07 Septembre 2012
|Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales et de la Santé, a présenté ce vendredi 7 septembre 2012 les grandes orientations de sa politique hospitalière aux professionnels du monde hospitalier.
La Ministre a annoncé la réintroduction de la notion de service public hospitalier dans la loi, supprimée par la loi HPST de 2009, afin de prendre en compte les spécificités des missions et des patients de l’hôpital public. Cette mesure trouvera ses premières traductions concrètes dès le PLFSS 2013 :
Fin de la convergence tarifaire public-privé amélioration de la tarification à l’activité (T2A) pour développer la qualité des soins et la transparence du financement renforcement de l’accès aux soins d’urgence sur le territoire, par la création de SMUR et de « médecins correspondants du SAMU ». Cette dernière mesure concrétise l’engagement de François Hollande de rendre accessibles pour chaque Français des soins d’urgence à moins de 30 minutes.
Elle a également confié à Edouard Couty, conseiller maître à la Cour des Comptes, ancien directeur des hôpitaux et président de la Fédération hospitalière de France (FHF) Rhône Alpes, la responsabilité d’une concertation destinée à rétablir un « pacte de confiance pour l’hôpital », autour de 3 thématiques :
Le service public hospitalier dans le système de soins (articulation avec la médecine de ville notamment) Le dialogue social à l’hôpital et la gestion des ressources humaines L’organisation et le fonctionnement internes de l’hôpital (notamment gouvernance).
Le « Pacte de confiance » résultera d’une large consultation auprès des acteurs du monde hospitalier (professionnels, représentants de malades et personnalités qualifiées) qui devra être menée d’ici la fin de l’année, et aboutir à une mise en oeuvre dès le début de 2013.
Discours de Marisol Touraine
Ministre des affaires sociales et de la santé
Un pacte de confiance pour l’hôpital
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Vendredi 7 septembre 2012- Seul le prononcé fait foi
Le monde a changé. Les pouvoirs publics doivent faire face aux profondes mutations de notre société dans tous les domaines qui relèvent de leur responsabilité. La place de l’économie, le rapport aux institutions, et donc au politique, les transformations sociales qui transcendent les générations ; les attentes de nos concitoyens : les bouleversements sont nombreux et rapides. La santé, à l’évidence, n’échappe pas à cette règle.
Je pense en particulier aux conséquences des évolutions épidémiologiques, au développement des addictions et au poids croissant des maladies chroniques : à commencer par le diabète, les maladies neuro-dégénératives, le cancer ou les maladies cardiovasculaires, qui nous obligent à réorganiser en profondeur l’action de notre système de soins, dont l’hôpital public est l’épine dorsale. Mais je pense également, et c’est en partie lié, au vieillissement des patients et à leur volonté d’être pris en charge à domicile. Je pense enfin aux attentes nouvelles qu’expriment les Français à l’égard de la santé : besoin de protection, de transparence, de qualité. Notre système de santé publique est au coeur de notre pacte social aujourd’hui fragilisé. Or, sans pacte social, il n’y a pas de pacte républicain.
Face à ces mutations, deux attitudes sont possibles.
La première, c’est le renoncement. Renoncer parce que c’est plus facile au regard des contraintes économiques et budgétaires qui pèsent sur nous. Renoncer parce que le poids de la responsabilité est tel qu’il écrase toute volonté. Renoncer et finalement se soumettre, peut-être de bon gré, à l’idée que la santé est un marché comme un autre. Renoncer et donc assister finalement en spectateur au démantèlement annoncé de notre service public de santé.
Vous l’aurez compris, ce n’est pas mon état d’esprit.
La seconde attitude, elle, part d’une conviction, d’une certitude, celle que l’hôpital public a un avenir parce qu’il est le socle de notre système de santé. J’ai confiance dans l’hôpital public et dans les valeurs qu’il porte : que chacun puisse se soigner quelle que soit sa condition ; que les besoins du patient soient au coeur du parcours de soins ; que la santé soit considérée non pas comme un fardeau, mais comme un facteur de progrès, d’innovation et de croissance.
