Antiviraux à action directe anti-hépatite C Premières données d’efficacité dans la « vraie vie » chez les patients co-infectés VIH/VHC
22 Juillet 2015
|Les antiviraux à action directe (ADD) sont en train de révolutionner le traitement de l’hépatite C. Des résultats de la cohorte ANRS HEPAVIH confirment pour la première fois dans la « vraie vie » leur efficacité chez les patients co-infectés par le VIH et le VHC. 12 semaines après l’arrêt du traitement, le taux de guérison est de 93% et le traitement s’avère bien toléré. Ces résultats sont présentés par le Pr Dominique Salmon (service de médecine interne et de maladies infectieuses, Hôpital Cochin, AP-HP, Paris) à l’occasion de la 8e conférence sur la Pathogénèse du VIH, le Traitement et la Prévention organisée par l’International Aids Society (IAS) du 19 au 22 juillet à Vancouver au Canada.
La co-infection VIH/VHC entraîne une évolution plus rapide de l’hépatite C chronique, avec un risque de cirrhose 2 à 5 fois plus élevé par rapport à la mono-infection par le VHC. De plus, les traitements concomitants du VIH et du VHC exposent à des risques d’interactions médicamenteuses. Des essais thérapeutiques ont mis en évidence une efficacité des antiviraux à action directe (AAD) similaires à celle observée chez des patients mono-infectés. Il était important de confirmer ces résultats hors essais thérapeutiques, « en vie réelle », et c’est chose faite avec une cohorte de l’ANRS (France REcherche Nord&sud Sida-hiv Hépatites). Avec plus de 1600 patients répartis dans 27 centres cliniques, la cohorte ANRS HEPAVIH est l’une des plus importantes cohortes au monde de patients co-infectés par le VIH et le VHC. Son objectif est d’étudier les caractéristiques des patients co-infectés pris en charge et l’accès, la réponse et la tolérance aux nouvelles molécules anti-VHC.
Au sein de la cohorte ANRS HEPAVIH, le Pr Dominique Salmon (service de médecine interne et de maladies infectieuses, Hôpital Cochin, AP-HP, Paris) et ses collègues ont analysé les données portant sur 76 patients co-infectés pour lesquels on avait un recul suffisant pour pouvoir évaluer la guérison. Une majorité d’entre eux (86%) présentaient un bon contrôle de leur infection par le VIH sous antirétroviraux. En revanche, la plupart présentaient une hépatite C chronique à un stade avancé : 80% avaient une cirrhose et 78% étaient en échec d’un précédent traitement. Le VHC était de génotype 1 chez 61% et de génotype 4 chez 22%.
Ces patients ont reçu un traitement comprenant un ou deux AAD, associés ou non à la ribavirine, pour une durée de 12 ou 24 semaines. Au terme de leur traitement, 100% des patients ont présenté une réponse virologique soutenue (charge virale VHC négative). Toutefois, cinq rechutes sont survenues au cours des 12 semaines qui ont suivi la fin du traitement. Le taux d’efficacité observé est ainsi de 93%. Cette efficacité est similaire que les patients présentent ou non une cirrhose et quel que soit le génotype du VHC. Elle ne diffère pas selon que les patients aient reçu ou non de la ribavirine et aient été traités pendant 12 ou 24 semaines.
La tolérance des AAD a été bonne, avec seulement 38% des patients ayant présenté un ou plusieurs effets indésirables liés au traitement (une anémie dans 30% des cas) ; seul un patient a été contraint d’arrêter son traitement prématurément.
