altPour le Dr Hélène de Leersnyder, pédiatre de l'AFPA, spécialisée dans les troubles du sommeil, la semaine de 4,5 jours est préférable pour les enfants et les vacances devraient être écourtées et mieux réparties dans l'année. Toutes les études montrent qu'une meilleure répartition du travail scolaire sur une durée de 4,5 jours favorise très nettement la vigilance des enfants. Pour elle, l'enjeu de la réforme de l'école est de donner les mêmes chances à tous les enfants d'acquérir des connaissances dans de bonnes conditions horaires.


Que pensez-vous de la mesure sur les rythmes scolaires ?


« La question est : comment répartir au mieux les 24 heures d'enseignement prévues dans la semaine à l'école primaire, pour s'adapter aux rythmes de l'enfant ? Toutes les recherches en chronobiologie et en chrono psychologie s'accordent sur la semaine de 5 jours associée à des vacances écourtées et mieux réparties dans l'année. De nombreux rapports publiés sur ce thème [1] révèlent que le temps scolaire et les rythmes biologiques sont deux réalités distinctes, mais le rythme scolaire, réglé par les institutions, tient trop compte de facteurs sociaux et économiques (zones, vacances en cours d'année liées à des impératifs touristiques), au détriment du rythme endogène, journalier et saisonnier propre à chaque individu.


L'horloge biologique interne régule les sécrétions hormonales dont les taux sanguins varient au cours des 24 heures, selon des cycles très réguliers (cortisol, mélatonine, hormone de croissance). Cette horloge dépend aussi de ce que l'on appelle les "donneurs de temps" qui sont des facteurs d'adaptation à l'environnement. Les principaux donneurs de temps sont le jour et la nuit, la veille et le sommeil, les horaires de repas et les rythmes sociaux, notamment l'école. Pour être en forme, il est nécessaire que des horaires réguliers soient respectés. L'heure du lever est l'un des meilleurs donneurs de temps, à condition que les horaires soient réguliers au cours de la semaine. L'heure du coucher dépend de l'heure du lever car l'organisme accumule de la fatigue tout au long de la journée, ce qui facilite l'endormissement. Si, pendant la semaine, l'enfant se lève toujours à la même heure, il aura envie de dormir régulièrement à la même heure. La matinée de classe du mercredi évite que l'enfant demande à ses parents de se coucher plus tard le mardi soir, cassant ainsi le rythme hebdomadaire.


De nombreuses études ont par ailleurs montré une fluctuation des capacités d'attention au cours de la journée :

· de faibles performances entre 8h30 et 9h30,

· une attention maximale entre 9h30 et 12h,

· une diminution sensible de la vigilance et des performances entre 13h30 et 15h,

· une bonne période d'efficience intellectuelle entre 15h et 17h. Pendant la semaine, le lundi est un jour de performances médiocres du fait de la désynchronisation des rythmes pendant le week-end. Le mardi et le jeudi sont des jours de bons résultats.


Plus l'enfant est en difficulté, plus il aura du mal à adapter les contraintes scolaires à son horloge interne.


Ces données montrent qu'il n'y a pas de rythme scolaire idéal et que l'adage simple : "école le matin, sport (ou activité artistique) l'après-midi" ne répond pas nécessairement aux besoins réels des enfants. Les différences sociales restent importantes : les parents attentifs et disposant d'aide familiale (grands-parents par exemple) veilleront à bien doser les activités scolaires et extra-scolaires. Dans les milieux défavorisés, le temps libre risque d'être un temps passé devant les écrans, ce qui ne favorise pas non plus le sommeil et perturbe les rythmes biologiques.


Les apprentissages devraient être mieux répartis au cours de la journée, de la semaine, de l'année. L'alternance de travail en groupe et de travail individuel devrait ponctuer la journée, alliant activités sportives ou culturelles. Pour donner aux enfants une égalité de chances, la diversité des activités autres que purement académiques devra tenir compte des possibilités offertes dans chaque région, mais aussi d'un aménagement des locaux au sein même de l'école. Bien entendu, la question de la faisabilité et le coût doit être prise en compte. Avec un taux de 70% des femmes et 93% des hommes travaillant à temps complet [2], la garde des enfants risque de poser un sérieux problème pour les ménages. »


Quel est l'intérêt des temps d'activité sportives/artistiques ?

« Les rythmes scolaires correspondent à l'alternance de repos et d'activités intellectuelles à visée cognitive. Les activités cognitives doivent être réparties sur 4 jours 1/2, car le cerveau du jeune enfant ne peut pas intégrer des connaissances pendant des journées trop longues. Les temps d'activités sportives/artistiques sont des temps de repos intellectuel. Au même titre que les temps de récréation.


On confond, en France, pays où presque toutes les femmes travaillent, apprentissages scolaires et temps passé dans l'enceinte de l'école ou dans des lieux d'accueil proposés par les municipalités. En somme, on confond garderie et école. Le problème n'est donc pas de savoir si les enfants des milieux favorisés feront de la danse ou du piano, mais de s'adapter à la plasticité cérébrale du jeune enfant.