Nous avons tous ensemble une immense responsabilité. Celle de faire vivre ces principes, qui sont plus que jamais des exigences. En les défendant, c’est l’hôpital public du 21ème siècle, celui de notre siècle, que nous bâtissons. Ensemble nous devons redonner toute sa force à notre hôpital en lui donnant les moyens d’affronter l’avenir.
Le 22 mai dernier, lors du salon Hôpital Expo organisé par la Fédération Hospitalière de France, je m’étais engagée à établir un pacte de confiance avec l’ensemble des personnels du monde hospitalier. Ce pacte de confiance se veut tout entier animé par les valeurs de notre service public de santé.
Le pacte de confiance, que je vous propose d’établir, se fonde sur trois piliers :
1/ La confiance, d’abord, des Français dans leur système de soins.
2/ La confiance, ensuite, entre les responsables politiques et les personnels du monde hospitalier.
3/ La confiance, enfin, au sein même de l’hôpital public.
Je veux commencer par vous dire que je porte une vision globale du système de santé. Je n’oppose pas les uns aux autres.
Les établissements privés à but non lucratif jouent un rôle irremplaçable dans la prise en charge des patients. Ils sont eux aussi confrontés à des évolutions importantes de leur activité et leur retour d’expérience nous sera précieux. Ce pacte de confiance doit leur être utile. Je souhaite aussi associer les établissements de santé privés à but non lucratif (ESPIC) aux travaux qui s’engagent.
Je pense aussi, dans la démarche que j’initie, à la place des établissements privés à caractère lucratif sans lesquels notre système de santé ne pourrait perdurer. Ils sont un élément à part entière de l’offre de soins dans notre pays.
1/ La confiance entre les Français et leur système de soins.
Permettre le retour de la confiance, c’est garantir l’accès aux soins pour tous parce que c’est la condition d’un système de santé juste.
Trop de Français ont renoncé à se soigner ces dernières années. Ma priorité est donc de garantir à chacun de nos compatriotes qu’il pourra se soigner quels que soient son lieu de résidence et ses revenus. Concrètement cela signifie : encadrer les dépassements d’honoraires, permettre l’accès aux soins d’urgence et lutter contre les déserts médicaux.
Les Français sont de plus en plus nombreux à renoncer à se soigner. Les raisons sont connues : restes à charge trop élevés, complémentaires de plus en plus chères, dépassements d’honoraires qui atteignent désormais 2,5 milliards d’euros. Les finances des ménages sont exsangues en période de crise, mais disons le aussi clairement, les médecins manquent à l’appel dans de nombreux territoires. Comme toujours, les premières victimes de ce phénomène sont les plus vulnérables de nos concitoyens : les jeunes actifs, les familles monoparentales, mais aussi les personnes âgées. Mais ne nous y trompons pas : la confiance des Français dans notre système solidaire suppose que chacun s’y reconnaisse, les classes moyennes comme les catégories populaires.
Permettre à chacun de se soigner, c’est considérer la santé comme un bien public et pas comme un marché.
Parce que la santé n’est pas un marché, je refuse de laisser les dépassements d’honoraires devenir la règle dans certains territoires. La négociation s’est engagée et se terminera le 17 octobre. L’objectif fixé est simple : que chaque Français puisse se soigner à proximité de son domicile au tarif opposable. S’il n’y a pas d’accord, je le redis, je prendrai mes responsabilités et passerai par la loi. Mais ce n’est pas ce que je souhaite. Je veux que la négociation aboutisse parce que je crois au sens des responsabilités de l’ensemble des acteurs. Comment d’ailleurs la négociation conventionnelle pourrait-elle à l’avenir conserver toute sa légitimité, si de cette négociation ne naissaient pas des accords utiles aux Français ?
