altLe mardi 11 octobre 2011, Sup'Biotech a organisé sa conférence "Partenariats de recherche publique-privée : nouveau modèle de l'innovation biopharmaceutique" en partenariat avec Biofutur à l'hôpital des Diaconesses Paris 12e.


Première table ronde « les industriels ouvrent leurs activités de recherche avec une politique partenariale »


1. Pierre-Noel Lirsac, directeur des projets de thérapie cellulaire du Laboratoire français du Fractionnement et des Biotechnologies (LFB)


"Avons-nous besoin des partenariats de recherche publique-privée?" C'est la question posée par Pierre-No??l Lirsac, qui a mené une carrière à la fois dans le système public et au sein d'entreprises. Cette option est devenue une évidence pour innover en biopharmaceutique en raison des limites atteintes par le modèle économique du « prove it » et du « sell it ». Celui-ci a été très rentable et a permis de soigner en augmentant l'espérance de vie des patients (de 77 à 85 ans en 15 ans chez les hommes et les femmes). Mais depuis 10 ans, les autorisations de mise sur le marché de nouvelles substances actives ont été divisées par deux sur le marché américain (un marché représentatif). Dans le même temps, le coût de R&D est passé de 20 à 50 M$. La valeur globale du marché des médicaments est désormais négative. Quant au milieu académique qui représente 80% de l'innovation, il ne parvient pas à mettre sur le marché de nouvelles molécules.


L'innovation, qui exige aujourd'hui  la multidisciplinarité, doit donc passer par des partenariats entre les industries et le milieu académique. Quelles sont les attentes du privé par rapport au public?  Celui-ci  a des atouts pour ce qui relève de l'intégration de l'innovation ou du renforcement rapide de R&D. Pour cela, les projets doivent être managés sur le long terme. Si les résultats sont encourageants, il existe une marge de progression a conclu Pierre-Noell Lirsac.


2. Stephan Chalon, responsable de l'Institut de recherche partenariale chez Roche


Formé à l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (APHP), Stephan Chalon a travaillé dans la recherche publique et privée au sein de différents laboratoires pharmaceutiques américains jusqu'à son recrutement chez Roche. Il est chargé d'y mettre en place une nouvelle structure de partenariat.

La complexité actuelle de la recherche biomédicale allonge le temps de l'identification des cibles thérapeutiques. Ainsi, en 12 ans d'expérience clinique, seuls 2 des 80 projets sur lesquels M. Chalon a collaboré ont été développés. D'où la question posée: un laboratoire peut-il aujourd'hui travailler en autonomie? Alors que les laboratoires privés établissaient des collaborations ponctuelles sur une technique ou une expertise, ils développent aujourd'hui des partenariats avec le secteur académique sur le long terme.

Si l'Europe est en retard par rapport aux Etats-Unis, les modèles scandinaves, hollandais et allemands de partenariat sont dynamiques. Et de noter que dans un partenariat, l'état d'esprit et les affinités entre les différents acteurs sont importants. Avec la structure "Global Academic Alliance", Roche développe des partenariats depuis 3 ans environ. L'objectif : intégrer les partenaires académiques avec une approche en réseau. Roche dispose de deux instituts de R&D indépendants à Paris et Singapour et d'un Hub. Cette structure virtuelle regroupe trois universités hollandaises et une université du Texas. Peu présent en France, Roche établit des partenariats de projets regroupés en instituts. Ils recrutent des profils R & D pour le management de projet.


3. Eric Angevin, directeur adjoint de la recherche clinique à l'Institut Gustave Roussy (IGR)


L'oncologie vit une révolution scientifique et médicale (50 des 80 molécules en développement clinique seront approuvées d'ici 15 à 20 ans). Les partenariats entre le public et le privé de voient renforcés. Comment structurer l'IGR pour faire face à la demande de partenariat des acteurs privés? Quels sont les besoins des industriels par rapport aux centres académiques ? Pour répondre à ces questions, l'IGR a mené une étude d'intérêt pour connaître les attentes des industriels en 2006.


Un partenaire académique permet d'avoir accès à une expertise et à des patients. Les attentes des industriels tiennent d'abord à l'acquisition et au développement d'une position stratégique dans un secteur compétitif (acquisition de droits de licence exclusifs, un besoin d'accès rapide à l'information souhaitée dans le but de l'utilisation des données dans des dossiers d'enregistrement). Mais le milieu académique ne répond pas toujours aux standards requis pour les procédures d'enregistrement. Un partenariat peut permettre une transmission d'un savoir-faire en termes de certification des laboratoires et des normes de qualité. Autre attente des industriels, la mise en place de réseaux structurés de collaboration afin de dynamiser et réduire les risques liés aux projets.


