· La FHP-MCO saisit la Commission européenne aux fins de faire condamner l'Etat français pour aides d'Etat illicites au profit des établissements publics de santé

· Elle dénonce le caractère discriminatoire et préjudiciable de l'écart tarifaire (26%) entre les tarifs hospitaliers privé/public de la Sécurité sociale

· Elle attaque également l'attribution de manière opaque et non justifiée de 99% des 8,3 milliards d'euros de l'enveloppe MIGAC aux seuls hôpitaux publics

La FHP-MCO, 1ère fédération française de cliniques et hôpitaux privés spécialisés en médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), annonce avoir saisi la Commission européenne d'une plainte contre l'Etat français pour financement discriminatoire, non justifié et préjudiciable entre établissements de santé publics et privés, au détriment des cliniques et hôpitaux privés en France.

"Depuis des années, nous nous battons pour que soit institué un tarif unique des prestations de soins entre l'hôpital public et les cliniques. Or nos établissements continuent de subir une discrimination injustifiée. Pour des prestations identiques, les tarifs de remboursement de la Sécurité sociale restent inférieurs de 26% en moyenne [[1]] à ceux de l'hôpital public [[2]]", déclare Lamine Gharbi, président de la FHP-MCO, qui regroupe quelque 600 cliniques et hôpitaux privés.

"L'actuel gouvernement restant sourd à nos arguments, nous n'avons d'autre choix aujourd'hui que de demander à la Commission européenne de sanctionner ce dispositif qui porte atteinte à la libre concurrence des établissements de santé en France", poursuit le président de la FHP-MCO.

Un mécanisme d'aide d'Etat

La plainte déposée par la FHP-MCO contre l'Etat français argue que le financement discriminatoire des établissements de santé MCO constitue un mécanisme d'aides d'Etat au profit des établissements publics de santé. Ce mécanisme, affirme le texte de la plainte, est :

  • contraire aux dispositions de l'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE);
  • n'a pas fait l'objet d'une notification au titre de l'article 108 §3 du TFUE;
  • et ne répond pas au conditions d'exemptions au titre des services d'intérêt économique général (article 106 TFUE), telles que les a définies la jurisprudence communautaire.

Pour Lamine Gharbi, "cette situation inéquitable est une aberration économique pour les finances publiques. Ces aides d'Etat déguisées sont coûteuses pour la Sécurité sociale, et donc pour les contribuables: 10 à 12 milliards d'euros pourraient être économisés chaque année si la convergence des tarifs hospitaliers public/privé était réalisée. De plus, elles font peser une menace de faillite sur nos établissements, dont un tiers se trouve déjà en déficit. Au final, c'est la liberté de choix du patient qui risque d'être remise en cause".

Importance en valeur de la tarification différenciée

Une différence très importante existe entre les tarifs des différentes prestations de soins de l'hôpital public et les tarifs des mêmes prestations délivrées par les cliniques.

(cf: Annexe 1 dans le document en pièce-jointe)

Ces différences sont renforcées par des effets de volume, en fonction des parts de marché respectives. En valeur, la tarification différenciée dénoncée dans la plainte induit une importante différence de financement.

"Les cliniques et hôpitaux privés en France réalisent près de 60% de l'activité chirurgicale en France et 30% des capacités d'hospitalisation en médecine, chirurgie et obstétrique en France", rappelle Lamine Gharbi. "La distorsion que nous dénonçons se chiffre donc en milliards d'euros au final".

Ainsi, en 2010, sur 52 milliards d'euros dépensés pour l'hospitalisation de court séjour (MCO), 42 milliards sont allés aux hôpitaux publics, contre 10 milliards pour l'hospitalisation privée, alors que les cliniques et hôpitaux privés assurent pourtant pratiquement la moitié des opérations sur le secteur marchand (60% en chirurgie) et représentent le tiers des lits d'hospitalisation.

(cf: Annexe 2 dans le document en pièce-jointe)

MIGAC: une dotation opaque qui aggrave la distorsion

Outre la discrimination sur les tarifs dont bénéficient les établissements publics, la FHP-MCO attaque devant la Commission européenne l'allocation des dotations MIGAC (missions d'intérêt général et aides à la contractualisation).

