altMonsieur le Président d’Universcience, Bruno MAQUART, Mesdames, Messieurs les parlementaires et élus, Mesdames, Messieurs les chercheurs et professionnels de santé, Mesdames, Messieurs les industriels et startupers, Mesdames, messieurs.

L’innovation est un moteur pour la société. L’Histoire est jalonnée d’idées, d’inventions, de destructions créatrices, de progrès techniques, scientifiques et industriels. En bousculant les usages, en transformant le quotidien, ils nous ont permis d’avancer, de vivre mieux, de nous tourner vers l’avenir.

Il est des moments où l’innovation est telle qu’elle constitue une rupture, un saut dans l’Histoire, en dessinant un nouveau rapport au monde. Depuis maintenant plus de trois ans, au fil de mes rencontres avec des chercheurs, des chefs d’entreprises, des professionnels de santé, je me suis forgé une conviction : ce qui se dessine actuellement, sous nos yeux, c’est une nouvelle dimension pour nos performances médicales et notre qualité de vie. Si le monde a connu trois révolutions industrielles, il est aujourd’hui entré dans la troisième révolution de la santé.

Nous avons d’abord connu la révolution de la médecine chimique, où le médicament a transformé la façon de soigner. Lui a succédé la révolution apportée par la médecine robotique où des technologies nouvelles ont bouleversé par exemple la manière d’opérer.

La troisième révolution qui s’ouvre, c’est celle la médecine digitale. Elle bouleverse comme jamais notre rapport à la santé, précisément parce qu’elle réinvente la conception-même que nous avons de la santé. Elle imprime sa marque, parce qu’elle est multiple : biotechnologies, nanotechnologies, sciences cognitives, réalité virtuelle… Au-delà des techniques, ce sont nos pratiques médicales, l’organisation de notre politique de santé, la place et le rôle de chacun de ses acteurs, qui sont transformés.

Pourquoi cette première journée nationale de l’innovation en santé ? Pour mobiliser l’ensemble de la société autour de ce défi qui ne saurait être restreint à de la technique. Pour offrir à tous les Français, petits et grands, connaisseurs ou non, la possibilité de voir de leurs yeux et de toucher de leurs mains la médecine du futur. Pour donner à cette révolution un espace d’expression, de réflexion, de coopération. Pour les chercheurs et les porteurs de projets, cette journée constitue une opportunité unique pour tester l’innovation auprès du grand public. Permettre à la société de s’en emparer, de l’accompagner, c’est lui donner toutes les chances de réussir. Pour moi, cette journée est l’occasion de dire que le Ministère de la Santé est au rendez-vous de ces grands défis.

Les frontières s’effacent et de formidables opportunités se dessinent. Ma volonté, c’est de les saisir, c’est d’offrir de nouvelles chances aux Français, et d’abord la chance de vivre mieux, d’accéder à une médecine personnalisée. Je veux donner de nouveaux défis à nos chercheurs, de nouveaux horizons à notre économie.

Je veux aussi lancer une réflexion sur la société que nous voulons construire. C’est cela, le sens de cette journée.

I- La révolution du digital bouleverse profondément notre rapport à la santé. C’est toute la société qui, peu à peu, est réinventée.

En cela, le numérique est comparable au bouleversement apporté par l’électricité à la fin du XIXe siècle. Tous deux s’inscrivent dans chacun de nos gestes, partout où nous nous rendons, à domicile, en ville, à l’hôpital. Le numérique, c’est l’avènement possible d’une médecine personnalisée.

Déjà, les objets connectés permettent à chacun de suivre sa température, sa tension. Le verre connecté, qui vous est présenté lors de cette journée, permet aux personnes âgées de vérifier leur hydratation. Demain, le textile connecté offrira la possibilité de visualiser et de surveiller son coeur. La douleur dans la poitrine ne sera plus le premier signe de l’infarctus : c’est le smartphone, qui le détectera le premier. L’horizon des possibles ne cesse d’être repoussé. Un premier test permettant de détecter la présence de cellules cancéreuses avant même que le cancer ne soit visible a été développé en France. Demain, il sera possible de détecter la maladie avant même que celle-ci ne se déclare.

