Greffes de mains : davantage de patients peuvent désormais en bénéficier à l'hôpital Edouard Herriot
15 Avril 2013
|Greffes de mains Davantage de patients peuvent désormais en bénéficier à HEH
5 doubles greffes de mains ont été réalisées à l’hôpital Edouard Herriot entre 2000 et 2009, dans le cadre d’un Protocole Hospitalier de Recherche Clinique (PHRC) associant les Hospices Civils de Lyon et la Clinique du Parc Lyon. Avec plus de 12 ans de recul pour les plus anciennes, l’évaluation des résultats a montré la grande satisfaction des patients bi-amputés de retrouver des mains et de recouvrer une autonomie, dont ils étaient privés dans les gestes de la vie courante.
Depuis les premières interventions, l’organisation autour des transplantations de tissus composites* s’est structurée. Au plan chirurgical elle repose sur une collaboration Public-Privé, matérialisée notamment avec la signature d’une convention entre les HCL et la Clinique du Parc Lyon. Aux côtés des chirurgiens appartenant aux spécialités requises (chirurgie de la main, chirurgie vasculaire et chirurgie plastique), la concertation et les collaborations se sont développées avec d’autres disciplines : immunologie, imagerie, psychiatrie, anatomie pathologique, dermatologie... La rééducation tient également une place cruciale et a été largement structurée avec l’équipe du Centre Romans-Ferrari.
Toutes les conditions ont été réunies pour que l’équipe lyonnaise, qui a réalisé le plus grand nombre de greffes de mains au monde, puisse dorénavant proposer cette prise en charge en soin « courant ».
Une nouvelle étape est franchie
« Les greffes de mains sortent lentement du domaine de la recherche pour devenir une option thérapeutique à part entière», explique le Pr Lionet Badet, responsable de la coordination du programme, chirurgien à l’hôpital Edouard Herriot. « Nous allons pouvoir proposer cette option à davantage de patients. C’est un réel espoir pour les personnes amputées des avant-bras, qui en plus de dépendre d’autrui pour les gestes de la vie quotidienne, sont souvent désinsérées de toute vie sociale et professionnelle. »
Une option thérapeutique utile et raisonnable
Avec un recul de 12 années, les résultats des patients greffés sont très encourageants. « A ce jour », explique le Pr Emmanuel Morelon, responsable du suivi médical des patients, « les médicaments immunosuppresseurs sont bien tolérés dans l'ensemble et il n’a pas été observé de rejet chronique ; la seule main perdue l’a été chez un patient qui a décidé d’arrêter le traitement immunosuppresseur ».
« Les évaluations montrent que les mains recouvrent entre 34% et 91% d’une mobilité normale, ce qui permet aux patients de retrouver une autonomie et de réaliser seuls les gestes de la vie courante », explique le Dr Aram Gazarian, coordinateur de l’équipe chirurgicale, chirurgien à la Clinique du Parc Lyon et aux HCL. Ce résultat est obtenu progressivement au prix d’une longue rééducation de 3 ans en moyenne. Tous les patients obtiennent dans l’année qui suit la greffe une sensibilité dite de protection (toucher, température, douleur) puis plus tard deviennent souvent capables de reconnaître les objets au toucher, sans l’aide de la vue. La force obtenue reste limitée puisqu’elle ne dépasse pas 30% de la normale. « Nous sommes favorables à poursuivre ce programme, car l’allogreffe de mains se montre à ce jour utile au regard bénéfices fonctionnels, et raisonnable au regard des risques encourus. La balance bénéfice-risque reste toutefois en constante réévaluation », précise le Dr Gazarian.
Un 6ème patient a déjà été opéré en dehors du cadre de la recherche fin 2012 :
âgé de 41 ans, il avait perdu ses 2 mains sous une presse dans un accident du travail. L’intervention a duré 18 heures, et a mobilisé 10 chirurgiens, 17 infirmières et plusieurs étudiants aides opératoires. Le patient a été placé sous immunosuppresseurs le jour de l’intervention et a démarré sa rééducation dès
le lendemain.
► Une collaboration public-privé nécessaire et novatrice
Si les collaborations public-privé sont devenues classiques, notamment dans le cadre de Groupements d’intérêt économique (GIE) pour des activités qui nécessitent des équipements coûteux (exploration, imagerie…), elles le sont beaucoup moins dans le cadre d’activités de recours. En ce sens, la collaboration HCL-Clinique du Parc Lyon est innovante. La Clinique vient en appui de l’équipe et de la logistique chirurgicale d’HEH : le jour de la greffe, elle met à la disposition des HCL 10 infirmier(e)s de bloc opératoire et des chirurgiens qui se déplacent avec l’instrumentation et le matériel indispensables à leur activité.
Chacune des institutions apporte ainsi des ressources et des compétences, au profit d’une activité de pointe.
A ces structures s’ajoute la participation indispensable et bénévole de nombreux chirurgiens de la main travaillant dans diverses cliniques privées de la région.
A l’avenir la prise en charge de la rééducation par les structures participant au service public hospitalier (dont le centre Romans-Ferrari est le fer de lance) devra être intégrée à un schéma collaboratif institutionnalisé.
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* Greffes de tissus composites : greffes incluant la peau, les tissus vasculaires et les nerfs.