Écrit par ANRs
|
02 Juillet 2013

La dernière
enquête ANRS VESPA2 met en lumière les
progrès médicaux obtenus pour les personnes vivant avec le
VIH
en France et les enjeux à privilégier dans une approche
renouvelée des stratégies de prise en charge pour tenir compte
de l’augmentation des
comorbidités et surtout des besoins
sociaux de cette population. Cette enquête, réalisée par
des chercheurs de l’Inserm (Unités 912, SESSTIM, Marseille et
1018, CESP Villejuif) avec le soutien financier et scientifique de
l’ANRS, est publiée dans le BEH du 2 Juillet.
Le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire
(BEH) du 2 Juillet, édité par l’InVS, publie les premiers
résultats de l’enquête ANRS VESPA2 (VIH :
Enquête sur les personnes atteintes) menée par deux
équipes de l’Inserm (Unités 912, Marseille et 1018 Paris)
avec le soutien financier et scientifique de l’ANRS et du
Ministère de l’Outre-mer. Réalisée une
première fois en 2003, l’enquête ANRS VESPA2 a
été menée en 2011 en France métropolitaine et dans
quatre départements d’Outre-Mer (DOM) (Guadeloupe, Guyane,
Martinique, La Réunion) et à Saint-Martin.
Les enquêtes ANRS VESPA sont réalisées
auprès d’échantillons représentatifs des personnes
séropositives suivies à l’hôpital.
L’enquête ANRS VESPA2 a été menée en
métropole dans 68 hôpitaux auprès de 3022 personnes
séropositives incluses par 413 médecins ; dans les DOM,
dans 7 hôpitaux, 35 médecins et 598 patients ont participé
à l’étude. Cette enquête nous plonge dans la
réalité sociale, économique, médicale des
personnes vivant avec le VIH (PVVIH) en France et nous donne également
des indications sur les comportements de prévention. C’est de ce
point de vue un observatoire unique qui identifie les pistes d’une amélioration
de la prise en charge et des conditions de vie des personnes atteintes.
Principaux
résultats
Les recommandations successives en faveur
d’un traitement plus précoce se traduisent par une forte
augmentation de la proportion de personnes séropositives sous
traitement entre 2003 et 2011 (de 83,2% à 93,3%) et une
amélioration des paramètres biologiques du VIH. Ainsi, en 2011
plus de la moitié des personnes suivies ont un taux de
CD4≥500/mm3 et la grande majorité (88,8%) ont une charge virale contrôlée au seuil de
50 copies/ml. Cette tendance positive est également observée
dans les DOM, avec toutefois un peu moins de patients ayant une charge virale
contrôlée.
En ce qui concerne le diagnostic tardif de
l’infection, il est marqué aussi bien dans les DOM qu’en
métropole (55,3% des personnes nouvellement diagnostiquées
entre 2003 et 2011 le sont à un stade tardif dans les DOM ; 48,6%
en métropole). Ces chiffres soulignent la nécessité de
continuer à promouvoir le dépistage pour limiter le nombre de
personnes séropositives ignorant leur statut et sans prise en charge
de leur infection.
Cette amélioration biologique de l’infection à VIH
doit être rapportée à l’état de santé
général des personnes séropositives : la population
séropositive suivie à l’hôpital a vieilli entre
2003 et 2011 (l’âge médian en métropole atteint 49
ans en 2011, contre 41 ans en 2003) et les comorbidités pèsent
maintenant fortement sur l'état de santé des personnes (16,4%
ont été infectées par le VHC, 17,1% prennent un
traitement antihypertenseur, 17,5% un traitement hypolipémiant
et 4,2% un traitement hypoglycémiant).
Une situation sociale
difficile
La situation sociale des PVVIH
n’apparaît pas avoir significativement évolué au
cours de la période 2003-2011. Avec 58,5% de personnes qui travaillent
et 13% qui sont en recherche d’emploi, la population
séropositive est marquée par un niveau
d’activité
très inférieur à celui de la population
générale. Presque un tiers (31,5%) des personnes vivant avec le
VIH ne parviennent pas à faire face à leurs besoins sans
s’endetter et une personne sur cinq rencontre des difficultés
à se nourrir au quotidien par manque d’argent.
