14 Juin 2016
|Le rapport de la Cour des Comptes consacré à "L'évaluation des politiques de lutte contre les consommations nocives d'alcool", paru le 13 juin, fera sans doute date, à la fois par la qualité de son analyse mais aussi et surtout par les recommandations qu'il avance au terme d'une argumentation aussi rigoureuse que fondée sur la littérature scientifique internationale.
Après avoir dressé un bilan souvent sévère de l'action publique face à l'impact majeur de la consommation d'alcool sur le plan sanitaire et social, il met en évidence le rôle déterminant du lobby alcoolier pour préserver ses intérêts au détriment de la santé publique, et en particulier la stratégie de grignotage progressif de la loi Evin. Ces analyses ne surprendront que ceux qui ne voulaient pas voir, mais elles ne font que conforter celles que les acteurs de santé défendent depuis des années, et encore récemment à l'occasion de la bataille sur la publicité au moment de l'examen de la loi Touraine de modernisation du système de santé.
Mais l'intérêt majeur de ce rapport repose sur ses recommandations pour un véritable plan d'ensemble pour faire enfin de la lutte contre les consommations nocives une priorité de santé publique. La Cour des Comptes argumente ses propositions à la fois sur les constats des insuffisances actuelles (pilotage de la politique, sécurité routière, évaluation des actions de prévention), mais également sur les données scientifiques. C'est ainsi que le rapport préconise d'agir plus efficacement sur la publicité, facteur majeur de consommation chez les jeunes, mais aussi d'encadrer davantage l'information sur les produits alcoolisés et le lobbying des milieux économiques. La Cour des Comptes propose également d'agir sur la fiscalité afin d'agir sur le niveau de consommation, et de rénover la législation sur les débits de boissons.
Par la rigueur de son travail et par sa légitimité, la Cour des Comptes donne du crédit à ce que l'ensemble des acteurs de santé proclament depuis des années malgré les forts vents contraires venus du lobby alcoolier et de ses relais gouvernementaux ou parlementaires. Les associations ont demandé en septembre 2015 à la Ministre de la Santé la mise en œuvre du plan de réduction des risques et des dommages liés à la consommation d'alcool que la Cour recommande.
La Cour des Comptes incite le gouvernement à agir. Pour notre part, nous y sommes prêts.