22 Octobre 2018
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Des chercheurs du CEA, du CNRS et de l’Université Aix-Marseille[1], en collaboration avec le KAERI[2], ont mis en lumière une grande diversité d’outils de réparation, de protection et de régulation, qui permettent à une famille de bactéries de résister aux radiations. Ces résultats sont issus d’une méta-analyse se basant sur 296 publications et couplée à l’analyse de 11 génomes. Publiés le 18/10/2018 dans FEMS Microbiology Reviews, ils ouvrent de nouveaux champs d’investigations dans les domaines de la radioprotection, des mécanismes de défense bactériens et de la réparation de l’ADN. La radiorésistance est présente chez des organismes aussi différents que les bactéries, les archées et les petits invertébrés. Les organismes les plus étudiés en termes de radiorésistance sont les bactéries du genre Deinococcus. Elles présentent une radiorésistance extrême, tolérant des doses de radiations ionisantes de l’ordre de 5000 Gy (Gray[3]) sans perte de survie alors que 200 Gy est une dose létale pour la plupart des bactéries et qu’une exposition de 5 à 10 Gy seulement suffit pour tuer les cellules humaines. Comprendre comment les Deinocoques résistent aux radiations peut permettre une meilleure compréhension de la résistance de certaines cellules cancéreuses aux radiothérapies, ou inversement de comprendre pourquoi certaines cellules sont plus radiosensibles que d’autres. Une équipe américaine[4] a obtenu en 2014, par évolution dirigée[5], des bactéries Escherichia coli radiorésistantes (3000 Gy) après irradiations répétées en laboratoire. Ces travaux ont conclu que les mécanismes de radiorésistance conférés par évolution dirigée étaient multifactoriels et différaient (en partie) des mécanismes issus de l’évolution naturelle tels que décrits alors pour la bactérie Deinococcus radiodurans. Radiorésistance de Deinococcus : quelle est son origine ? Au-delà de l’espèce modèle D. radiodurans, de nombreuses espèces de Deinococcus radiorésistantes, dont les chercheurs connaissent les génomes, ont été isolées de divers environnements dans le monde entier (déserts chauds et secs, sources chaudes, Antarctique, etc.). L’année 2016 voit naître une collaboration scientifique franco-coréenne permettant alors aux chercheurs d’explorer cette biodiversité en profondeur pour voir les points communs, les spécificités, et si les mécanismes de radiorésistance témoignent de la grande capacité du vivant à générer de la nouveauté sans modèle établi. Les auteurs de ces travaux ont alors passé en revue tous les mécanismes et facteurs impliqués dans la résistance au stress oxydatif et la réparation de l’ADN. Les résultats de cette méta-analyse de 296 publications, portant sur plus de 250 protéines, et sur un ensemble de 11 génomes, permettent de définir la partition et le rôle de chaque protéine. [1] Le Gray (Gy) est l’unité de dose absorbée. Elle permet d'exprimer l'énergie massique reçue sous forme de rayonnement par le système étudié. 1 Gy = 1 J/kg. [2] L’équipe de Michael Cox, à Madison (USA) et ses collaborateurs [3] L’évolution dirigée consiste dans ce cas en des irradiations répétées avec des doses sub-létales. Les cellules survivantes sont resoumises à une dose incrémentée, sur plusieurs cycles, permettant d’augmenter la radiorésistance [4] Au sein du BIAM, l'Institut de biosciences et biotechnologies d'Aix-Marseille (CEA/CNRS/Université Aix-Marseille) [5] Institut de recherche coréen pour l'énergie atomique Références : Sangyong Lim, Jong-Hyun Jung, Laurence Blanchard and Arjan de Groot. Conservation and diversity of radiation and oxidative stress resistance mechanisms in Deinococcus species, FEMS Microbiology Reviews, 18/10/2018, DOI: 10.1093/femsre/fuy037 |