Mais la population séropositive
n’est pas homogène de ce point de vue et certains groupes,
notamment les malades des DOM, les femmes et les migrants d’Afrique sub-saharienne,
sont dans des situations sociales et économiques
particulièrement fragiles. Ainsi, les privations alimentaires
concernent 16% des PVVIH à
La Réunion , 49% en Guyane et
jusqu’à 58% à Saint-Martin. En métropole, les
privations alimentaires sont plus fréquentes chez les personnes
originaires d’Afrique sub-saharienne (29% des hommes et 34% des femmes)
et chez les femmes qui ont utilisé des drogues injectables au cours de
leur vie (40%) que dans les autres groupes. Ces inégalités
entre les groupes en métropole d’une part, entre la
métropole et les DOM d’autre part reflètent pour partie
l’environnement économique et social général :
contexte économique encore plus défavorable des DOM par rapport
à la métropole en termes de marché du travail et de
niveau de revenu, situation précaire des étrangers, fragilité
accrue d’une fraction de la population qui a de faibles niveaux de
qualification.
Il faut y voir aussi l’impact d’une maladie de très
longue durée, qui continue d’isoler socialement comme le montre
la proportion très élevée de personnes qui vivent seules
(40% sur l’ensemble de l’échantillon et
jusqu’à 55% chez les hommes ayant des rapports sexuels avec
d’autres hommes) auxquelles s’ajoutent celles qui vivent seules
avec des enfants (8,6%). C’est ce qui fait tout
l’intérêt des associations de lutte contre le sida qui,
à travers leurs activités, engagent toutes les
catégories de PVVIH dans la reconstruction de liens sociaux. Au cours
des 12 mois précédant l’enquête, 13,5% des
personnes ont participé à des activités associatives
avec des taux particulièrement élevés parmi les
immigrés et les usagers de drogue, catégories les plus
démunies.
Vie sexuelle et
comportement préventif
Au cours des dernières années, des
données scientifiques concordantes ont montré la
réduction de la transmissibilité du virus des personnes sous
traitement antirétroviral. Les espoirs nés de ce constat
n’ont pas encore de traduction dans le comportement préventif
des personnes atteintes.
En effet, parmi les 58,3% de PVVIH pouvant être
considérées comme à risque faible de transmission du
point de vue biomédical (i.e. sous traitement antirétroviral,
en charge virale indétectable depuis plus de 1 an et ne
déclarant aucune autre IST au cours des 12 derniers mois), 21%
déclarent au moins une pénétration non
protégée au cours des 12 derniers mois ; et cette
proportion n’est pas différente chez les personnes
considérées comme à risque élevé de transmission
selon ces mêmes critères (20%). Entre 2003 et 2011,
l’activité sexuelle dans l’année a baissé
(de 78% à 71%). En 2011, il reste difficile de révéler
sa séropositivité à ses partenaires : 14% des PVVIH
qui étaient déjà séropositives au début de
la relation actuellement en cours ne l’ont jamais annoncé
à leur partenaire principal (contre 5% chez celles qui ont appris leur
séropositivité quand elles étaient déjà en
couple), et 69% n’en ont pas informé leur dernier partenaire
occasionnel (et jusqu’à respectivement 79% et 74% chez les
hommes immigrés d’Afrique sub-saharienne et les hommes ayant des
pratiques homosexuelles).
Conclusion
Les avancées thérapeutiques
continues de ces dernières années ont profité à
tous les patients suivis à l’hôpital, nouveaux ou anciens
malades, hommes ou femmes, ultramarins ou métropolitains,
français ou immigrés. Ils vont beaucoup mieux d’un point
de vue médical, mais la longévité, autrefois
inespérée, apporte aussi son poids de maladies chroniques. Ces
progrès médicaux doivent être mis en regard de la
situation sociale des patients : l’enquête ANRS VESPA2 dessine
les contours des failles de l’insertion sociale dans le contexte
d’une maladie chronique telle que l’infection VIH. Ainsi les
observations de l’étude VESPA2 identifient les priorités
qui doivent être au cœur d’une stratégie de prise en
charge renouvelée et pas seulement médicale.