« Ces résultats confirment pour la première fois les très bonnes efficacité et tolérance des ADD chez des patients co-infectés suivis dans les conditions de la « vraie vie », explique le Pr Dominique Salmon. L’efficacité observée est similaire à celle rapportée dans les essais thérapeutiques, alors que dans notre population d’étude la plupart de nos patients présentaient une hépatite C chronique à un stade avancé. Ces données de la cohorte ANRS HEPAVIH valident les recommandations actuelles en faveur d’un traitement par AAD chez tous les patients co-infectés, y compris et surtout, pour ceux qui présentent une hépatite chronique au stade de cirrhose. »
Les cinq rechutes observées dans la cohorte incitent toutefois à une surveillance renforcée des patients co-infectés. « Ces rechutes sont toutes survenues une fois le traitement terminé, précise le Pr Salmon. Il est donc indispensable d’instaurer un suivi rapproché des patients traités par AAD, même après une réponse virologique complète à l’issue du traitement et d’étudier quels sont les facteurs prédictifs de ces rechutes afin de pouvoir les éviter».
L’ANRS (France REcherche Nord&sud Sida-hiv Hépatites) a été créée en 1988. Elle mobilise les chercheurs du Nord et du Sud, de toutes les disciplines, et quelles que soient leurs appartenances, autour de questions scientifiques sur le VIH/sida ou sur les hépatites virales. L’ANRS finance les projets de recherche après qu’ils aient été évalués par des comités d’experts internationaux. Elle accompagne les projets de leur conception à leur réalisation et valorise leurs résultats afin qu’ils soient utiles aux populations. Son budget annuel d’environ 45 millions d’euros, lui est attribué par les ministères en charge de la recherche et de la santé. Depuis 2012, elle est une agence autonome de l’Inserm. |
Abstract
Use of oral DAA-based regimens in HIV-HCV co-infected patients in a real life setting – Interim analysis from the ANRS CO13 HEPAVIH cohort
D Salmon, K Lacombe, L Esterle, C Gilbert, L Piroth, F Bani Sadr, L Alric, H Aumaitre, E Billaud, J Chas, S Dominguez, A Gervais, C Lascoux-Combe, P Miaihles, D Neau, I Poizot-Martin, E Rosenthal, D Zucman, F Dabis, P Sogni, L Wittkop. 8th IAS Conference on HIV Pathogenesis, Treatment and Prevention, 19-22 juillet 2015, Vancouver (Canada), poster n°TULBPE09.
1APHP -Hôpital Cochin, Service de Médecine Interne et Pathologie Infectieuse VIH, Paris, France, 2Université Paris Descartes, Paris, France, 3APHP -Hôpital Saint Antoine, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Paris, France, 4Université UPMC, Paris, France, 5Inserm U897 -
Epidémiologie-Biostatistique, ISPED, Université Bordeaux, Bordeaux, France, 6CHU Dijon, Département d'Infectiologie, Dijon, France, 7CHU Reims - Hôpital Robert Debré, Service de Médecine interne et de Maladies Infectieuses et Tropicales, Reims, France, 8CHU Toulouse - Hôpital Purpan, Service de Médecine interne, Toulouse, France, 9CH Perpignan, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Perpignan, France, 10CHU Nantes, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Nantes, France, 11APHP - Hôpital Tenon, Maladies Infectieuses et Tropicales, Paris, France, 12APHP - Hôpital Henri Mondor, Immunologie clinique et maladies infectieuses, Créteil, France, 13APHP-Hôpital Bichat Claude Bernard, Maladies infectieuses et tropicales Hépato-gastro-entérologie, Paris, France, 14APHP - Hôpital Saint Louis, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Paris, France, 15CHU Lyon, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Lyon, France, 16CHU Bordeaux, Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, Paris, France, 17APHM-Hôpital Sainte Marguerite, 9Service d'Immuno-Hématologie Clinique, Marseille, France, 18CHU Nice - Hôpital L'Archet 1, Service de Médecine interne Cancérologie, Nice, France, 19Hôpital Foch, Médecine interne, Suresnes, France, 20Université de Bordeaux, Inserm U897- Epidémiologie-Biostatistique, ISPED, Bordeaux, France, 21CHU de Bordeaux, Bordeaux, France, 22APHP - Hôpital Cochin, Département des maladies du foie - Hépatologie, Paris, France