Mais le numérique ne transforme pas la vie des seuls patients.
C’est toute l’organisation de notre système de santé qui est amenée à évoluer. Avec la construction d’un lien direct entre les objets connectés et les professionnels de santé, c’est le suivi du patient qui va changer. Je pense au pancréas artificiel Diabeloop que vous pourrez voir ici, véritable révolution pour les malades du diabète. Je pense à toutes ces innovations qui permettront au patient de rentrer chez lui plus rapidement encore après une intervention chirurgicale : les capsules connectées qui, une fois avalées, permettent de surveiller à distance la température du patient. Les examens pratiqués à distance auront un impact considérable sur les enjeux de désertification médicale.

Je pense aussi à la possibilité pour les professionnels d’interagir entre eux. Une innovation, dont nous entendrons parler plus tard dans la matinée, permet ainsi de simplifier l’échange d’informations médicales entre tous les professionnels de santé qui contribuent à la prise en charge d’un même patient. A l’heure de l’email et des réseaux sociaux, ce type d’échanges dématérialisés paraît une évidence ; mais c’est en réalité un défi que peu de pays au monde ont su relever à ce jour. Ce défi, nous devons le relever. Pour les professionnels de santé libéraux et pour l’hôpital, où plusieurs dizaines de systèmes d’information coexistent parfois sans se parler entre eux. Les industriels, les start ups, sont prêts à y aller : une appli mobile permettant de se géolocaliser dans l’hôpital et d’y gérer ses rendez-vous sera d’ailleurs présentée. L’Assurance maladie, la Haute autorité de santé et les administrations centrales doivent s’engager pleinement dans cette dynamique.

Nous le voyons chaque jour, l’ensemble de ces évolutions entraine déjà des interrogations, des questionnements. Deux réflexions me semblent indispensables : comment garantir l’égalité d’accès de tous au progrès que constitue l’innovation en santé, d’abord.
Comment traiter les questions éthiques posées par ces bouleversements parfois vertigineux de nos pratiques et de nos organisations, ensuite.

L’innovation en santé doit être compatible avec les valeurs de notre modèle social, au premier rang desquelles il y a l’égal accès de tous à l’excellence médicale. Un enjeu de justice ?
Assurément. Comment imaginer qu’un traitement nouveau puisse être réservé à une élite qui aurait, seule, les capacités financières à y accéder. Mais au-delà de la justice, l’égalité d’accès est aussi un formidable accélérateur. La force du modèle français, c’est de solvabiliser l’innovation, en lui garantissant une diffusion rapide et massive, c’est de donner un temps d’avance à nos entreprises sur un marché mondialisé et compétitif.
Cette réalité nous oblige. Pour pérenniser ce modèle vertueux, ce gagnant-gagnant, pouvoirs publics et industriels doivent s’accorder sur le juste prix de l’innovation. Je pense évidemment à un sujet d’actualité : le traitement de l’hépatite C. J’ai fait le choix de permettre à l’ensemble des malades de bénéficier de ce traitement de rupture, qui permet de guérir la maladie. Si la France dispose du prix le plus bas d’Europe, la pression pour les finances publiques reste très forte - trop forte.

La question du prix de l’innovation est centrale, décisive pour les années à venir. Elle ne trouvera de réponse qu’au niveau international. Ce sujet fut d’ailleurs au coeur des discussions avec mes homologues internationaux et les industriels au Forum économique mondial de Davos. J’ai décidé de porter de manière offensive cette question au niveau européen. Une grande conférence se tiendra au début du mois d’avril à Lyon, à l’initiative du Président de la République. Son objectif : nous accorder sur le meilleur moyen de garantir un retour d’investissement aux industriels qui développent des traitements innovants, tout en permettant à tous les patients d’y accéder et à la collectivité de les assumer.

