altMonsieur le Maire, François DAGNAUD,
Madame la Présidente, Nathalie D’ASARO BIONDO,
Madame la Directrice générale, Isabelle BOUVIER,
Monsieur le Président de la Société française de l’accompagnement et des soins palliatifs (SFAPS), Charles JOUSSELLIN,
Messieurs les anciens présidents de la SFAPS, Professeur Régis AUBRY et Docteur Vincent MOREL,
Mesdames, Messieurs les professionnels de santé,
Mesdames, messieurs,

La modernité d’une société se mesure en partie à sa manière d’accompagner la fin de la vie. C’est pour moi une conviction profonde. Et ce qui est réalisé par les équipes de la fondation La Croix Saint Simon - l’apaisement de souffrances, l’accompagnement des malades et de leur famille -, c’est tout simplement de la dignité.

Depuis plus de dix ans, les soins palliatifs se sont très fortement développés. Parce qu’ils répondent à un besoin réel. S’il n’y avait dans un passé lointain, selon les mots de Chateaubriand, « qu'une minute de la vie à la mort », les progrès de la médecine et la médicalisation de la fin de vie ont contribué à ce que la frontière entre la vie et la mort s’estompe, parfois même disparaisse.

Pourtant, le développement des soins palliatifs ne bénéficie pas à tous les Français, ou du moins pas dans les mêmes conditions. Depuis plusieurs années, les rapports se sont succédé et tous pointent du doigt les inégalités géographiques ou d’information très fortes, et derrière, des inégalités sociales qui se creusent.

Une nouvelle étape doit donc être franchie pour améliorer l’accompagnement en fin de vie. Les patients attendent que leurs souffrances soient apaisées, leurs familles attendent que leur dignité soit respectée. Les professionnels de santé, qui font face avec courage à des situations très difficiles, attendent eux-aussi que nous allions de l’avant.

C’est pour répondre à ces attentes, à cette urgence, que le Président de la République a souhaité l’élaboration d’un plan national pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie. Ce plan s’inscrit dans la dynamique portée depuis 2012 par le Gouvernement visant à renforcer les droits des malades et notamment des droits en fin de vie. Il s’appuie sur les avancées contenues dans la proposition de loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, actuellement en cours de débat au Parlement. Il porte un effort global important ; 190 millions d’euros sur la période 2016-2018.

Ce plan se nourrit évidemment des savoirs scientifiques, de l’appropriation de la démarche palliative et de la diffusion des savoirs qui se sont développés ces dernières années. Mais il marque aussi une rupture dans notre manière d’appréhender cet enjeu : nous faisons le choix de nous adresser à la fois aux patients et aux professionnels de santé qui les accompagnent. Quatre grands axes le structurent : réduire les inégalités, mieux informer, mieux former les professionnels et développer la prise en charge à domicile.

I. Nous allons d’abord réduire les inégalités d’accès aux soins palliatifs, qui sont une réalité à laquelle nombre de nos concitoyens sont confrontés.

Quel est le constat ? Près de 225 000 personnes décèdent chaque année en France dans des conditions requérant des soins palliatifs, mais toutes n’y ont pas eu accès avant leur mort. L’accès aux soins palliatifs reste extrêmement disparate sur le territoire. Certaines régions sont très bien dotées quand d’autres, à l’inverse, subissent un retard criant. Mon objectif est clair : chaque patient doit avoir accès à des soins palliatifs dès lors qu’il en a besoin.

Je fixe donc un objectif chiffré : chaque région devra disposer d’au moins 1 lit de soins palliatif pour 100 000 habitants d’ici 2018. Plusieurs régions sont encore aujourd’hui très en deçà de cet objectif. Dès 2016, au moins six nouvelles unités de soins palliatifs seront ainsi créées. Il s’agit là d’un engagement fort, qui permettra d’assurer un maillage territorial juste, équitable, garantissant l’égal accès aux soins de tous les Français.

Inégalités territoriales toujours, s’agissant du repérage. Certains Français n’ont pas accès aux soins palliatifs parce que leurs besoins sont identifiés trop tardivement. Or, nous savons que plus ces besoins sont détectés rapidement, plus on évite les traitements agressifs et les hospitalisations non programmées.

