09 Décembre 2016
|L’opiorphine, et une forme stabilisée de celle-ci appelée STR-324, sont aussi efficaces que la morphine sur les douleurs post-opératoires. Contrairement à la morphine, ces deux molécules n’induisent pas les effets secondaires les plus redoutés tels que les problèmes cardio-respiratoires. Cette découverte a été faite chez l’animal. Les premiers essais chez l’homme devraient démarrer fin 2017.
Ces travaux ont été publiés dans la revue Anesthesiology de novembre dernier par des chercheurs de Gustave Roussy, de l’Inserm, de l’Université Paris-Sud, de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (Hôpital Bicêtre) et de l’Institut Pasteur.
La morphine et ses dérivés sont les antalgiques les plus puissants. Actuellement, devant une douleur rebelle, on augmente leur posologie. Ces antalgiques qui induisent une tolérance nécessitent une augmentation progressive des doses et donc de leurs effets secondaires (graves problèmes respiratoires, troubles confusionnels, somnolence, nausées, vomissements, constipation…). «La dépression respiratoire est l’effet le plus redouté de la morphine et ses dérivés. Elle peut entrainer l’arrêt de la respiration et le décès. Dans notre étude, nous avons montré que l’opiorphine et sa forme stabilisée, le STR-324 étaient sans effet sur la pression artérielle et sur la dépression respiratoire, tout en ayant les même propriétés analgésiques » détaille le Dr Philippe Sitbon, premier auteur de la publication et anesthésiste-réanimateur à Gustave Roussy.
STR-324 est la forme stabilisée de l’opiorphine, peptide naturellement produit par l’organisme découvert par le Dr Catherine Rougeot, chercheur de l’Institut Pasteur. Lors de précédents travaux, le Dr Catherine Rougeot avait démontré les propriétés analgésiques de l’opiorphine. Elle avait également montré l’absence de dépendance et de constipation[1].
Lorsque l’on injecte de la morphine, celle-ci va se fixer au niveau de tous les récepteurs opioïdes de l’organisme avec des effets secondaires multiples selon les organes où se trouvent ces récepteurs. L’opiorphine et sa forme stabilisée n’ont pas exactement le même mécanisme d’action que la morphine. Elles bloquent la dégradation des enképhalines, «notre morphine naturelle». L’opiorphine agit uniquement là où il y a production importante d’enképhalines donc uniquement sur les voies de la douleur lorsqu’il y a une stimulation douloureuse.
Les bons résultats obtenus sur les douleurs post-opératoires sur des modèles animaux encouragent le développement du STR-324 chez l’homme. Les premiers essais devraient débuter fin 2017.
Au final, le STR-324 pourrait venir soulager d’autres types de douleurs comme les douleurs neuropathiques souvent difficiles à calmer par les antalgiques classiques ou des patients algiques qui présentent des effets secondaires importants liés à leur traitement.
Cette publication a été éditorialisée par le Dr Albert Dahan, faculté de médecine de Leiden (Pays-Bas).
Source :
STR-324, a Stable Analog of Opiorphin, Causes Analgesia in Postoperative Pain by Activating Endogenous Opioid Receptor–dependent Pathways
Philippe Sitbon, M.D., Alain Van Elstraete, M.D., Leila Hamdi, Ph.D., Victor Juarez-Perez, Ph.D.,
Jean-Xavier Mazoit, M.D., Ph.D., Dan Benhamou, M.D., Catherine Rougeot, Ph.D.
Anesthesiology, 2016; 125:1017-1029