Le second défi à relever, c’est l’éthique. Jusqu’où devons-nous aller dans l’anticipation de la maladie que j’évoquais tout à l’heure ? La science permet aujourd’hui un accès rapide au séquençage génomique complet. Concrètement, il est possible d’identifier une mutation ou un gène impliqué dans une maladie, ou encore d’évaluer les prédispositions génétiques d’une personne pour certaines maladies. Mais jusqu’où sommes-nous prêts à aller ?

Au-delà de la question du consentement et de l’utilisation des données, il faut se poser la question du droit au savoir et du besoin de savoir : veut-on réellement savoir dans le détail quel sera notre devenir médical ? Certaines personnes sont-elles mieux disposées que d’autres à connaître leur génome ? Un médecin doit-il alerter son patient s’il détecte une anomalie susceptible de développer une maladie dans 15 ou 20 ans ? Cette journée nationale de l’innovation en santé est aussi l’occasion de nous interroger collectivement. Je souhaite que l’ensemble de la société puisse s’emparer de ce débat. Le Comité consultatif national d’Ethique (CCNE) sera donc chargé de mener une réflexion complète et participative.

II-La troisième révolution de la santé se joue aussi en France. L’ambition qui m’anime est de stimuler les initiatives pour amplifier encore ce mouvement.

A Davos, plusieurs responsables politiques et dirigeants d’entreprises internationaux me faisaient part de leur intérêt pour le dynamisme de notre innovation. Le rayonnement du système de santé français ne date évidemment pas d’hier, il est lié à l’excellence historique de nos professionnels et de nos chercheurs, à leur disponibilité pour innover dans leurs pratiques, à la performance de nos infrastructures. Mais ce qui suscite aujourd’hui l’intérêt, c’est bien notre capacité à inventer l’avenir.

C’est en France que vient d’être conçu le premier coeur artificiel et que se dessine le premier poumon artificiel. C’est en France que deux jeunes chercheurs-entrepreneurs, à qui l’Amérique tendait les bras, ont choisi de développer les premiers antibiotiques dits « intelligents ». C’est en France qu’est engagée l’immunothérapie du cancer. Oui, c’est en France que se dessine la santé de demain !

Ma conviction, c’est que nous pouvons aller encore plus loin. En faisant tomber les barrières administratives qui freinent les ambitions. En soutenant les jeunes entreprises qui démarrent, qui portent une idée novatrice qu’elles cherchent à développer. En affirmant la place, l’engagement et la confiance de l’Etat. Ce sont ces priorités que je porte depuis 2012.

Simplifier les procédures, d’abord. Je tiens à le rappeler d’emblée : l’innovation ne passera jamais par un affaiblissement de nos conditions de sécurité. L’encadrement des procédures d’autorisation est une garantie indispensable. J’ai ainsi lancé une large concertation sur l’ordonnance concernant les essais cliniques, prévue par la loi de modernisation de notre système de santé. Elle nous permettra d’actualiser, de faire évoluer le cadre réglementaire.

Mais dans le même temps, il nous faut garantir que les procédures d’autorisation ne soient pas une source de difficultés, de blocages, de formalités administratives inutiles, qui empêcheraient de concevoir une idée, de la développer, de la diffuser. Depuis trois ans, j’ai ainsi fait évoluer la règlementation des démarches administratives, pour supprimer les redondances, j’ai renforcé l’accès des patients aux médicaments innovants par le dispositif d’autorisation temporaire d’utilisation et j’ai permis l’ouverture en opendata des données de l’Assurance maladie aux chercheurs et aux start ups.

Simplifier, mais aussi financer les porteurs de projets.
Beaucoup de start ups m’ont dit connaître des difficultés pour trouver les fonds leur permettant de se développer. Trop d’investisseurs hésitent encore à franchir le pas, estimant les délais trop longs et le retour sur investissement trop incertain ou trop lointain.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 consacre un engagement historique : près de 6 milliards d’euros financent les différentes étapes de l’innovation. Mais je veux aller encore plus loin, en inscrivant cette dynamique dans la durée.