Cette inégalité face au repérage a des sources diverses, face auxquelles il n’existe pas de solution uniforme.
Là encore, je fixe donc un objectif : une région, une solution. Concrètement, je demande à chaque Agence régionale de Santé de mettre en place, sur son territoire, un schéma de repérage précoce. Il s’agit d’imaginer des solutions novatrices, concrètes, pratiques, qui permettront de repérer plus tôt les patients qui ont besoin de soins palliatifs. Certaines pistes se dessinent d’ores et déjà. Par exemple, il s’agira de rendre possible l’appel à des experts susceptibles de se déplacer au domicile du patient pour évaluer directement ses besoins en soins palliatifs, y compris à la demande du patient lui-même.

II. Deuxième axe de ce plan : mieux informer les patients. Chacun doit connaître ses droits et être au coeur des décisions qui le concernent.

Le constat, là encore, est clair et partagé. Les Français sont très peu nombreux à être informés sur les soins palliatifs. Qu’il s’agisse de leur existence-même et de ce qu’ils recouvrent, ou qu’il s’agisse des modalités d’expression de la volonté du patient, notamment par les directives anticipées. Comment expliquer cela ? Parce que l’essor des soins palliatifs a été extrêmement rapide et que leur médiatisation n’a pas été la priorité. Les acteurs sont nombreux, les initiatives sont diverses et insuffisamment coordonnées. Mon objectif, c’est donc de simplifier pour mieux communiquer.

Cela passe d’abord par un rapprochement des différents acteurs. Deux grandes structures, hébergées par votre fondation, existent aujourd’hui : le Centre national de ressources en soins palliatifs et l’Observatoire national de la fin de vie. Ces structures seront fusionnées et donneront lieu à la création d’un seul et unique centre national dédié aux soins palliatifs et à la fin de vie. Je veux ici rassurer les personnels du centre de ressources et de l’Observatoire : cette fusion se fera évidemment à moyens constants, l’enjeu n’est pas de réduire, mais de rapprocher les structures pour accroître la force de frappe.

Ce centre sera chargé de l’exploitation et de la mise à disposition de données sur les soins palliatifs et la fin de vie, du suivi des politiques publiques, et de la communication grand public. Je lui donne ainsi pour mission de mettre en place, d’ici 1 an, une grande campagne nationale de communication à destination des Français sur les soins palliatifs et sur les directives anticipées.

III. Troisième axe du plan : améliorer la formation des professionnels de santé.

Tous les professionnels me le disent sur le terrain : la formation en soins palliatifs existe, mais elle est disparate, épisodique, trop centrée sur le volet sanitaire. Des modules, des séminaires, des conférences, sont évidemment accessibles, mais ils ne donnent pas suffisamment lieu à l’échange, au dialogue, à la confrontation des points de vue.

Mon objectif, partagé avec le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, c’est donc de structurer et de décloisonner la formation aux soins palliatifs. La structurer dans le temps, d’abord, en formant dès l’entrée dans les études, en formant tout au long du cursus, et en formant en fin d’études de manière spécialisée ceux qui se destinent plus particulièrement aux soins palliatifs. La décloisonner, ensuite, en privilégiant les pratiques interdisciplinaires.

Des expérimentations ont montré qu’il était possible de progresser. Je pense au travail remarquable mené par le professeur Régis AUBRY à l’université de Besançon, avec des cours, des stages et un mémoire interdisciplinaire à réaliser. Je souhaite que nous nous appuyions sur ce succès local pour progresser nationalement.

Nous créerons donc une filière universitaire avec un corps enseignant spécifique, dédiée aux soins palliatifs, à l’éthique et à l’accompagnement en fin de vie. Complémentairement, dans chaque université, des enseignements interdisciplinaires seront créés et se dérouleront tout au long du cursus. Il s’agit de construire un pont entre les étudiants. Etudiants en santé, en philosophie, en psychologie, en droit… Tous travailleront ensemble et se formeront aux démarches éthiques. Des lieux de stages seront agréés, pour que cette formation se nourrisse aussi des expériences acquises sur le terrain.