Parce que la santé n’est pas un marché, l’accès aux soins d’urgence en moins de trente minutes doit être garanti. Tel est l’engagement du président de la République. Ces trois derniers mois, des solutions ont été identifiées : création d’antennes de SMUR, transport héliporté, médecins correspondants de SAMU. S’il n’est pas toujours indispensable de se rendre aux urgences, il n’est pas non plus acceptable qu’aujourd’hui, parce que l’on vit en zone rurale ou de montagne, on n’ait pas accès à des soins d’urgence. 2 millions de Français sont dans cette situation. Le 30 juin dernier, j’ai demandé aux ARS d’identifier les territoires concernés. Elus locaux, urgentistes, c’est en lien avec eux que nous adapterons les solutions au plus près des besoins. Une fois encore le service public va montrer sa capacité à innover et les premières réalisations interviendront dès 2013.
Parce que la santé n’est pas un marché, nous ne pouvons pas laisser des pans entiers de la population sans professionnel de santé. La réponse aux déserts médicaux passe par la mise en place de nouvelles maisons de santé et la réorganisation des études de médecine. Le principe fixé par le président de la République est simple : c’est un accès territorial aux soins pour tous. Le gouvernement précédent a beaucoup communiqué sur les maisons de santé et pourtant elles ne représentent aujourd’hui que 2% de l’offre sanitaire ! Dans ce domaine comme dans d’autres, je ne crois pas à la coercition. Nous inciterons les professionnels libéraux à s’installer dans ces zones. Pour ce faire, les ARS pourront user de dispositifs d’exception visant à renforcer à court terme les ressources médicales de ces territoires.
Par ailleurs, la lutte contre les déserts médicaux doit commencer très tôt, dès les études de médecine. Il est normal qu’un étudiant en médecine, qui n’a été formé qu’à l’hôpital, n’ait pas envie de s’installer seul en libéral. On a rarement envie d’exercer un métier dont on ignore tout. Les stages en cabinet prendront à l’avenir toute leur place dans la formation des médecins.
J’aurai dans les prochaines semaines l’occasion de détailler la mise en oeuvre de cette stratégie nationale de santé annoncée par le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, dans son discours de politique générale.
En créant les conditions d’un égal accès aux soins, nous retisserons le lien de confiance entre les Français et leur système de santé publique.
2/ La confiance entre le politique et l’hôpital public.
La confiance, c’est aussi celle qu’il faut restaurer entre les responsables politiques et le monde hospitalier. Depuis de trop nombreuses années, c’est une relation de défiance qui s’est installée entre les pouvoirs publics et le personnel hospitalier. Défiance lorsque le pouvoir a pointé du doigt une supposée incapacité à faire face à des impératifs de gestion rigoureuse. Défiance encore lorsqu’il invoquait une soi-disante impossibilité de faire évoluer nos établissements de santé.
Défiance à l’égard du caractère intangible des valeurs qui fondent notre service public hospitalier : l’égalité d’accès aux soins, la non-sélection des patients, une offre de qualité pour tous ou encore la réponse à l’urgence.
Moi, je veux vous le dire simplement : j’ai confiance en vous et en l’hôpital public. Parce que je suis viscéralement attachée aux vertus du service public hospitalier. Ces valeurs, ce sont les miennes et je les porterai en votre nom. Ce sont aussi celles portées par le président de la République et le Premier ministre.
Consacrer les valeurs du service public, c’est dire que l’hôpital n’est pas une entreprise. C’est réinscrire dans la loi dès cette année le service public hospitalier. C’est ainsi que, dès le PLFSS 2013, sera mis un terme à la convergence tarifaire.