En octobre dernier, j’ai annoncé le lancement d’un fonds avec le Commissaire général à l’investissement Louis SCHWEITZER, pour soutenir les start-up françaises qui se heurtent trop souvent à la « vallée de la mort » financière. Ce fonds devait initialement être doté de 100 millions d’euros. Parce que l’attente est forte et que notre ambition collective l’est tout autant, nous avons décidé de revoir son montant à la hausse. Le Fabs (Fonds accélération biotech santé), c’est donc 340 millions d’euros finalement mis sur la table pour permettre à nos jeunes pousses de s’asseoir au banc des acteurs de santé.

III- Ce soutien à l’innovation en santé doit permettre à la France de se doter d’une filière stratégique solide.

C’est indispensable, parce que la concurrence est déjà là. Le Brésil, l’Inde et la Chine développent des capacités de recherche et développement et de production qui rivalisent avec les équipes de recherche et les usines implantées en France.

Pour soutenir la dynamique française, j’ai créé un forfait innovation pour les dispositifs médicaux et les actes innovants. Il porte déjà ses fruits. L'implant biomédical Argus 2, développé par l’entreprise Second sight, a déjà pu bénéficier à l’ensemble des patients malvoyants concernés. Un dossier d’instruction est en cours pour le développement d’Echopulse, une alternative à la chirurgie pour détruire les tumeurs bénignes du sein grâce la thérapie par ultrasons, lancée par le laboratoire Theraclion.

Les industries de santé représentent déjà 200 000 emplois dans notre pays. 30 000 pour le seul secteur de la santé numérique.

La France est le premier producteur européen de biotechnologies.
Elle s’appuie sur des start ups de pointe : je pense à Innate Pharma, pionnier de l’immunothérapie du cancer, à Pixium Vision, en première ligne pour combattre le handicap visuel, ou encore à CARMAT dont le coeur artificiel total est de loin le plus avancé au monde.

L’enjeu, c’est de structurer ces atouts au sein d’une structure solide. C’est l’un des grands axes du plan Médecine du futur dont sera prochainement installé le comité de pilotage, co-présidé par le professeur André SYROTA et Oliver CHARMEIL. Concrètement, nous allons soutenir des fonds d’entrepreneurs spécialisés et rassembler les acteurs au sein de clusters. Ces collaborations entre différents secteurs garantiront le croisement des expertises et des outils, la diffusion des idées.

Si le dialogue entre les acteurs de l’innovation est essentiel, l’échange avec les pouvoirs publics l’est tout autant. C’est pourquoi j’ai décidé de nommer le Professeur Jean-Yves FAGON délégué ministériel à l’innovation en santé. Sa mission sera de garantir un échange simple, rapide et fluide de l’ensemble des acteurs concernés. Car l’innovation ne peut pas s’épanouir ni réussir sans la contribution de tous les acteurs : professionnels de santé, patients, industriels, administrations et opérateurs publics.

Mesdames, messieurs,
Nous avons, toutes et tous, la chance immense d’assister à une révolution qui se déploie sous nos yeux. Ce week-end sera l’occasion pour chacun de s’approprier ces nouveaux outils, de se familiariser avec les nouveaux modes d’exercice de la médecine.

Allez à la rencontre de celles et ceux qui innovent. Participez aux speed dating pour découvrir un objet grâce à des explications en 3 minutes des chercheurs, collaborez avec ces derniers au sein du « living lab » pour trouver des solutions nouvelles et faire émerger des idées. Essayez même, pourquoi pas, de développer vous mêmes des prototypes innovants grâce au « Fab lab » !

Soyez créatifs, inventifs. Ayez le goût du risque pour pousser toujours plus loin l’exploration du vivant. Exprimez vos envies, vos espoirs, vos inquiétudes. C’est ainsi que nous écrirons ensemble un futur souhaitable en vivant le plus longtemps possible et en bonne santé. A vous de jouer !

Je vous remercie.

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