La dernière enquête ANRS VESPA2 met en lumière les
progrès médicaux obtenus pour les personnes vivant avec le VIH
en France et les enjeux à privilégier dans une approche
renouvelée des stratégies de prise en charge pour tenir compte
de l’augmentation des comorbidités et surtout des besoins
sociaux de cette population. Cette enquête, réalisée par
des chercheurs de l’Inserm (Unités 912, SESSTIM, Marseille et
1018, CESP Villejuif) avec le soutien financier et scientifique de
l’ANRS, est publiée dans le BEH du 2 Juillet.
Le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire
(BEH) du 2 Juillet, édité par l’InVS, publie les premiers
résultats de l’enquête ANRS VESPA2 (VIH :
Enquête sur les personnes atteintes) menée par deux
équipes de l’Inserm (Unités 912, Marseille et 1018 Paris)
avec le soutien financier et scientifique de l’ANRS et du
Ministère de l’Outre-mer. Réalisée une
première fois en 2003, l’enquête ANRS VESPA2 a
été menée en 2011 en France métropolitaine et dans
quatre départements d’Outre-Mer (DOM) (Guadeloupe, Guyane,
Martinique, La Réunion) et à Saint-Martin.
Les enquêtes ANRS VESPA sont réalisées
auprès d’échantillons représentatifs des personnes
séropositives suivies à l’hôpital.
L’enquête ANRS VESPA2 a été menée en
métropole dans 68 hôpitaux auprès de 3022 personnes
séropositives incluses par 413 médecins ; dans les DOM,
dans 7 hôpitaux, 35 médecins et 598 patients ont participé
à l’étude. Cette enquête nous plonge dans la
réalité sociale, économique, médicale des
personnes vivant avec le VIH (PVVIH) en France et nous donne également
des indications sur les comportements de prévention. C’est de ce
point de vue un observatoire unique qui identifie les pistes d’une amélioration
de la prise en charge et des conditions de vie des personnes atteintes.
Principaux
résultats
Les recommandations successives en faveur
d’un traitement plus précoce se traduisent par une forte
augmentation de la proportion de personnes séropositives sous
traitement entre 2003 et 2011 (de 83,2% à 93,3%) et une
amélioration des paramètres biologiques du VIH. Ainsi, en 2011
plus de la moitié des personnes suivies ont un taux de
CD4≥500/mm3 et la grande majorité (88,8%) ont une charge virale contrôlée au seuil de
50 copies/ml. Cette tendance positive est également observée
dans les DOM, avec toutefois un peu moins de patients ayant une charge virale
contrôlée.
En ce qui concerne le diagnostic tardif de
l’infection, il est marqué aussi bien dans les DOM qu’en
métropole (55,3% des personnes nouvellement diagnostiquées
entre 2003 et 2011 le sont à un stade tardif dans les DOM ; 48,6%
en métropole). Ces chiffres soulignent la nécessité de
continuer à promouvoir le dépistage pour limiter le nombre de
personnes séropositives ignorant leur statut et sans prise en charge
de leur infection.
Cette amélioration biologique de l’infection à VIH
doit être rapportée à l’état de santé
général des personnes séropositives : la population
séropositive suivie à l’hôpital a vieilli entre
2003 et 2011 (l’âge médian en métropole atteint 49
ans en 2011, contre 41 ans en 2003) et les comorbidités pèsent
maintenant fortement sur l'état de santé des personnes (16,4%
ont été infectées par le VHC, 17,1% prennent un
traitement antihypertenseur, 17,5% un traitement hypolipémiant
et 4,2% un traitement hypoglycémiant).
Une situation sociale
difficile
La situation sociale des PVVIH
n’apparaît pas avoir significativement évolué au
cours de la période 2003-2011. Avec 58,5% de personnes qui travaillent
et 13% qui sont en recherche d’emploi, la population
séropositive est marquée par un niveau
d’activité
très inférieur à celui de la population
générale. Presque un tiers (31,5%) des personnes vivant avec le
VIH ne parviennent pas à faire face à leurs besoins sans
s’endetter et une personne sur cinq rencontre des difficultés
à se nourrir au quotidien par manque d’argent.
