Afghanistan: après l’attaque dont il a été la cible, le CICR adapte son action à un conflit en mutation
24 Juillet 2013
|En Afghanistan, la prolifération de groupes armés et leur radicalisation ajoute à la complexité d’un environnement déjà instable sur le plan de la sécurité. La population en subit les effets au quotidien, et le nombre de victimes civiles est en constante augmentation. Le CICR reste fermement déterminé à venir en aide aux personnes touchées par le conflit ou toute autre forme de violence armée.
Trop souvent, des civils se retrouvent au milieu des combats, quand ils ne sont pas directement pris pour cible, et des familles entières sont anéanties lorsque leurs membres se font tuer ou mutiler. En outre, trop d’Afghans n’ont aujourd’hui pas accès aux services médicaux les plus essentiels, et les attaques contre des personnels de santé, des structures médicales et des véhicules sanitaires aggravent encore la situation. Dans ce contexte, l’aide internationale se voit de plus en plus réduite pour des raisons d’ordre politique et sécuritaire.
« L’attaque meurtrière qui a visé le bureau du CICR à Jalalabad en mai dernier reflète une situation qui ne fait que se détériorer », explique Jacques de Maio, chef des opérations du CICR pour l’Asie du Sud. « La situation est désormais telle que des hommes armés en sont venus à transgresser l’une des règles de guerre les plus ancestrales, selon laquelle ceux qui portent secours à des non-combattants doivent être épargnés et protégés, privant ainsi délibérément des millions d’Afghans d’une aide absolument vitale. Le CICR a un rôle unique à jouer en faveur de tous ces gens, et nous ne pouvons pas les abandonner. »
Le CICR a décidé de continuer à se donner les moyens de répondre aux besoins les plus urgents des victimes du conflit armé. C’est ainsi qu’il continuera à fournir des services de réadaptation physique à des dizaines de milliers d’amputés et autres handicapés, comme il le fait depuis plus de 30 ans, à soutenir des hôpitaux et à offrir des soins à des blessés de guerre. En outre, il continuera à suivre les effets du conflit sur les civils et à intervenir en conséquence auprès des acteurs du conflit. Les délégués de l’institution poursuivront leurs visites aux Afghans détenus dans le pays et à l’étranger, de même que leurs efforts visant à maintenir le contact entre membres de familles dispersées.
L’aide d’urgence en faveur des personnes touchées par les combats – résidents et déplacés – sera maintenue et fournie, si nécessaire, en partenariat avec des organismes locaux ; en particulier avec le Croissant-Rouge afghan, dont le rôle est désormais des plus vitaux dans les circonstances actuelles. Le CICR apportera son soutien à la Société nationale, tout en favorisant une action coordonnée de la part du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
« Nous devons adapter nos méthodes et procédures de travail de façon à réduire l’exposition générale aux risques, explique M. de Maio. Malheureusement, cela aura des conséquences sur la qualité et la quantité de certains de nos services. » Davantage de temps sera nécessaire pour évaluer l’impact de la diminution des activités menées par le CICR afin de garantir l’accès des bénéficiaires à l’eau et à l’assainissement, et pour mesurer les conséquences de la réduction de ses capacités à distribuer des vivres et à se rendre dans des zones reculées. En conséquence, certaines activités se verront réduites, confiées à des partenaires locaux ou purement et simplement suspendues.
Conformément à son mandat, le CICR poursuivra le dialogue qu’il a établi avec les parties au conflit afin de faire connaître et respecter les règles de la guerre, et veiller à ce que sa mission humanitaire soit comprise et acceptée. En tant qu’organisation humanitaire neutre, impartiale et indépendante opérant sans escorte ni garde armée, le CICR compte sur le soutien de tous, spécialement des entités armées, pour pouvoir mener à bien son action humanitaire en toute sécurité.
Visite dans les lieux de détention et rétablissement des liens familiaux
En Afghanistan, comme dans le reste du monde, le CICR visite les personnes privées de liberté pour observer leurs conditions de détention et le traitement qui leur est réservé. Les délégués du CICR visitent régulièrement les prisons administrées par les autorités afghanes, par les États membres de la Force internationale d'assistance à la sécurité (ISAF) placée sous la direction de l'OTAN, et par les forces américaines. L'institution aide aussi les membres de familles dispersées par le conflit à rester en contact et s'efforce de retrouver les personnes portées disparues.
