altLa Caisse nationale de l'Assurance Maladie (Cnam) et l'École polytechnique renouvellent pour 3 ans leur convention de partenariat de recherche et développement dans le domaine des sciences des données. Débutée fin 2014, cette collaboration a abouti à de premiers résultats très prometteurs et a permis de dégager de nouvelles approches d'exploitation des données du Système national d'information inter régimes de l'Assurance Maladie (Sniiram), la base de données santé qui compile toutes les données de remboursements de soins en France.


L'objectif du partenariat est de développer différents types d'algorithmes de traitement des données, permettant notamment d'automatiser la détection de médicaments aux effets secondaires nocifs, voire graves, permettant aux autorités sanitaires d'asseoir leurs décisions sur des faits scientifiquement prouvés. Au cours des trois premières années de travaux, Emmanuel Bacry, Professeur de Mathématiques appliquées, responsable de l'initiative Data science à l'École polytechnique et Directeur de recherche au CNRS à l'Université Paris-Dauphine (CEREMADE), et son équipe du Centre de mathématiques appliquées (CMAP - École polytechnique/CNRS) ont réussi à prouver l'efficacité de leur approche visant à détecter les signaux faibles dans l'immense volume de données du Sniiram (voir encadré). Les algorithmes d'apprentissage automatique développés par les chercheurs ont en effet retrouvé l'association connue et prouvée par les méthodes classiques entre prise de pioglitazone et le déclenchement d'un cancer de la vessie chez les patients souffrant de diabète.


Détecter les effets secondaires potentiels de médicaments

L'objectif du renouvellement du partenariat est d'approfondir les recherches dans le domaine de la surveillance des produits de santé et de développer des algorithmes sur différents types de données. Le projet de pharmaco-épidémiologie mené dans le cadre du renouvellement de ce partenariat sera ainsi centré sur la recherche et la validation de nouveaux signaux de sécurité pour détecter les effets secondaires potentiels de médicaments. L'étude de l'association entre la prise de rosiglitazone et l'apparition d'une insuffisance cardiaque ou d'un infarctus du myocarde est ainsi en cours.


Un second projet en cours de développement porte sur la prise médicamenteuse et la survenue de fractures chez les personnes âgées de plus de 65 ans. Ce projet cherchera à mettre en évidence à partir des données les sur-risques de fracture liés à la prise de médicaments identifiés comme facteur de risque de chute (anxiolytiques, sédatifs et hypnotiques, antidépresseurs, antipsychotiques, etc...).


Analyser les parcours de soins de patients

Au-delà des effets secondaires des médicaments, plusieurs approches orienteront les recherches afin d'analyser, d'identifier et de qualifier dans la masse de données différentes typologies de parcours de soins. Les chercheurs travailleront par exemple à estimer la fréquence des recours au système de santé ou décrire des pratiques cliniques et leur adéquation aux recommandations médicales. Pour ce faire, les équipes développeront des outils de visualisation et de clustering adaptés aux données volumineuses.


Identifier les mésusages et les fraudes

L'identification de situations de mésusage, voire de fraude, est indispensable à l'Assurance Maladie pour éviter les gaspillages et assurer l'utilisation légitime de ses ressources. Ce projet vise à mettre en place des procédures automatisées permettant de balayer en continu la base de données du Sniiram pour identifier les situations suspectes. Avec cette nouvelle méthode employant le Big Data, l'innovation réside dans le fait de croiser les données en recherchant des cas de fraudes sans a priori initial sur les types de médicaments, la base étant analysée dans son intégralité. Cet outil constitue un complément précieux, car économe en moyens, à la réalisation par la CNAM de travaux spécifiques destinés à documenter ces éventuels mésusages et ces fraudes.


Pour Emmanuel Bacry, responsable de l'initiative Data Science de l'École polytechnique, « l'intérêt de ce projet de recherche est de déployer, grâce à l'analyse de données massives, de nouvelles pistes permettant de répondre aux enjeux majeurs de santé publique. À terme, un de nos objectifs est par exemple de passer d'analyses ciblées et de tests individuels de médicaments à une détection automatique, simultanée et globale d'interactions nocives pour les patients ».


Le Sniiram : une des plus grandes bases de données médico-administratives au monde

Créé en 1999 par la loi de financement de la sécurité sociale, le Sniiram regroupe des données issues de 1,2 milliard de feuilles de soins chaque année sur la population couverte par le régime général en France, soit près de 65 millions d'assurés sociaux. Depuis qu'il a été relié aux données du Programme de Médicalisation des Systèmes d'Information (PMSI) en 2009 qui centralise la consommation de soins dans les établissements de santé, il rassemble désormais à la fois la consommation de soins de ville et celles liées aux hospitalisations.

Cette base de données, constituée de 200 millions de mégaoctets d'informations liées les unes aux autres (âge, sexe, médicaments, médecins traitants, durée des traitements, etc.), est l'une des rares à couvrir la quasi-totalité de la consommation de soins d'un pays. En charge de la gestion du Sniiram pour l'Etat, l'Assurance Maladie s'appuie depuis plusieurs années sur cette base de données pour mener à bien ses missions d'assureur solidaire en santé tant au niveau de la qualité des soins que de la gestion des politiques de santé. Elle l'exploite également à des fins de santé publique et de pharmacoépidemiologie, en lien avec les autorités de santé.


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