L’hôpital remplit des missions spécifiques et elles sont nombreuses ! L’hôpital forme les professionnels de santé. L’hôpital est au coeur du processus de recherche. L’hôpital porte de nombreuses innovations thérapeutiques. L’hôpital accueille 24h/24h et 7/7. L’hôpital soigne les publics en difficulté, il assure le suivi des pathologies lourdes. Toutes ces missions doivent être pleinement reconnues. La loi HPST avait balayé toutes les dispositions relatives au service public hospitalier, provoquant ainsi dans l’ensemble de la communauté hospitalière le sentiment légitime qu’il y avait là une atteinte sans précédent à l’encontre des valeurs fondatrices du service public. Ces dispositions seront pleinement rétablies dès cette année.
Ensuite, nous complèterons la T2A, qui n’est plus qu’un outil de gestion financière. La tarification doit être au service de la qualité des soins. Derrière le sigle un peu barbare de T2A se cache une machine technique complexe, qui a fait oublier à nos prédécesseurs un principe simple : la tarification hospitalière n’est pas une fin en soi. Elle est un outil technique et politique, qui doit favoriser la justice, l’efficience, la qualité et la transparence. C’est en ce sens que nous la complèterons.
Vous le savez, je le sais mieux que quiconque, nos moyens publics sont contraints. Ils nous imposent davantage d’efforts et d’imagination. Ma volonté est de mobiliser plus justement nos ressources. C’est le respect des missions de service public qui doit fixer les règles de la tarification hospitalière.
Nous le ferons en mobilisant les crédits pour les publics vulnérables, et je pense en particulier aux personnes âgées et aux personnes en situation de précarité. En étant plus exigeant sur l’évaluation des missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation. En finançant des formations qualifiantes pour des métiers d’avenir et en améliorant les conditions de travail.
L’efficacité, c’est la transparence des règles de financement. C’est pourquoi je lancerai dès les premiers jours de la campagne hospitalière une opération « transparence et qualité ». Elle permettra aux fédérations de connaître les règles du jeu. Une instance de concertation ouverte aux acteurs du monde hospitalier sera mise en place pour coordonner la réforme de la T2A, afin de concrétiser cet important changement dès janvier 2013.
Les contraintes économiques et budgétaires sont réelles. Pour autant, la réponse à ces contraintes ne peut être le démantèlement du service public de santé. Au-delà des changements apportés à la tarification, je sécuriserai le financement de l’hôpital. J’ai d’ailleurs déjà commencé à le faire par un arrêté du 19 août dernier, qui permet de soulager la trésorerie des établissements. Je le dis ici, concernant les investissements d’avenir, je regrette que l’agence de notation Moodys n’ait pas été attentive à l’action engagée par les pouvoirs publics. Un ONDAM fixé à 2,7%, 4,5 milliards d’euros de plus pour la santé : nous avons pris nos responsabilités parce que nous croyons à l’avenir de l’hôpital public. Que leur faut-il de plus ?
Nous croyons à l’avenir de l’hôpital public, et nous sommes fiers de la qualité de notre recherche clinique et de nos innovations thérapeutiques. C’est pourquoi je veux rendre le financement de notre recherche plus lisible en le réorganisant. Le processus a commencé avec le lancement d’un appel d’offre commun entre l’Agence Nationale de la Recherche et la Direction Générale de l’Offre de Soins pour la recherche translationnelle en santé. C’est une première étape importante. C’est la recherche clinique qui est vecteur d’innovation thérapeutique et permet de définir les soins de demain. Les hôpitaux français sont à la pointe de l’innovation thérapeutique. Les bénéfices en termes de qualité des soins sont immenses. Mais l’innovation suppose également l’adaptation continue des compétences, des équipements et la réorganisation rigoureuse du cadre hospitalier.
Vous l’avez compris, je conçois l’hôpital public comme l’épine dorsale de notre système de santé. Pour conforter cette place singulière, je veux concentrer ses missions vers la prise en charge des phases aigües et des pathologies lourdes. Allier le progrès médical à une meilleure réponse aux attentes des patients est un enjeu fondamental dans la modernisation de nos établissements. Le développement des modes de prise en charge ambulatoire est l’un des grands défis que doit relever dès aujourd’hui l’hôpital public.