Eric Angevin a conclu son intervention sur la nécessité de mesurer la valeur lors de la mise en place d'un partenariat, autrement dit les forces et les faiblesses. L'objectif est d'équilibrer les axes de discussion et de collaboration pour éviter un double écueil. Celui  de la prestation de service du côté des industriels et du côté académique, du financement de recherche sans résultat. L'étude de la valeur peut aussi permettre d'établir des partenariats équilibrés du type co-développement.


4. Isabelle Diaz, secrétaire général adjoint de l'Alliance pour la recherche et l'innovation des industriels de santé (ARIIS) et directeur recherche et Biotechnologies au Leem


ARIIS a succédé au Leem Recherche en février 2010 pour fédérer l'ensemble des industries de la santé avec une solution intégrée faisant appel à la pluridisciplinarité afin de trouver de nouvelles solutions pour les patients. Pour maintenir un niveau d'innovation, les partenariats sont un passage obligé.


Dans le secteur des métiers et de la formation, ARIIS co-organise des rencontres internationales de recherche (chercheurs académiques français du meilleur niveau, représentants corporate des entreprises de santé). ARIIS apporte aussi un soutien non-financier aux projets déposés dans le programme « Investissement d'avenir ». Elle accompagne ces projets en participant à leur gouvernance.

Autre action d'ARIIS, identifier et diffuser les bonnes pratiques des partenariats public/privé. Elle étudie l'ensemble des adhérents pour identifier ce que sont les partenariats et les bonnes pratiques ou points de blocage pour réfléchir à des leviers d'action.


Dans le domaine de la formation, ARIIS étudie les profils requis et le contexte réglementaire de formation pour établir des propositions. Elle organise "L'école de l'innovation thérapeutique" avec l'Inserm. L'édition de 2012 regroupera près de cinquante doctorants ou jeunes chercheurs qui participeront à des ateliers avec des industriels. Enfin, ARIIS fait connaître le dispositif de bourses de thèse Conventions Industrielle de Formation par la Recherche (CIFRE).


5. Friteau, Directrice de l'agence Kelly Scientifique, Paris


Kelly Scientifique est la division spécialisée de Kelly Service, n°1 mondial du recrutement.  Sa spécificité repose sur la formation scientifique des consultants. Elle permet une bonne identification des besoins en lien avec les entreprises et dans l'évaluation technique des candidatures.


Les principaux profils recrutés sont des ingénieurs, des techniciens, pharmaciens, docteurs, des profils double compétence (marketing, assurance qualité...). De nouveaux métiers se développent avec les partenariats : responsables de partenariats dans le privé ou responsables de la valorisation dans le public. Ce sont des métiers d'interface entre le public et le privé. Ils allient une expertise pointue et des compétences transversales (communication, gestion de projet, propriété industrielle par exemple).



Seconde table ronde « l'innovation aujourd'hui par qui et comment ? »


1. David Sourdive, co-fondateur Cellectis, président de Medicen


David Sourdive a présenté le cheminement de Cellectis, société créée en 1999, qui a pour objectif de faciliter le passage de l'innovation vers la production industrielle. Il a rappelé que Cellectis avait noué 60 partenariats dans le privé et autant dans le monde académique.


Cellectis s'est en premier lieu concentrée sur l'acquisition d'une position clef sur la technologie des ciseaux moléculaires développés, en amont, à l'Institut Pasteur. Elle a développé ensuite différents partenariats. Parmi eux, celui du CIRA de Kyoto, inventeur des cellules pluripotentes induites (iPS). Il a permis à Cellectis d'accéder à la propriété intellectuelle des iPS en échange de l'utilisation des ciseaux moléculaires. Dans la deuxième phase de développement, Cellectis est passée "de la technologie aux produits". Il s'agit d'acquérir des compétences pour utiliser la technologie des ciseaux moléculaires dans les domaines "où elle fait la différence", en développant des filiales d'application et des partenariats. Ainsi, les iPS, qui ne sont pas encore des "objets cliniques et industriels", peuvent être utilisés pour tester des médicaments ou réaliser des banques d'iPS. Cellectis a conclu un partenariat de co-investissement avec l'Etablissement Français du Sang pour produire des globules rouges à partir des iPS.


