02 Décembre 2010
|LAURÉATS : Servane Tauszig-Delamasure (centre Léon-Bérard de Lyon, CNRS UMR 5238).
TRAVAIL RÉCOMPENSÉ :« Le récepteur à dépendance TrkC, une ruse pour éliminer une tumeur ».
Contrairement aux cellules normales, qui ne se divisent que
lorsqu’elles reçoivent un stimulus particulier, les cellules tumorales,
elles, peuvent se multiplier indéfiniment. Pour cela, elles réussissent à
contourner de façon machiavélique les différents mécanismes de défense
mis en place par l’organisme. L’un de ces mécanismes repose sur une
catégorie bien particulière de récepteurs, les « récepteurs à dépendance
». S’ils se trouvent privés de leur ligand, ces récepteurs ont la
particularité d’induire le « suicide » de la cellule, telle une grenade
qui explose quand on la dégoupille… Pour éviter d’« exploser », les
cellules tumorales sont parvenues à produire elles-mêmes les «
ligands-goupilles » de ces « récepteurs-grenades ». C’est ce qu’ont
découvert, il y a quelques années, Patrick Mehlen du laboratoire
apoptose, cancer et développement, au centre de lutte contre le cancer
Léon- Bérard, à Lyon, et ses collègues.
Autodestruction. Ainsi, les cellules cancéreuses bloquent le
déclenchement du signal de « suicide » par le récepteur et gagnent leur
autonomie pour proliférer et migrer vers d’autres organes afin de former
des métastases. « Nous avons eu l’idée d’utiliser ces récepteurs comme
arme antitumorale, explique Servane Tauszig-Delamasure, chercheuse CNRS
dans le même laboratoire. Si l’on prive les récepteurs de leur ligand,
les cellules cancéreuses sur lesquelles ces récepteurs se trouvent
s’autodétruisent. » La scientifique et ses collègues travaillent plus
particulièrement sur le récepteur TrkC, présent sur certaines cellules
cancéreuses, et son ligand, la neurotrophine 3 (NT-3). Agir à ce niveau
représente une piste prometteuse pour traiter notamment les
neuroblastomes, ces cancers qui affectent le système nerveux du jeune
enfant. Les chercheurs ont démontré qu’une molécule « leurre » capable
de séparer le récepteur TrkC de son ligand peut entraîner
l’autodestruction des cellules cancéreuses chez des modèles animaux. De
plus, l’idée des scientifiques s’applique à d’autres cancers, notamment à
certains cancers du sein métastatiques, qui expriment aussi la
neurotrophine 3. Un premier essai réalisé sur la souris en collaboration
avec l’institut Curie, à Paris, s’est révélé positif : il a montré que
la molécule ciblant le couple TrkC/NT-3 retarde le développement
tumoral.