L’hôpital doit trouver sa juste place dans le parcours de soins du patient, en s’inspirant par exemple des travaux du haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Nous devons redéfinir les responsabilités de chacun et nous engager résolument sur la voie du décloisonnement entre la médecine de ville, le secteur médico-social et l’hôpital. Il est temps de construire le parcours de soins en partant des besoins des patients et non plus des structures.
Nous ne pouvons plus attendre : l’ampleur de ce que l’on appelle les hospitalisations non nécessaires et les conséquences dommageables pour les personnes concernées sont autant de raisons qui exigent une action rapide de notre part. Nous devrons notamment engager la réorganisation de nos services d’urgence. Je veux en finir avec les délais d’attente interminables et l’empilement des patients dans les couloirs. Nous pouvons y remédier. En amont, en fluidifiant les liens avec la médecine de ville. En aval, en introduisant de nouvelles fonctions dans l’hôpital : je pense par exemple à des gestionnaires de lits. Le 16 octobre, une première réunion avec l’ensemble des représentants du monde des urgences se tiendra au ministère.
Cette politique passe aussi par la mobilisation de l’ensemble du monde hospitalier et suppose qu’y soit recréé un climat de confiance.
3/ La confiance au sein de l’hôpital.
Aujourd’hui, près d’un million de personnes travaillent dans nos hôpitaux. Dans tous nos hôpitaux, du Centre hospitalier régional à l’hôpital de proximité. Dans tous ces établissements, la demande des personnels est très forte : ils veulent que le dialogue social retrouve toute sa place. Ils veulent être reconnus et respectés. Ils veulent être écoutés et entendus. Ce dialogue doit s’engager en étroite articulation avec les thèmes de l’agenda social présenté mardi dernier par Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat. Nous partageons les mêmes objectifs et nous veillerons donc à la cohérence globale des mesures que nous prendrons.
(i) Renouer avec la confiance, c’est remettre le dialogue social au coeur de l’hôpital.
Je suis ainsi particulièrement attachée au regroupement syndical, qui s’est opéré ces dernières décennies et qui permet de disposer d’interlocuteurs solides. Le dialogue social passe par des syndicats identifiés comme représentatifs, c'est-à-dire portant des intérêts généraux et collectifs. Rien ne serait pire que l’éparpillement des forces syndicales. Ce sujet de la représentativité fera d’ailleurs l’objet d’une attention particulière dans le cadre d’un groupe de travail sur l’amélioration du dialogue social.
Je veux que nous organisions ensemble un dialogue social efficace dans chaque hôpital. Je constate que le changement intervenu avec la création des ARS n’a pas trouvé son prolongement dans un dialogue social renouvelé. Nous avons besoin de concertation au niveau régional lorsque les projets mis en oeuvre concernent plusieurs établissements. C’est néanmoins avant tout au niveau de chaque établissement que le dialogue social devra se mener.
En ce qui concerne le personnel médical hospitalier, à ce jour, ni les instances, ni les modalités de ce dialogue social ne sont satisfaisantes. Or, il est temps de franchir l’étape décisive qui nous permettra d’unir l’ensemble du monde hospitalier.
Pour que le dialogue social puisse se faire dans les meilleures conditions possibles, je n’ai pas attendu le lancement devant vous aujourd’hui du pacte de confiance à l’hôpital. Plusieurs décrets seront publiés avant la fin du mois de septembre qui amélioreront le bilan social des établissements de santé : ces bilans doivent être vraiment utiles et permettre une évaluation efficace des politiques conduites en s’appuyant notamment sur des indicateurs de ressources humaines pertinents. Je souhaite également qu’un volet social apparaisse très clairement dans chaque projet régional de santé, ainsi que dans toutes les opérations de restructuration qui seront conduites. La dimension sociale ne peut plus être un codicille de nos projets d’établissements.
