altLors de sa réunion mensuelle, qui s’est tenue du 28 novembre au 1er décembre à Londres, le Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) a finalisé la procédure concernant les risques de réactivation du virus de l’hépatite B et de carcinome hépatocellulaire avec les antiviraux d’action directe de l’hépatite C. Pour ces derniers produits, l’ANSM attire l’attention sur d’autres signaux de sécurité actuellement sous étroite surveillance. Le PRAC a, par ailleurs, démarré une procédure d’arbitrage concernant le risque chez les patients allergiques aux protéines de lait de certains médicaments à base de méthylprednisolone par voie injectable (article 31).

Antiviraux d’action directe dans le traitement de l’hépatite C: retour d’information sur le PRAC de décembre 2016 concernant les risques de réactivation du virus de l’hépatite B et de carcin ome hépatocellulaire et autres informations de pharmacovigilance

Les antiviraux d’action directe [daclatasvir (DAKLINZA), dasabuvir (EXVIERA), sofosbuvir/ledipasvir (HARVONI), simeprevir (OLYSIO), sofosbuvir (SOVALDI), ombitasvir/paritaprevir/ritonavir (VIEKIRAX)] sont indiqués dans le traitement des patients infectés par le virus de l’hépatite C.

Retour d’information sur le PRAC concernant les risques de réactivation du virus de l’hépatite B et de carcinome hépatocellulaire

Le PRAC a finalisé l’évaluation des données existantes sur le risque de réactivation du virus de l’hépatite B (VHB) chez les patients recevant des antiviraux d’action directe pour le traitement de leur infection par le virus de l’hépatite C (VHC).

Des cas de réactivations du VHB pouvant entraîner le décès ont en effet été rapportés pendant ou après le traitement par antiviraux d’action directe chez des patients co-infectés à la fois par le virus de l’hépatite B et le virus de l’hépatite C. Il s’agit d’un phénomène connu et déjà pris en compte dans les recommandations thérapeutiques mais qui pourrait être accru avec les antiviraux d’action directe, du fait de leur action plus puissante sur le virus C et de l’absence d’impact sur le virus B contrairement à l’interféron utilisé antérieurement.

Au vu des données disponibles, le PRAC a recommandé une mise à jour des Résumés de caractéristiques du Produit de l’ensemble des antiviraux d’action directe, afin de rappeler aux prescripteurs la nécessité de réaliser systématiquement avant l’instauration du traitement un dépistage du virus de l’hépatite B. De plus, les patients co-infectés par le VHB et le VHC doivent être étroitement surveillés tout au long du traitement pour le risque de réactivation du VHB et pris en charge selon les recommandations thérapeutiques en vigueur.

Par ailleurs, à la suite de la publication d’une étude espagnole[1] ayant montré une augmentation de l’incidence des récidives précoces de carcinome hépatocellulaire chez les patients traités par antiviraux par rapport à celle rapportée chez des patients non traités, le PRAC a évalué l’ensemble des données disponibles sur cet aspect dont les données issues des cohortes ANRS[2] qui n’ont pas retrouvé un tel signal. Le PRAC a considéré à ce stade que des études additionnelles devaient être conduites avant de pouvoir rendre un avis définitif sur ce sujet. En tout état de cause, il importe de se conformer aux guidelines thérapeutiques qui recommandent de continuer à surveiller régulièrement les patients cirrhotiques ou ayant une fibrose avancée pour le risque de carcinome hépatocellulaire et ce même en cas de réponse virologique soutenue au traitement.

Autres informations de pharmacovigilance sur les antiviraux d’action directe

Dans le cadre du suivi national de pharmacovigilance des spécialités à base de sofosbuvir et de daclatasvir mis en place depuis le mois d’avril 2015, plusieurs signaux de sécurité ont été identifiés (lire le CR de la réunion du Comité technique de pharmacovigilance du 15 décembre 2015 ) et sont actuellement étroitement surveillés par le PRAC.