Enfin, je le disais, il nous faut former de manière plus spécialisée, celles et ceux qui, dans le 3ème cycle, se destinent plus particulièrement aux soins palliatifs, je pense à la gériatrie, à la pédiatrie, à l’anesthésie-réanimation ou encore à l’oncologie. Nous allons donc intégrer dans le 3ème cycle une formation spécialisée en médecine palliative et, là aussi, encourager les stages.

Un corps enseignant, une filière, une structure, il s’agit d’une véritable transformation. Il y aura un avant et un après.

IV. Enfin, quatrième axe de ce plan : développer la prise en chargé à domicile, à la maison comme en EHPAD.

Les Français le disent dans les enquêtes d’opinion, vous le disent quand vous les accompagnez, me le disent sur le terrain : ils veulent pouvoir terminer leur vie chez eux, entourés de leurs proches. Mais les acteurs du premier recours – qu’il s’agisse du médecin généraliste, de l’infirmière ou de l’aidant - ne sont pas toujours bien armés, bien préparés à ces prises en charge difficiles et complexes. Il arrive que les passages aux urgences ou les hospitalisations se multiplient sans pour autant être nécessaires.

Le développement de la prise en charge à domicile est en marche, c’est ce que l’on appelle le « virage ambulatoire ». J’ai décidé d’accélérer le mouvement. C’est l’un des grands axes du projet de loi de modernisation de notre système de santé, et une priorité budgétaire, puisque je veux rappeler que les tarifs de HAD ont été revalorisés l’an dernier, là où les tarifs des autres spécialités ont eux diminué.

Comment faire en sorte que ce mouvement concerne davantage les soins palliatifs ? En renforçant les moyens, d’abord. Concrètement, au moins 30 nouvelles équipes mobiles de soins palliatifs seront créées dès 2016 sur l’ensemble du territoire. Ce meilleur maillage permettra de renforcer les soins palliatifs à domicile et d’éviter les hospitalisations inutiles.

Au-delà du renforcement des moyens, je veux donner aux professionnels une plus grande expertise en matière de soins palliatifs et leur permettre de se coordonner entre eux pour mieux accompagner les patients en fin de vie à domicile. Là encore, je me nourris des réussites du terrain. Je prends l’exemple de Compiègne, où une coordination remarquable a été mise en place. Elle implique des médecins généralistes, une infirmière, un kinésithérapeute, un psychologue et des bénévoles d’accompagnement à domicile.

Concrètement, l’Etat apportera donc un financement spécifique à des projets territoriaux innovants structurés autour des professionnels de ville. Une enveloppe de financement spécifique a été prévue. Les dispositifs que je porte dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé seront évidemment mobilisés dans ce cadre, je pense aux plateformes territoriales d’appui, aux communautés professionnelles territoriales de santé et aux projets d’accompagnement des patients.

Enfin, toujours pour éviter les hospitalisations inutiles et permettre aux patients qui le souhaitent de rester à domicile, je demande à chaque établissement disposant d’un service d’urgence de mettre en place un protocole avec les services de HAD ou de soins infirmiers à domicile. Concrètement, le régulateur des urgences saura qui est pris en charge en soins palliatifs à domicile, afin de mieux gérer les appels téléphoniques des familles en situation de détresse et ainsi éviter un recours aux urgences qui n’est pas nécessaire.

Mesdames, messieurs,
Ce plan constitue une étape majeure dans le renforcement de l’accès aux soins palliatifs. Son élaboration a été participative : il a été conçu sur la base des discussions du comité de pilotage qui s’est réuni en juin dernier, et je veux saluer à cette occasion la qualité de vos contributions. Il vous revient désormais de décliner de manière opérationnelle les actions à mettre en oeuvre.

Un nouveau comité se réunira donc très prochainement pour mener ce travail et suivre la mise en oeuvre du plan. J’ai décidé de confier sa présidence au Docteur Vincent MOREL qui saura, je le sais, accomplir cette tâche dans un esprit constructif, en ayant à coeur de défendre l’intérêt des malades, de leurs familles et des professionnels qui les accompagnent.

L’enjeu qui est devant nous, la responsabilité qui est la nôtre, c’est de donner à nos concitoyens les moyens d’envisager plus sereinement la fin de leur vie. Vous pouvez compter sur ma détermination, comme je sais pouvoir compter sur la vôtre, pour avancer dans cette voie.

Je vous remercie.

Seul le prononcé fait foi

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