Mais la population séropositive
n’est pas homogène de ce point de vue et certains groupes,
notamment les malades des DOM, les femmes et les migrants d’Afrique sub-saharienne,
sont dans des situations sociales et économiques
particulièrement fragiles. Ainsi, les privations alimentaires
concernent 16% des PVVIH à
La Réunion , 49% en Guyane et
jusqu’à 58% à Saint-Martin. En métropole, les
privations alimentaires sont plus fréquentes chez les personnes
originaires d’Afrique sub-saharienne (29% des hommes et 34% des femmes)
et chez les femmes qui ont utilisé des drogues injectables au cours de
leur vie (40%) que dans les autres groupes. Ces inégalités
entre les groupes en métropole d’une part, entre la
métropole et les DOM d’autre part reflètent pour partie
l’environnement économique et social général :
contexte économique encore plus défavorable des DOM par rapport
à la métropole en termes de marché du travail et de
niveau de revenu, situation précaire des étrangers, fragilité
accrue d’une fraction de la population qui a de faibles niveaux de
qualification.
Il faut y voir aussi l’impact d’une maladie de très
longue durée, qui continue d’isoler socialement comme le montre
la proportion très élevée de personnes qui vivent seules
(40% sur l’ensemble de l’échantillon et
jusqu’à 55% chez les hommes ayant des rapports sexuels avec
d’autres hommes) auxquelles s’ajoutent celles qui vivent seules
avec des enfants (8,6%). C’est ce qui fait tout
l’intérêt des associations de lutte contre le sida qui,
à travers leurs activités, engagent toutes les
catégories de PVVIH dans la reconstruction de liens sociaux. Au cours
des 12 mois précédant l’enquête, 13,5% des
personnes ont participé à des activités associatives
avec des taux particulièrement élevés parmi les
immigrés et les usagers de drogue, catégories les plus
démunies.
Vie sexuelle et
comportement préventif
Au cours des dernières années, des
données scientifiques concordantes ont montré la
réduction de la transmissibilité du virus des personnes sous
traitement antirétroviral. Les espoirs nés de ce constat
n’ont pas encore de traduction dans le comportement préventif
des personnes atteintes.
En effet, parmi les 58,3% de PVVIH pouvant être
considérées comme à risque faible de transmission du
point de vue biomédical (i.e. sous traitement antirétroviral,
en charge virale indétectable depuis plus de 1 an et ne
déclarant aucune autre IST au cours des 12 derniers mois), 21%
déclarent au moins une pénétration non
protégée au cours des 12 derniers mois ; et cette
proportion n’est pas différente chez les personnes
considérées comme à risque élevé de transmission
selon ces mêmes critères (20%). Entre 2003 et 2011,
l’activité sexuelle dans l’année a baissé
(de 78% à 71%). En 2011, il reste difficile de révéler
sa séropositivité à ses partenaires : 14% des PVVIH
qui étaient déjà séropositives au début de
la relation actuellement en cours ne l’ont jamais annoncé
à leur partenaire principal (contre 5% chez celles qui ont appris leur
séropositivité quand elles étaient déjà en
couple), et 69% n’en ont pas informé leur dernier partenaire
occasionnel (et jusqu’à respectivement 79% et 74% chez les
hommes immigrés d’Afrique sub-saharienne et les hommes ayant des
pratiques homosexuelles).
Conclusion
Les avancées thérapeutiques
continues de ces dernières années ont profité à
tous les patients suivis à l’hôpital, nouveaux ou anciens
malades, hommes ou femmes, ultramarins ou métropolitains,
français ou immigrés. Ils vont beaucoup mieux d’un point
de vue médical, mais la longévité, autrefois
inespérée, apporte aussi son poids de maladies chroniques. Ces
progrès médicaux doivent être mis en regard de la
situation sociale des patients : l’enquête ANRS VESPA2 dessine
les contours des failles de l’insertion sociale dans le contexte
d’une maladie chronique telle que l’infection VIH. Ainsi les
observations de l’étude VESPA2 identifient les priorités
qui doivent être au cœur d’une stratégie de prise en
charge renouvelée et pas seulement médicale.
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