altMonsieur le Président du Conseil économique social et environnemental, cher Jean-Paul Delevoye, Monsieur le Directeur général de la santé, Cher Jean-Yves Grall, Mesdames et messieurs les directeurs généraux des agences régionales de santé, Mesdames et messieurs les directeurs des établissements de santé, Mesdames et messieurs les présidents de CME Mesdames et messieurs leurs représentants, Chers tous, Vous avez répondu nombreux à mon invitation pour échanger aujourd’hui autour de la nouvelle loi, et je vous en remercie.

Cette loi suscite des inquiétudes, sachez que je les ai entendues.

La loi de 1990 est très structurante dans vos fonctionnements, et, en même temps, nombre d’entre vous en demandent l’évolution, depuis une quinzaine d’années. Le Conseil constitutionnel lui-même nous y a invités dans deux décisions récentes, avec comme date butoir le 1er août.

C’est ensemble que nous allons relever ce qui s’apparente à un véritable défi.
Qu’y a-t-il dans cette loi ?

Tout d’abord, les fondements de la loi de 1990 ne sont pas bouleversés, j’ai même tenu à les confirmer. J’ai veillé en effet à ce que les soins psychiatriques libres demeurent la règle, et que les hospitalisations sous contrainte ne soient qu’une exception, lorsque l’état du patient l’exige.
J’ai aussi souligné au cours des débats au Parlement à quel point l’alliance thérapeutique demeurera toujours une composante essentielle de la relation entre un médecin et son malade.

La novation apportée par la loi, c’est avant tout la possibilité de prendre en charge pour les patients sous contrainte au moyen de soins ambulatoires et non plus seulement au moyen d’hospitalisations complètes.
Le médecin pourra proposer au patient un programme de soins à l’extérieur de l’hôpital, qui sera une forme de prise en charge pleine et entière. Le psychiatre est la personne centrale dans ce dispositif, c’est le psychiatre qui propose de lever l’hospitalisation, c’est le psychiatre qui propose le programme de soins et qui le définit, c’est le psychiatre qui demande le cas échéant la réhospitalisation ou la fin des soins.

La loi, en offrant ces soins dans la communauté, met la psychiatrie au même que la chirurgie ou la médecine avec la possibilité d’une prise en charge ambulatoire pour tous les patients. Elle permet ainsi, à tous, des formes de soin psychiatrique moderne, dans tous les lieux de la cité, des soins qui permettent aux patients de rester au maximum insérer dans leur lieu de vie. La psychiatrie française peut leur offrir cette qualité des soins : elle a été l’une des premières à s’ouvrir vers l’extérieur avec la politique de secteur. A cet égard, la loi s’inscrit dans l’évolution que vous avez vous-mêmes donné à vos pratiques.

A travers cette loi, j’ai aussi tenu à apporter une réponse aux situations très délicates auxquelles vous êtes confrontés au quotidien. Je pense à ces moments où vous accueillez une personne qui a besoin de soins immédiats, alors que vous ne trouvez aucun tiers pour formuler une demande. Je sais que vous et vos équipes passez des heures à chercher ces tiers, et que parfois vous êtes contraints de laisser partir la personne malade au détriment de sa santé. Désormais, vous pourrez prendre en charge cette personne, en parfait accord avec la déontologie.

J’ai aussi souhaité apporter un soin particulier à la situation des patients hospitalisés pour irresponsabilité pénale ou en Unité pour Malades Difficiles. La loi prévoit d’asseoir la demande de sortie sur un avis collégial et pluriprofessionnel.
Enfin, nous avons répondu aux questions prioritaires de constitutionnalité.

Il s’agit d’une part de soumettre au contrôle systématique du Juge des Libertés et de la Détention le bien-fondé des hospitalisations complètes sous contrainte, dès lors que leur durée excède 15 jours, puis 6 mois. Cette saisine automatique s’ajoute à la saisine facultative, exercée à tout moment par la personne soignée.
Il s’agit également de s’assurer que l’hospitalisation d’office est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état du malade et de soumettre donc la prolongation d’une mesure d’hospitalisation d’office à la demande conforme de deux psychiatres.

