11 Mai 2012
|ACADÉMIE NATIONALE DE PHARMACIE - SANTÉ PUBLIQUE - MÉDICAMENT - PRODUITS DE SANTÉ - BIOLOGIE - SANTÉ ET ENVIRONNEMENT
Certaines inquiétudes se sont récemment manifestées à l’égard des médicaments génériques notamment : qualité, efficacité, et droit de substitution par le pharmacien. L’Académie nationale de Pharmacie souhaite replacer le médicament générique dans une perspective d’évolution positive du médicament dans sa conception, sa production et sa dispensation.
Qu’est-ce qu’un médicament générique ?
C’est un médicament équivalent sur le plan thérapeutique à un médicament princeps. Sa mise à disposition des prescripteurs et donc des patients répond à un impératif économique significatif pour l’assurance maladie en permettant de dégager des économies pour financer le système de soin et son accès au plus grand nombre.
En quoi un médicament générique est-il équivalent au médicament princeps ?
- Sa composition qualitative et quantitative en principe actif est identique à celle du médicament princeps. Toutefois, sa composition peut légèrement varier, en ce qui concerne les excipients contribuant à la mise en forme et à l’enrobage (aspect, couleur…) ou parfois le sel du principe actif.
- Son comportement dans l’organisme fait l’objet d’une évaluation précise dans un cadre règlementaire au médicament princeps : son absorption, sa concentration plasmatique et son élimination ne sont pas différentes.
- Cette bioéquivalence, définie par des normes internationales est démontrée par des études effectuées chez des volontaires sains.
Le médicament générique répond à tous les critères de qualité
Le médicament générique n’est commercialisé que s’il obtient une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) de la part des autorités de santé : Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, ex Afssaps) en France, European Medicines Agency (EMA) pour les AMM Européennes.
L’AMM est fondée sur :
1. l’examen d’un dossier pharmaceutique aussi complet que celui du médicament princeps. Ce dossier démontre la qualité du médicament par rapport aux normes en vigueur tant dans sa composition qualitative et quantitative que pour sa fabrication et son contrôle de qualité.
- Les preuves de la qualité des matières premières sont fournies comme pour tout autre médicament. Toute modification de fournisseur ne peut intervenir qu’après autorisation des autorités de santé.
- L’ensemble du processus de fabrication suit les règles (européennes) de Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF) avec garantie dans le temps du maintien de cette qualité. Les fabricants doivent, à cet effet, mettre en place un système d’assurance qualité et des contrôles permanents qui font l’objet d’inspections par les autorités de santé.
2. l’étude du résultat des essais de bioéquivalence par rapport au médicament princeps ; ces résultats font également l’objet d’une évaluation par les Autorités et de vérifications dans le cadre d’inspections spécialisées.
3. les études toxicologiques et cliniques du médicament princeps, dont les résultats sont considérés comme transposables aux médicaments génériques dans la mesure où la bioéquivalence est démontrée ; de plus la
répétition de nouvelles études sur des animaux et des patients, serait dès lors inutile et surtout non éthique.
La substitution doit être encouragée
Lorsque le brevet du médicament princeps est tombé dans le domaine public et lorsqu’un générique a obtenu une AMM, le médecin prescripteur se doit de ne pas s’opposer à la substitution du médicament princeps même si des cas particuliers sont possibles (voir plus loin).
Pour faciliter la délivrance, le médecin prescripteur se doit de le prescrire sous la Dénomination Commune Internationale (DCI) : nom international du principe actif commun au médicament princeps et au générique.
La « substitution » consiste donc, pour le pharmacien, à délivrer un médicament générique au lieu du médicament princeps.
Les pays où la "pénétration" des médicaments génériques est la plus élevée sont en même temps les pays les plus innovants. Ainsi, aux États-Unis, alors que les génériques représentent une large majorité des médicaments dispensés n’étant plus sous brevet, on observe une innovation pharmaceutique considérable puisqu'elle représente plus de la moitié des brevets pharmaceutiques internationaux.
Mais la substitution est parfois délicate
- dans certaines situations, le médecin peut être conduit, par exemple pour des raisons d’intolérance connue à certains excipients du médicament princeps ou du médicament générique défini, à demander la non substitution du traitement prescrit. Les cas réellement justifiés de non substitution sont rares ;
- dans les traitements chroniques, en particulier chez les sujets âgés, en raison du changement d’habitude (inquiétude, incompréhension, difficulté de lecture) ;
- lors des traitements aigus, ces difficultés sont pratiquement inexistantes ;
- c’est le rôle du médecin prescripteur et du pharmacien dispensateur d’expliquer l’intérêt de la prescription et de la dispensation du médicament générique.
En résumé :
- Les médicaments génériques sont des médicaments aux qualités identiques à celles des médicaments princeps.