Dans un premier temps, la rénovation du dialogue social aura un impact positif sur les conditions de travail des professionnels. A chaque fois que je me rends dans nos établissements, j’observe à quel point la prise en compte de la qualité de la vie au travail est une nécessité absolue, à quel point la prévention des risques psycho-sociaux liés au stress au travail est également un enjeu majeur pour les établissements de santé. Je sais que ces conditions de travail sont éprouvantes. C’est pourquoi je veux que soient développées les enquêtes de satisfaction auprès du personnel. Elles doivent permettre de sécuriser ses conditions d’exercice.
Dans un second temps, un meilleur dialogue social facilitera les transformations et les évolutions qui doivent être mises en place au sein de l’hôpital. Je pense notamment à une meilleure articulation entre personnels médicaux et non médicaux au sein des établissements. Le dialogue social est la condition sine qua non de la réussite de la conduite du changement.
Un accord cadre relatif à l'exercice médical à l'hôpital a été signé il y a quelques mois par l’ensemble des organisations syndicales de médecins sous leur pression. Je le mettrai en oeuvre dans les prochaines semaines dans le cadre de la procédure engagée avec le ministère de la fonction publique. Je sais que le temps presse pour que les médecins ne perdent pas les droits accumulés dans leur compte épargne temps.
Le dialogue doit aussi s’engager sur la place des ordres paramédicaux récemment créés. 20% seulement des infirmiers sont inscrits au tableau de l’ordre. La mise en place d’une adhésion facultative devrait permettre d’apaiser les choses. Il conviendra par ailleurs d’engager la concertation pour déterminer les conditions dans lesquelles pourront être assurées la régulation déontologique et les règles de discipline à l’égard de toutes les professions paramédicales.
(ii) Pour permettre la confiance, je veux vous parler de la gouvernance à l’hôpital.
Je veux redonner aux Commissions Médicales d’Etablissement (CME) la possibilité d’être des acteurs à part entière de la définition de la stratégie des établissements, en bonne articulation avec les projets régionaux de santé. Parce que le directeur ne peut pas décider de tout. Parce que le pilotage efficace d’un établissement de santé ne peut que résulter d’un travail commun entre les médecins et le directeur. Il ne s’agit pas de défiance à l’égard des cadres hospitaliers dont je veux saluer le travail difficile et l’engagement au service de l’intérêt général. Il s’agit seulement de ne pas écarter les soignants. Pour atteindre cet objectif, une évolution de la réglementation semble aujourd’hui nécessaire.
La loi HPST a créé des tensions entre les directeurs et les médecins, qui ne se reconnaissent pas dans cette nouvelle gouvernance. Ce fut un rendez-vous raté. A nous de remobiliser l’ensemble des membres de la communauté hospitalière pour atteindre nos objectifs.
(iii) La confiance, c’est aussi préparer l’avenir des personnels de l’hôpital public.
La carrière des personnels
Pour renouer la confiance au sein de l’hôpital, celui-ci doit offrir des carrières attractives avec des perspectives d’évolution à ses personnels.
Pour cela, nous ne devons pas nous interdire de travailler sur la question de la coopération entre les professionnels ou sur celle des transferts de tâches et de délégations de compétences. Il faut voir dans quelles conditions il est possible de franchir une nouvelle étape dans la valorisation de transferts d’activité entre professionnels de santé, ainsi que dans l’identification et la définition de nouveaux métiers.
Je peux vous assurer de mon attachement à la gestion prévisionnelle des métiers et des compétences. L’accompagnement des carrières doit être renforcé par exemple à travers la mise en place de points carrière réguliers. Il nous faut aussi voir comment proposer aux seniors des métiers reconfigurés et s’interroger sur l’extension des contrats d’apprentissage et de la validation des acquis de l’expérience à l’hôpital.