Cette enveloppe budgétaire est allouée chaque année en sus du financement par les tarifs et aggrave considérablement la distorsion. En effet, elle bénéficie presque exclusivement (à 99%) aux seuls hôpitaux publics. En 2011, cette dotation budgétaire globale s'élève à 8,3 milliards d'euros. "Nous ne touchons que 1,1% de cette enveloppe MIGAC qui est attribuée de manière assez opaque, ce qu'a pointé du doigt un rapport parlementaire récent. Or les cliniques et hôpitaux privés participent également aux missions de service public. Bref, pour nos établissements déjà pénalisés par des tarifs inférieurs, c'est la double peine !", déplore le président de la FHP-MCO.

Absence de justification des discriminations tarifaires

Si la loi française (Code de la Sécurité sociale) prévoit la possibilité de tarifs différents selon les établissements, cette différenciation doit être justifiée. La loi nationale, le principe d'égalité et le droit communautaire imposent donc pour les ministres concernés (les tarifs sont fixés par arrêtés ministériels) de justifier précisément les écarts de financement.

"Le fond du problème, c'est que plus de huit ans après l'introduction de la tarification à l'activité (T2A), il n'existe toujours aucun outil permettant de justifier d'un tel différentiel", explique l'avocat de la FHP-MCO, Me Thierry Dugast, du cabinet Saint-Louis Avocats.

"De nombreux rapports officiels établissent que les différences de tarification qui subsistent entre les établissements publics et privés après correction des différences de champ (par exemple, honoraires de médecins) représentent un écart significatif qu'aucun motif légalement admissible ne peut justifier. Nous produisons de nombreuses pièces et rapports (IGAS, Cour des Comptes par exemple) à l'appui de cette affirmation", poursuit l'avocat.

"Il en va de même pour la dotation MIGAC qui est attribuée chaque année de manière totalement opaque par arrêté ministériel et sans référence préalable et vérifiable aux missions de service public qui pourraient être individuellement assurées par les établissements de santé concernés. En réalité, les dotations MIGAC sont attribuées en fonction des besoins des établissements publics, et non en fonction des surcoûts justifiés des missions de service", souligne Me Thierry Dugast.

Absence de conformité avec le droit communautaire

Pour la FHP-MCO, la discrimination tarifaire opérée par l'Etat français pour les opérateurs du système de soins hospitaliers génère des atteintes aux conditions d'un marché concurrentiel efficient. Ce système favorise donc les établissements publics au détriment des opérateurs privés et entrave nécessairement la libre circulation.

Elle affecte également la possibilité de choix pour les consommateurs/patients dans la mesure ou elle est la cause d'un affaiblissement voire d'une disparition progressive d'une offre de soins privée, privant les consommateurs d'une concurrence source d'amélioration en termes de rentabilité et de qualité.

Dans sa plainte, la FHP-MCO demande donc à la Commission européenne de faire cesser les pratiques litigieuses de l'Etat français dans la fixation des tarifs hospitaliers et l'allocation des dotations MIGAC. Ces pratiques introduisent des aides d'Etat illicites à l'avantage des hôpitaux publics ne correspondant pas à leurs obligations de service public.

(cf: Annexe 3 dans le document en pièce-jointe)

Une question de survie économique

Dans le système de financement français, les tarifs des prestations d'hospitalisation sont fixés par l'autorité ministérielle et constituent la source essentielle, voire quasi exclusive, des ressources financières des établissements de santé privés. Or le financement discriminatoire met en péril la situation économique déjà difficile des cliniques et hôpitaux privés. En 2009, 31% des établissements privés MCO étaient en déficit.

"Nos établissements doivent faire face à d'importants investissements pour rester en pointe et sont lourdement endettés. Les remboursements de l'assurance-maladie ne couvrent plus les charges d'exploitation qu'à hauteur de 90,3% [[3]]. Les hôpitaux privés et cliniques qui arrivent à survivre dans ces conditions n'y parviennent que grâce à l'excellence de leur gestion et aux recettes annexes d'hôtellerie, de restauration et de services", explique le président de la FHP-MCO.

"Certains établissements n'ont pu survivre qu'en se regroupant, d'autres ont tout simplement mis la clé sous la porte. Aujourd'hui, 29 départements n'ont plus de maternité privée, privant ainsi les patients de leur liberté de choix", rappelle Lamine Gharbi.

Il poursuit: "Au début des années 1990, on comptait 1.200 cliniques et hôpitaux privés MCO, contre 587 aujourd'hui [[4]]. En face, combien d'hôpitaux publics ont fait faillite ? Zéro. En revanche, une gestion calamiteuse et des créations d'emplois incontrôlées ont fait exploser leur endettement".

Selon un rapport de la Cour des Comptes, la dette totale cumulée des établissements publics de santé a atteint 24 milliards d'euros en 2010, soit 1,2% du PIB [[5]].


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