Pendant les six premiers mois de 2013, les collaborateurs du CICR ont :
- effectué 108 visites dans 72 lieux de détention répartis sur l’ensemble du pays ;
- assuré le suivi individuel de 2 398 détenus et visité 841 d’entre eux pour la première fois ;
- couvert les frais de transport de 13 ex-détenus pour leur permettre de rentrer chez eux ;
- recueilli plus de 11 000 messages Croix-Rouge et en a distribué près de 10 400, essentiellement entre les détenus et leur famille, avec l’aide du Croissant-Rouge afghan ;
- facilité 3 300 contacts téléphoniques entre des familles et leurs proches détenus dans le centre de détention de Parwan ;
- permis aux familles d’effectuer 2 700 visites à leurs proches détenus dans le centre de détention de Parwan, en assurant leur déplacement.
Fourniture de soins de santé
Le soutien aux structures de santé est un élément important du travail du CICR en Afghanistan. Le CICR distribue des médicaments et apporte un soutien médical à l'hôpital Sheberghan dans le nord et à l'hôpital régional Mirwais dans le sud, qui sont tous deux gérés par le ministère de la Santé publique. En outre, il apporte un soutien technique et financier, ainsi que des médicaments et du matériel médical à 44 dispensaires du Croissant-Rouge afghan. Le CICR fournit aussi du matériel de premiers secours dans les zones de front et assure la formation des combattants et des civils aux premiers secours, afin qu’ils soient en mesure de venir en aide aux blessés.
De janvier à juin 2013, les hôpitaux Mirwais et Sheberghan ont admis 16 169 patients et effectué 82 734 consultations ambulatoires. Au total, 5 350 interventions chirurgicales ont été pratiquées rien qu’à l’hôpital Mirwais.
En outre, pendant la même période, le CICR a :
- fourni des secours médicaux sur les lignes de front pour que soient traitées les personnes blessées au cours des combats ;
- assuré une formation aux premiers secours à près de 780 combattants, aux membres des forces de sécurité nationales, au personnel de la police locale, au personnel du ministère de la Santé publique, ainsi qu’aux chauffeurs de taxis qui transportent les blessés à l'hôpital ;
- fourni mensuellement des médicaments et d’autres articles à un poste de santé local qu’il gère.
Services d’appareillage orthopédique et de réadaptation physique
Le CICR gère sept centres d'appareillage orthopédique en Afghanistan qui offrent des services de réadaptation physique aux amputés et autres personnes handicapées. Ces centres apprennent aux personnes handicapées à retrouver leur place dans la société en leur proposant une formation professionnelle, des formules de microcrédit et l’éducation à domicile pour les enfants. Un service de soins à domicile offre un soutien médical, économique et social aux paraplégiques qui auraient du mal à se rendre dans les centres.
Pendant les six premiers mois de l'année 2013, les sept centres du CICR ont :
- enregistré près de 4 050 nouveaux patients, dont 598 amputés ;
- porté assistance à 47 086 patients ;
- posé près de 8 520 prothèses et orthèses ;
- assuré plus de 124 230 séances de physiothérapie ;
- accordé des microcrédits à 350 patients pour les aider à monter leur petite entreprise ;
- fourni une formation professionnelle à 145 patients, parmi lesquels 103 ont terminé leur formation durant cette période ;
- effectué 3 921 visites à domicile pour traiter des patients souffrant de traumatismes de la moelle épinière.
Distribution de vivres et assistance non alimentaire
Avec le soutien du Croissant-Rouge afghan, le CICR distribue des vivres et d'autres articles aux personnes touchées par le conflit ou des catastrophes naturelles. Le CICR organise aussi des projets « travail contre nourriture » dans les différentes provinces pour apporter un soutien aux chefs de famille, et exécute des programmes de formation pour les propriétaires de bétail afin de leur fournir des compétences de base en médecine vétérinaire.