Nous sommes à l’aube de profonds changements générationnels. La gestion des âges de la vie trouve dans la fonction publique hospitalière une application singulière : elle pose la question de l’attractivité de la carrière pour les jeunes professionnels et de leur fidélisation par la promotion interne. Parallèlement au parcours de soins des patients, nous devons bâtir un parcours personnalisé des carrières à l’hôpital, qui permette une plus grande mobilité. Je compte sur votre mobilisation sur cette importante question.
Je sais les réserves qui ont été formulées lors de la mise en place du Développement Professionnel Continu (DPC). Nous préciserons donc ce dispositif dans sa gouvernance et dans sa mise en oeuvre. Plus largement, les liens entre obligation de DPC et formation tout au long de la vie devront être mieux articulés pour intégrer les personnels hospitaliers dans une dynamique de formation, d’anticipation des besoins en qualification et en sécurisation des parcours professionnels. Je veillerai à favoriser le développement de temps communs de formation entre personnel médical et non médical, afin de renforcer les compétences collectives au sein des équipes hospitalières.
Il convient également de dire un mot de la formation des futurs professionnels hospitaliers.
Je pense aux internes. Ils sont en train de faire un choix important, celui de leur futur terrain de stage. A cette occasion, j'ai à coeur de rappeler le rôle primordial des internes, médecins en formation, médecins en devenir : ils sont des acteurs de la permanence des soins. Je veux rappeler leur droit d'être rémunéré pour chacune de leur contribution à la permanence des soins et leur droit à bénéficier du repos de sécurité en fin de garde. Il en va de la sécurité de nos internes, comme de la sécurité des patients.
Je pense aussi à la formation des paramédicaux profondément transformée en quelques années. Les étudiants infirmiers sont les premiers à être entrés dans le processus de LMD. Malgré les craintes initiales, et grâce aux efforts consentis par l’ensemble des acteurs, 2012 aura vu naitre la première promotion d'étudiants ayant le diplôme d'état d'infirmier, et le grade de licence. La poursuite du processus engagé appelle une évaluation que nous mènerons.
Le cap est fixé. La concertation s’engage. Elle pourra déboucher sur des négociations. Les premières mesures réglementaires qui donneront corps à ce pacte de confiance pourront être prises dès le début de l’année 2013. Enfin, les dispositions législatives nécessaires s’intégreront dans une grande loi d’accès aux soins qui sera soumise au Parlement.
Pour réussir cette opération de mobilisation de tous pour l’hôpital public et au sein de l’hôpital public, j’ai fait appel à Edouard Couty. Chacun connaît ici ses éminentes qualités personnelles, sa grande expérience du dialogue social et sa fine connaissance de notre système de santé.
La concertation que vous allez engager doit s’inscrire dans une triple perspective.
- En premier lieu, l’ambition de restaurer un service public hospitalier moderne, à hauteur des enjeux de la santé publique du 21ème siècle. Un service public qui réponde aux attentes des malades. Un service public au sein duquel les compétences et l’engagement des professionnels sont pleinement reconnus.
- Ensuite, le désir de donner une nouvelle impulsion au dialogue social à l’hôpital. Le dialogue de tous les acteurs permettra d’élaborer des solutions concrètes et d’améliorer ainsi le fonctionnement de la gestion des ressources humaines de nos établissements.
- Enfin, la volonté de clarifier le fonctionnement et l’organisation des établissements.
Les travaux que vous conduirez, cher Edouard, comporteront deux phases distinctes : la première est une consultation des acteurs dont vous me remettrez les résultats à la fin du mois de décembre. Sur la base de vos propositions, je définirai ensuite les orientations et prendrai les dispositions pour une mise en oeuvre concrète du pacte de confiance à l’hôpital au-delà de celles qui auront déjà été engagées dans le cadre du PLFSS 2013.
Je sais pouvoir compter sur l’engagement de chacun d’entre vous au service de l’hôpital public et des Français.