- Les médicaments génériques ont fait la preuve de leur bioéquivalence, ce qui garantit la même qualité de traitement et donc d'efficacité thérapeutique.
- Les médicaments génériques ne présentent ni plus ni moins d’effets indésirables ou de réactions « allergiques » que les médicaments princeps.
- Les autorités de santé évaluent la qualité des médicaments génériques dans le cadre d'un vrai dossier d'Autorisation de Mise sur le Marché.
- Les médicaments génériques permettent de réaliser des économies substantielles en matière de dépenses de santé ce qui est un facteur favorisant l'accès aux soins du plus grand nombre à un moment de grande difficulté pour le financement des dépenses de santé.
- Les médicaments génériques ne sont, en rien, un obstacle à la recherche pharmaceutique et à l'innovation.
Toutefois, l’Académie nationale de Pharmacie consciente de
- l’inquiétude ou la méfiance de principe de certains patients à l’occasion d’une substitution,
- la difficulté de la substitution par des médicaments génériques différents lors d’approvisionnement itératif de certains patients dans plusieurs pharmacies,
- l’évolution du rôle du pharmacien d’officine bien individualisée dans la loi HPST dans son activité de pharmacien correspondant et confortée dans la récente convention pharmaceutique,
- l’implantation du Dossier Pharmaceutique aussi bien au niveau officinal qu’hospitalier, Considérant
- les enjeux de santé publique,
- les difficultés de compréhension en particulier chez le sujet âgé ou les personnes ayant des difficultés de lecture des instructions écrites,
- la difficulté d’identification de la DCI sur le conditionnement du médicament princeps dans certains cas,
- que l’effet indésirable d’un médicament princeps ou générique puisse être rapporté soit à la molécule elle même, soit directement à la formulation, soit à l’inquiétude générée par la substitution,
- que pour une optimisation du bon usage du médicament princeps et générique, une meilleure coordination en particulier entre le médecin prescripteur et le pharmacien dispensateur est indispensable, Recommande
au malade
- de se fournir autant que possible chez le pharmacien qui le suit et connait ses habitudes ;
- de signaler à son médecin ou à son pharmacien tout effet indésirable pouvant être relié à la prise d’un médicament quel qu’il soit (automédication ou médicament de prescription, princeps ou générique) ;
aux pouvoirs publics
- de rendre obligatoire pour le prescripteur, la mention de la DCI sur l’ordonnance, associée (ou non) au nom de la spécialité prescrite;
- de développer des actions d’information auprès des patients et du grand public ;
aux fabricants
- de limiter, conformément aux nouvelles dispositions de la Loi du 29 décembre 2011, les différences d’aspect du médicament générique par rapport au médicament princeps ;
- d’indiquer très lisiblement le nom de la DCI du ou des principes actifs sur le conditionnement extérieur.
aux professionnels de santé (médecins prescripteurs et pharmaciens dispensateurs)
- d’initier, en particulier lors du renouvellement de l’ordonnance un dialogue adapté et prospectif permettant de favoriser une information spécifique, de limiter les erreurs et d’optimiser la prise du médicament. Cet instant particulier est à privilégier surtout chez les sujets âgés et les personnes ayant des difficultés de lecture des instructions écrites ;
- de procéder, en cas d’effet indésirable (intolérance ou problème d’efficacité du médicament) signalé par le patient, à l’analyse de la relation éventuelle entre les faits rapportés et la prise du médicament et de déclarer à leur centre de pharmacovigilance tous les effets indésirables qu’ils auraient été à même de constater (médicaments génériques ou princeps) ;
aux pharmaciens, de façon plus spécifique :
- de fournir les explications indispensables, précises et adaptées à chaque patient et à chaque situation, lors de la dispensation, notamment lors d’une substitution, afin de limiter les risques de confusion ou de non observance ;
- d’apporter des explications adaptées au patient et de mentionner sur l’ordonnance le nom du médicament effectivement délivré en cas de substitution ou de changement de générique ;
- de « fidéliser » leurs sources d’approvisionnement, en particulier pour les traitements chroniques chez les sujets âgés.
Dans ce contexte, l’Académie nationale de Pharmacie souligne le rôle essentiel du Dossier Pharmaceutique car :
- il offre la possibilité de suivre en temps réel l’ensemble des médicaments qui ont pu être délivrés à un patient donné lors de ses passages successifs dans des pharmacies différentes.
- il est un outil de première importance pour assurer un lien entre les prescriptions hospitalières et le médecin généraliste prescripteur, permettant de détecter redondances et/ou incohérences.
- son utilisation élargie permettra d’identifier les médicaments effectivement délivrés, dans le but d’éviter la duplication des prises (délivrance concomitante par plusieurs pharmacies de médicaments princeps et de médicaments génériques).