De janvier à juin 2013, le CICR et le Croissant-Rouge afghan ont :
- créé des emplois pour près de 4 300 personnes qui ont participé au projet « argent contre travail » dans le nord du pays.
- distribué des rations alimentaires pour un mois et des articles ménagers à plus de 3 830 familles déplacées par le conflit ou une catastrophe naturelle ;
- distribué des poussins et des aliments pour volailles, et donné une formation sur la gestion d'un élevage de volailles à plus de 1 200 familles dirigées par des femmes, dans 24 villages du nord ;
- formé près de 250 éleveurs à l'élevage de bétail et distribué des fournitures vétérinaires à 60 travailleurs paravétérinaires.
Amélioration des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement
Le CICR travaille en étroite collaboration avec les services des eaux locaux pour aider à assurer l’approvisionnement en eau potable des communautés rurales et urbaines en creusant des puits, en posant des conduites et en formant les communautés à l’entretien des pompes manuelles. Le CICR collabore avec les autorités pénitentiaires à l'amélioration des normes d’hygiène et d’assainissement dans les lieux de détention.
De janvier à juin 2013, le CICR a :
- installé des conduites et creusé des puits dans le cadre des travaux qui visent à assurer l’approvisionnement en eau potable de plus de 10 900 personnes dans des zones urbaines des provinces de Paktiya, Nangarhar et Faryab ;
- installé des pompes manuelles et formé les habitants à leur entretien ; il a aussi amélioré le captage des sources dans le cadre des travaux qu'il conduit afin d'assurer l’approvisionnement en eau potable de quelque 213 500 personnes de zones rurales des provinces de Parwan, Kapisa, Bamyan, Khost, Uruzgan, Hérat, Badghis, Farah, Nangarhar, Kandahar Kunduz et Faryad ;
- organisé des séances de promotion de l’hygiène pour environ 7 850 gardiens et détenus de lieux de détention dans le nord, le sud et l'ouest du pays ;
- contribué à améliorer l’approvisionnement en eau et les conditions sanitaires de près de 9 400 détenus dans trois prisons provinciales ;
- poursuivi ses travaux de rénovation à l’hôpital Mirwais de Kandahar.
Promotion du respect du droit international humanitaire
Rappeler aux parties à un conflit armé leur obligation de protéger les civils est un aspect fondamental de l'action menée par le CICR pour promouvoir le respect du droit international humanitaire dans le monde. Le CICR s’emploie aussi à mieux faire connaître et respecter cette branche du droit parmi la société civile, les organismes gouvernementaux et les milieux universitaires.
Entre janvier et juin 2013, le CICR a :
- présenté des exposés sur le droit international humanitaire devant plus de 1 770 membres de l’armée nationale afghane, de la police nationale, des unités de police locales, de la Direction nationale de la sécurité et des groupes d’opposition armés ;
- organisé des séances d’information sur son mandat et son action à l’intention de plus de 6 600 personnes, dont des anciens des communautés, des spécialistes des questions religieuses, des membres des gouvernements provinciaux, des autorités politiques, des ONG, et des bénéficiaires des programmes d’assistance du CICR ;
- tenu cinq cours de formation pour formateurs, auxquels ont participé près de 170 officiers de l'armée nationale, instructeurs en droit international humanitaire.
- organisé des séances d’information de trois jours sur le droit international humanitaire pour près de 4 800 membres de l’armée nationale, de la police nationale et locale et de la Direction nationale de la sécurité.
Partenariat avec le Croissant-Rouge afghan
Le CICR collabore étroitement avec le Croissant-Rouge afghan et lui apporte une assistance technique et financière pour l’aider à fournir des services à la communauté et à mettre en œuvre un ensemble de programmes humanitaires.
Entre janvier et juin 2013 :
- le CICR et le Croissant-Rouge afghan ont renouvelé pour 2013 et 2014 leur accord-cadre de partenariat sur la base duquel ils s'engagent à fournir une assistance humanitaire conjointe ;
- le Croissant-Rouge afghan a recruté près de mille nouveaux volontaires dans les provinces de Khost et Paktiya, qui vont soutenir ses activités humanitaires.