David Sourdive a achevé son propos en rappelant le rôle de l'environnement dans un partenariat. Ainsi, le pôle Medicen, qu'il préside, permet de financer les PME, mais aussi de structurer une filière autour de partenariats et d'éclairer les politiques publiques.


2. Gilbert Lenoir, chargé de mission Cancer Campus auprès de la direction générale de l'IGR


"Un académique ouvert sur le privé", c'est par cette présentation que s'est ouverte l'intervention du Professeur Gilbert Lenoir. Il a rappelé, à partir de l'exemple du pôle Medicen que l'innovation est aussi issue de recherches menées dans des pôles recherche/formation. Dans le domaine du cancer, des PME avaient manifesté la volonté d'être "dans le même jardin" que l'IGR pour échanger et accéder aux plateformes, d'où l'idée du partage.

L'Ile-de-France regroupe 45% du potentiel de la recherche biomédicale française. C'est aussi de ce constat qu'est née l'idée du biocluster "Cancer Campus".  Il s'agit d'un regroupement entre un pôle formation/recherche et des entreprises, quel que soit leur stade de développement. Cancer Campus correspondant à une dynamique de développement économique du territoire du Val-de-Marne, les collectivités territoriales y ont apporté leur soutien (constructions, transports, etc.). En contrepartie, le Cancer Campus, par exemple, comprend un pôle citoyen. Il garantit aux habitants du Val-de-Marne un accès au traitement contre le cancer.


3. Jérémie Westerloppe, direction des affaires économiques et gouvernementales de Celgene France


Jérémie Westerloppe a présenté les perspectives d'une jeune entreprise spécialisée dans la biotech, Celgene France,  par rapport aux partenariats public/privé en France.

Celgene est une biopharma créée en 1989 aux Etats-Unis, elle investit 25 ans après sa création, 30% de son chiffre d'affaires dans la R&D. Son domaine ? Mettre au point des thérapies innovantes pour des maladies graves invalidantes et des maladies rares. Sa filiale française, Celgene France, a été créée il y a 5 ans. Ses collaborations avec des centres d'excellence lui ont permis de mettre à disposition 4 nouvelles molécules et d'obtenir 50% d'inclusion dans des essais cliniques européens. En France, elle participe à 42 essais cliniques dans le domaine des maladies rares.


Pour M. Westerloppe, "il est impossible de faire passer les patients en premier si l'on agit de façon isolée". Le partenariat permet de "générer des synergies sur le savoir-faire pour aller plus loin, vite et mieux". Il permet aussi d'investir sur un territoire national dans les dynamiques existantes. Les collaborations permettent de bénéficier d'un réseau et de structures de recherche de premier rang, de développer une meilleure connaissance des cibles et des molécules. En s'intensifiant dans le temps, elles permettent de transformer des essais cliniques initiés par un instigateur en études pour obtenir une autorisation de mise sur le marché européenne.


L'objectif de Celgene est de faire évoluer les collaborations de phase I et II en phase III et IV. Pour cela, des équipes de recherche à forte notoriété, l'absence de freins pour contractualiser la collaboration et un terrain économico-politique favorable sont nécessaires. Enfin, il faut que la filiale puisse convaincre la maison-mère.


4. Carole Neves, directeur partenariats R&D France, Sanofi

Comment l'innovation se met en place dans un grand groupe? C'est à cette question qu'a répondu Madame Neves.


Sanofi est un groupe de 100 000 employés dans 100 pays dans lequel l'innovation s'est accompagnée de changements :

- Par la diversification des domaines d'innovation dans un premier temps (solutions globales pour la santé, recherche animale, médicaments génériques).

- Par l'organisation de la recherche ensuite. Au modèle « recherche, développement, tests cliniques », Sanofi a substitué une autonomie par domaine thérapeutique. Parallèlement, est apparu le concept d'"open innovation". Il commande une remise en question régulière du portefeuille de molécules.


Dans sa politique d'innovation, Sanofi noue des partenariats privés avec les entreprises des pays émergents (licences de produits, co-développement de produits) et des partenariats publics, mais aussi par le biais d'acquisitions (Genzyme). Mais un nouveau modèle de développement émerge : le co-développement entre deux grands groupes. Il permet de développer ensemble un médicament en partageant les risques et l'expertise. Pour l'innovation de rupture, les partenariats sont noués avec les pays émergents d'Asie-Pacifique.


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