Nous avons aussi introduit de nouvelles dispositions en cas de désaccord entre le psychiatre et le préfet. En effet, lorsque le psychiatre propose la fin de la mesure sous forme d’hospitalisation complète (ce que l’on a appelé une « sortie sèche »), et que le préfet ne suit pas cet avis, le juge des libertés et de la détention sera désormais saisi par le directeur de façon systématique.
Il s’agit là de dispositions essentielles qui améliorent les droits des patients, et vous permettront de mieux travailler.

Il en est de même pour ce qui concerne l’unification du contentieux. A compter du 1er janvier 2013, le juge des libertés et de la détention sera compétent pour statuer sur les irrégularités des décisions administratives de placement, de prolongation et de renouvellement. Ce nouveau bloc de compétences au profit du juge judiciaire est une demande réitérée des directeurs d’établissement et des usagers, et j’y ai été très sensible, car cela va faciliter l’accès de tous au droit.

Nous allons tous ensemble mettre en oeuvre ce nouveau dispositif et j’y apporterai une attention toute particulière.
Je sais qu'au delà des principes qui structurent cette loi, c’est bien la mise en oeuvre concrète de cette réforme qui est essentielle. J’ai conscience que cette mise en oeuvre n’est pas évidente, et nous allons tout faire pour vous y aider. Vous avez déjà transmis de nombreuses questions, elles sont très pertinentes et nous allons y répondre, aujourd’hui et au cours des prochaines semaines. Le ministère de la santé vous accompagnera pour traduire précisément la loi à la diversité des situations individuelles que vous rencontrerez.

Je souhaite que tout au long de l’été, dans chaque département, une cellule opérationnelle soit mise en place rassemblant les délégués territoriaux des ARS, les procureurs, les préfets et les directeurs concernés. Au niveau national, nous serons à l’écoute de ces cellules pour apporter en temps réel les réponses à leurs questions. Je remercie donc d’ores et déjà les établissements de bien vouloir se tourner en première intention vers leurs ARS pour toutes les questions qui se poseront au cours des prochaines semaines.

Par ailleurs, et comme je l’ai dit à plusieurs reprises, la psychiatrie n’a pas seulement besoin de mesures législatives et réglementaires. La psychiatrie a besoin de sens, et de grandes orientations pour son devenir, pour qu’ensuite les acteurs de terrain pensent les dispositifs les mieux adaptés aux spécificités locales.

Notre pays doit rediscuter des grands objectifs de la psychiatrie, et des axes nationaux d’amélioration prioritaires.

Pour ma part, et comme je l’ai souligné plusieurs fois, je veux que les personnes qui entrent dans la maladie soient aidées et soignées plus rapidement qu’aujourd’hui.
Je veux que les ruptures de prise en charge diminuent et que les aidants soient mieux accompagnés, Je veux que les situations d’urgence psychiatrique trouvent, en tout endroit du territoire national, une réponse adaptée, Je veux aussi que, quel que soit le lieu où ils habitent, y compris lorsqu’ils sont suivis par le secteur médico-social, nos concitoyens bénéficient d’une qualité des soins d’un niveau équivalent.
Je veux, qu’à partir d’un diagnostic partagé, de telles orientations soient débattues et élaborées, avec vous, les représentants des professionnels, des employeurs, mais aussi les usagers et les sociétés savantes.
C’est sur ces sujets majeurs que je vais travailler avec vous dans le cadre du plan psychiatrie santé mentale, dont j’ai installé lundi dernier le comité d’orientation pour mener cette construction collective.

Mesdames et Messieurs, Cette demi-journée a été conçue pour vous, et j’espère qu’elle répondra à vos attentes.
J’ai demandé à Pascal Maurel, journaliste, d’être présent parmi nous, pour garantir la meilleure interactivité, car je veux que cette session soit véritablement utile à chacun d’entre vous.
Tout au long de l’été, le ministère de la santé complètera le site internet dédié, par les réponses aux questions que les ARS nous poseront.

La réforme de la loi de 1990 n’est pas une réforme anodine.

Elle touche aux subtils équilibres de notre système de santé, entre le consentement, l’accès aux soins, la contrainte, les droits, l’intimité.
La loi apporte des garanties supplémentaires, pour l’ensemble des acteurs concernés, en mettant au coeur du dispositif le psychiatre et l’équipe soignante, lesquels visent un seul but : l’accès aux soins, la continuité de ces soins, l’alliance thérapeutique, la protection des personnes et le respect des libertés et des droits.

Je compte vraiment sur vous.

Je vous remercie.

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