Le rapport de la Grande Conférence sur le sport professionnel français remis le 19 avril à Thierry Braillard, Secrétaire d'Etat aux Sports, propose une mesure – la préconisation 3.3 – dangereuse pour la santé et la sécurité publiques. En effet, celle-ci propose de "harmoniser la législation française et européenne sur les règles de publicité pour les marques d’alcool". Derrière cette formulation europhile mais absconse, il s'agit en réalité d'obtenir une nouvelle révision de la loi Evin, dénoncée comme incohérente, pour en finir avec l'encadrement de la publicité et de la vente des boissons alcoolisées dans les stades ainsi que sur l'interdiction du parrainage (sponsoring) par les marques d'alcool.

Depuis 1999, il est possible de manière dérogatoire de vendre de l'alcool dans les enceintes sportives mais cette dérogation ne suffit visiblement pas au lobby du sport professionnel qui veut accroitre la profitabilité des clubs français par l’exploitation des enceintes sportives en y développant la consommation et les recettes de sponsoring dont bénéficient les clubs étrangers. Les "marques de boissons alcoolisées qui démontrent leur appétence pour le sponsoring du sport" et les annonceurs souhaitent manifestement, après leur victoire lors de la discussion de la loi de modernisation santé en 2015, pousser encore plus loin leur avantage.

Bien entendu, ce rapport n'a fait l'objet d'aucune concertation avec les acteurs de santé qui découvrent cette mesure totalement contradictoire avec la loi Evin dont l'objectif essentiel est la protection de la jeunesse et de sa santé. Associer la consommation d'alcool aux activités sportives est antinomique : l'alcool n'est pas favorable à la performance sportive, mais sa consommation serait banalisée et favorisée par sa présence permanente dans les stades, et le sponsoring des compétitions serait évidemment un encouragement à boire pour les amateurs de sport et en premier lieu les jeunes.

Nous avons récemment souligné, à l'occasion de la finale de la Coupe de France et dans la perspective de l'Euro 2016, à quel point une telle autorisation serait dangereuse. Le rapport remis à Thierry Braillard passe sous silence les liens entre alcool et violences dans le sport, et particulièrement les stades de football. Pourtant, le constat est clair : tout ce qui facilite l'accès à l'alcool et sa consommation favorise les excès, les risques et les débordements, particulièrement dans les foules. Rappelons le précédent du Mundial 2014 : sponsors obligent, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) a imposé la vente de bière dans les stades au Brésil qui l'avait interdite en 2003 pour y endiguer la violence. Jérôme Valcke, secrétaire général de la FIFA, a dû constater les dégâts au point de déclarer : « J'ai été impressionné et suis préoccupé par le niveau d'ébriété de nombreux supporteurs qui ne se comportent pas bien à cause de cela», et de se dire « préoccupé par le nombre de supporteurs ivres dans les stades. »

Le rapport préconise une expérimentation pour évaluer les comportements à risque, formule classique pour faire entrer un cheval de Troie avant généralisation proposée avec son faux nez : des "investissements des acteurs du sport professionnel dans des actions de prévention et d'éducation à la santé". On aperçoit immédiatement combien ils seront sous la dépendance des financements et des liens d'intérêts des sponsors dont l'important lobby de l'alcool avec son appétence pour le sport.

Le prétexte est l'harmonisation européenne, qui escamote l'objectif de profitabilité, mais l'Europe ne peut pas être un prétexte à harmoniser la santé par le bas, et à s'aligner sur les pays les plus laxistes ou les plus dépendants du lobby de l'alcool.

Il est temps d'en finir avec le dépeçage par petits bouts de la loi Evin sous la pression des lobbys économiques au détriment de la santé de la jeunesse.

L'ANPAA demande une prise de position claire du gouvernement sur ce rapport et, de manière urgente, une conférence spécifique sur les problèmes de santé liés à la consommation d'alcool, sous l'égide de Marisol Touraine.


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