L’ANSM souhaite notamment attirer l’attention sur la survenue de cas d’hypertension artérielle pulmonaire ou d’aggravation d’une hypertension artérielle pulmonaire préexistante chez des patients traités par association d’antiviraux contenant du sofosbuvir. Le lien de causalité avec le traitement antiviral n’a pas été clairement établi à ce jour. Cependant, compte-tenu de l’importance d’une prise en charge précoce de cette pathologie pour en améliorer le pronostic, il importe de prendre en compte ce signal dans le suivi des patients recevant des antiviraux d’action directe dans le traitement de l’hépatite C et de procéder à une notification d’effets indésirables le cas échéant.

Des cas d’arythmies cardiaques (bradycardie et troubles de la conduction) ont par ailleurs été rapportés chez des patients traités par association d’antiviraux à base de sofosbuvir. La co-administration avec l’amiodarone est un facteur de risque bien identifié (lire lettre aux professionnels de santé du 6 mai 2015 ) mais des cas similaires ont également été décrits en dehors de l’association avec l’amiodarone, notamment chez les patients ayant des troubles du rythme cardiaque. Des cas d’insuffisance cardiaque ont également été notifiés. A ce jour, le PRAC n’a pas conclu à un lien de causalité avéré avec le traitement antiviral sur ces aspects. Cependant, il semble important de prendre en compte l’existence de ces signaux de sécurité dans la pratique clinique, notamment chez les patients ayant une maladie hépatique avancée ou présentant une cardiopathie.

Enfin, lors de sa réunion de septembre 2016, le PRAC a recommandé l’ajout d’une mention dans les Résumés des caractéristiques de tous les antiviraux d’action directe concernant les patients traités par anti-vitamines K afin de rappeler la nécessité d’une surveillance étroite de l’INR chez ces patients, compte-tenu des modifications de la fonction hépatique lors du traitement antiviral. De manière générale, une vigilance particulière devrait être appliquée pour tous les médicaments à marge thérapeutique étroite et qui pourraient être impactés fortement par ces modifications de la fonction hépatique sous traitement.

Risque, chez les patients allergiques aux protéines de lait, avec certains médicaments à base de méthylprednisolone par voie injectable utilisés pour le traitement de réactions allergiques

Suite à un signal de la Croatie, l’Agence Européenne du Médicament (EMA) a entamé une revue des médicaments à base de méthylprednisolone par voie injectable (intraveineuse ou intramusculaire) et contenant du lactose en tant qu'excipient.

Les autorisations de mise sur le marché de ces médicaments ont été délivrées, pour la plupart depuis de nombreuses années par des procédures nationales et dans de nombreux pays de l’Union Européenne. Le médicament princeps en France est Solumédrol.

La méthylprednisolone est un corticoïde qui, administrée par voie injectable, est indiquée, entre autres, dans le traitement des réactions allergiques aigues. La présence de lactose dans la composition de ces médicaments peut entrainer la présence de protéines de lait de vaches à l'état de traces, susceptibles de déclencher des réactions d'hypersensibilité chez les sujets allergiques aux protéines de lait. L'injection de ces médicaments chez ces patients peut également aggraver la réaction allergique initiale conduisant à l'augmentation inappropriée des doses injectées.

Une évaluation des données disponibles concernant le risque d’allergie à ces médicaments est initiée par l'EMA afin de déterminer si des mesures de minimisation du risque doivent être mises en place.

Un arbitrage dans le cadre de l’article 31 de la directive 2001/83/EC a démarré le 1er décembre 2016, et une prochaine discussion est prévue au PRAC de mars 2017.

Lire aussi

[1] Reig M, Marino Z, Perello C, Inarrairaegui M, Ribeiro A, Lens S, et al. Unexpected early tumor recurrence in patients with hepatitis C virus-related hepatocellular carcinoma undergoing interferon-free therapy: a note of caution. J Hepatol 2016;65:719–726.

[2] ANRS collaborative study group on hepatocellular carcinoma (ANRS CO22 HEPATHER, CO12 CirVir and CO23 CUPILT cohorts). Lack of evidence of an effect of direct-acting antivirals on the recurrence of hepatocellular carcinoma: Data from three ANRS cohorts. J Hepatol. 2016 Oct;65(4):734-40

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