront aux questions du public et aborderont les thèmes suivants :


►  « Aujourd’hui, il est possible de guérir d’une hépatite virale »
(Pr Albert Tran, Service d’hépatogastroentérologie, CHU de Nice)

►  « L’accompagnement des malades au cours du traitement : un facteur important de réussite »
(Michel Bonjour, Vice Président de SOS hépatites, Représentation fédérale)

►  « Les traitements du futur »
(Pr Jean-Michel Pawlotsky, Directeur du Centre national de référence des hépatites virales B, C et delta)

►  « Les hépatites dans les pays en développement : une épidémie majeure »
(Pr David Thomas, Directeur du département des maladies infectieuses, Hôpital Johns  Hopkins, Baltimore, Etats-Unis)

►  « L’apport de SOS hépatites pour les malades habitant en PACA »
(Constance Nave, Présidente de SOS hépatites Paca)


Pour tout savoir sur le symposium :
www.hcv2009.org


[1] Jean-Michel Pawlotsky est Directeur du Centre National de Référence des hépatites B, C et delta (Laboratoire de virologie, Inserm U955, Hôpital Henri Mondor, Université Paris 12, Créteil) et Président du Comité scientifique sectoriel n°4 « Recherches fondamentales et physiopathologie dans les hépatites virales » de l’ANRS.
[2] Silibinin and other flavonoids are direct inhibitors of Hepatitis C virus RNA-dependent RNA polymerase, Abdelhakim Ahmed-Belkacem et al., Hôpital Henri Mondor, Université Paris 12, Laboratoire de virologie, Inserm U955, Créteil, France.
[3] Inhibition of HCV entry and infection by Erlotinib, Joachim Lupberger et al., Inserm U748, Strasbourg, France.
[4] Role of E2-p7-NS2 interactions in the HCV assembly process, Costin-Ioan Popescu et al., Institut de biologie de Lille, CNRS, Lille, France.
[5] The three-dimensional structure of a hepatitis C virus p7 ion channel by electron microscopy, Philipp Luik et al., Oxford Glycobiology Institute, Biochemistry, Oxford, Royaume-Uni.
[6] Analysis of the anti-HCV mechanisms of action of cyclophilin inhibitors, Michael Bobardt et al., The Scripps Research Institute, Immunology & Microbial Science, La Jolla, Etats-Unis.
[7] Discovery of HCV NS5A inhibitors, Min Gao et al., Bristol Myers Squibb CO, Virology, Wallingford, Etats-Unis.
[8] Hepatitis C virus (HCV) proteins are fibrogenic in the absence of hepatic inflammation in a transgenic mouse model expressing the full-length HCV open reading frame, Philippe Chouteau et al., Hôpital Henri Mondor, Université Paris 12, Laboratoire de virologie, Inserm U955, Créteil, France.
[9] HCV induces oxidative and ER stress, and sensitizes infected cells to apoptosis, Michael A Joyce et al., University of Alberta, Medical Microbiology and Immunology, Edmonton, Canada.
[10] Hepatitis C virus promotes differential MRNA expression of alternatively spliced isoforms of cancer-related host genes, Nelson Acosta-Rivero, MRC Virology Unit, Institute Of Virology, University of Glasgow, Glasgow, Royaume-Uni.

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