Lorsque la réforme va être adoptée dans toutes les communes, les temps libres vont s'organiser et tous les enfants vont pouvoir profiter de la danse, du judo et du piano pendant le temps passé à l'école. Les activités périscolaires et extrascolaires contribuent à l'épanouissement physique et psychique de l'enfant.

Alors oui, cela demande du temps et des moyens financiers, mais il est indispensable de savoir exactement ce que l'on demande à une société pour à la fois protéger et éduquer ses enfants. »


Êtes-vous pour ou contre le raccourcissement des vacances d'été ?

« Les études sur les rythmes scolaires et les rythmes biologiques montrent qu'idéalement, pendant l'année scolaire, les enfants devraient travailler 7 semaines et se reposer 15 jours. Pendant la première semaine, l'enfant récupère de sa fatigue et pendant la seconde, il peut avoir des activités qui favorisent son épanouissement.


Dans le même ordre d'idée, l'enfant aurait besoin de 2 mois d'été sans activité visant à l'amélioration des performances intellectuelles et à l'acquisition de connaissances scolaires. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'apprenne rien de la géographie en traversant les Alpes ou rien de l'histoire en visitant les châteaux de la Loire, mais on ne lui demandera pas de résultat objectif sur ce qu'il a lu, retenu, compris, pendant ses vacances. En fonction de son âge, l'idéal serait qu'il puisse partir 1 à 3 semaines dans des circuits de découverte avec ses parents ou en séjour organisé (ex : la mairie, les comités d'entreprise, les associations...).


Mais les 2 mois de vacances sont souvent longs et difficiles à occuper, surtout si les parents et les grands-parents ne sont pas disponibles. Il serait dommage que l'enfant se retrouve dans l'enceinte scolaire, au centre aéré, avec toujours les mêmes camarades et les mêmes amitiés mais aussi les mêmes conflits-rivalités. Le risque est de voir se constituer des bandes de quartier avec des enfants livrés à eux-mêmes à l'adolescence. En ce sens, les vacances sont trop longues.

Cependant, il faut aussi penser que beaucoup de familles sont séparées et que les vacances sont alors réparties entre les 2 parents. Les vacances sont alors un temps indispensable pour partager et mieux se connaître. Pour des raisons économiques et touristiques, il est probable que les vacances d'été, si elles sont raccourcies, seront néanmoins étalées et réparties en zones, comme les vacances d'hiver et de printemps. Ce qui risque de créer beaucoup de tensions dans les familles.

On pourrait peut-être raccourcir les vacances en partant quelques jours plus tard en juillet, comme c'est déjà le cas, et recommencer l'année scolaire fin août. Mais cela permettrait surtout que les enfants travaillent à l'école tout le mois de juin et gardent ces quelques jours de juillet pour les fêtes et sorties de fin d'année, pour ranger la classe et dire adieu à l'année écoulée. Fin août, ils auront quelques jours pour se retrouver, prendre le temps de découvrir de nouveaux locaux, de nouveaux camarades, de nouveaux enseignants afin d'être prêts à reprendre les apprentissages dans de bonnes conditions dès début septembre. »



À propos de l'Association Française de Pédiatrie Ambulatoire

L'AFPA est une association nationale regroupant plus de 1 400 pédiatres ayant un mode d'exercice à prédominance libérale (cabinets de ville et maternités privées). Bon nombre d'entre eux exercent aussi une activité publique hospitalière ou communautaire (crèches, Protection Maternelle Infantile -PMI-, maisons et établissements d'enfants à caractère sanitaire -MECS-, structures de prise en charge des handicaps, médecine scolaire, etc.).

Ses différentes missions visent à développer les actions de formation continue, élaborer une réflexion sur les programmes et les moyens de cette formation, promouvoir la recherche médicale dans le domaine de la pédiatrie ambulatoire, réaliser des actions et des programmes de pédiatrie humanitaire.

Elle est intégrée au Conseil National Professionnel de Pédiatrie (CNPP) à côté de la Société Française de Pédiatrie (SFP) et des syndicats de pédiatres. Elle entretient d'étroites relations avec les sociétés homologues européennes au sein de l'ECPCP (European Confédération of Primary Care Pédiatricians) et nord-africaines. Elle est reconnue par le Ministère de la Santé, la HAS (Haute Autorité de Santé) et la CNAM (Caisse Nationale d'Assurance Maladie), qui sollicitent ses experts sur les thématiques de la pédiatrie en ville.

Dans les domaines de la promotion de la santé et de la prévention, il est important de souligner la forte implication de l'AFPA dans les différents plans santé nationaux comme le PNNS (Programme National Nutrition Santé) et sa collaboration active avec l'INPES (Institut National de Prévention et d'Éducation pour la Santé).

Sites Internet : www.afpa.org - www.mpedia.fr


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