48e congrès annuel de l’ESPGHAN Preuve d’efficacité d’une thérapie génique chez des rongeurs dans une maladie génétique rare du foie, le syndrome de Crigler-Najjar
10 Mai 2015
|Federico Mingozzi, responsable de l’équipe Immunologie et Thérapie Génique dans les maladies du foie à Généthon, le laboratoire créé par l’AFM-Téléthon, a présenté, lors du 48e congrès annuel de l’European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology and Nutrition (ESPGHAN, 6-9 mai, Amsterdam), les travaux réalisés en collaboration avec une équipe italienne et une équipe hollandaise démontrant la correction à long terme d’une anomalie génétique à l’origine de l’accumulation toxique de la bilirubine chez des modèles murins du syndrome de Crigler-Najjar.
Le syndrome de Crigler-Najjar Le syndrome de Crigler-Najjar est un trouble héréditaire du métabolisme de la bilirubine caractérisé par une hyperbilirubinémie non-conjuguée due à un déficit hépatique de l'activité de la bilirubine glucuronosyltransférase (GT). De nombreuses mutations du gène UGT1A1 (2q37) sont responsables d'une perte partielle ou totale de l'activité de la bilirubine GT, résultant en une diminution plus ou moins importante de la conjugaison de la bilirubine. Lorsque l’activité enzymatique de la bilirubine GT est nulle, il s’agit de la maladie de Crigler-Najjar de type 1 (CN1). Les malades de type 1 ne survivent que grâce à un traitement quotidien très contraignant par photothérapie (10 à 12 heures par jour) ou une transplantation hépatique lorsque celle-ci n’est plus efficace ou mal tolérée. Si l’activité enzymatique est faible, il s’agit du type 2 (CN2) de la maladie pour lequel un traitement par phénobarbital existe. Le syndrome est caractérisé par un ictère intense et chronique entraînant une coloration jaune de la peau et du blanc des yeux. L’ictère peut devenir toxique pour le cerveau, provoquant des troubles neurologiques graves qui peuvent conduire au décès des patients. La maladie est extrêmement rare avec une incidence annuelle de 1/1 000 000 naissances. A propos de Généthon - www.genethon.fr Créé par l’AFM-Téléthon et financé par les recettes des animations du Téléthon, Généthon a pour mission de mettre à la disposition des malades des traitements innovants de thérapie génique. Après avoir joué un rôle pionnier dans le décryptage du génome humain, Généthon est aujourd’hui, avec plus de 200 chercheurs, médecins, ingénieurs, spécialistes des affaires réglementaires…,l’un des principaux centres internationaux de recherche et développement préclinique et clinique de traitements de thérapie génique pour les maladies rares. *Généthon dispose d’un des plus importants sites de production GMP de médicaments de thérapie génique au monde, Généthon Bioprod. En 2012, Généthon a reçu le prestigieux Prix Galien pour la Recherche pharmaceutique (France), et en 2015 Généthon a été l’un des 16 lauréats du Concours mondial de l’Innovation 2030 pour ses travaux de développement de procédés industriels pour des vecteurs de thérapie génique. Le syndrome de Crigler-Najjar est une maladie héréditaire du métabolisme (mutation du gène UGT1A1) caractérisée par l’accumulation toxique de bilirubine, une substance fabriquée par le foie, dans le corps. En effet, lorsque la bilirubine glucurono-syltransférase (GT), l’enzyme chargée d’éliminer la bilirubine, ne fonctionne pas, cette dernière s’accumule, provoquant un ictère intense et chronique (une jaunisse), et devenant toxique pour le cerveau. Suivent des troubles neurologiques graves allant souvent jusqu’au décès du patient.
La thérapie génique a permis le rétablissement d’un taux de bilirubine équivalent aux animaux sains
L’équipe de Federico Mingozzi (Généthon, Evry/France), en collaboration avec l’équipe d’Andres Muro (ICGRB, Trieste/Italie) et l’équipe de Piter Bosma (AMC, Amsterdam/Pays-Bas), a transféré grâce à un vecteur AAV (virus adéno-associé), spécialement développé par Généthon, une copie du gène UGT1A1 (codant pour la production de la bilirubine GT) dans les cellules hépatiques (hépatocytes) de rats et de souris porteurs de l’anomalie. Après injection, les niveaux de bilirubine transformée des animaux traités sont équivalents à ceux des animaux sains. La correction a été confirmée plus de 6 mois après l’injection, sans nécessiter d’immunosuppression préalable ou d’intervention supplémentaire.
Les chercheurs ont donc démontré qu’une seule injection du vecteur AAV-UGT1A1 a permis la correction à long terme du syndrome de Crigler-Najjar chez les animaux traités.
Vers un essai clinique de phase I/II
Ces résultats ouvrent la voie à la mise en place d’un essai clinique de phase I/II d’ici fin 2016 dont Généthon sera le promoteur. En 2015, ont lieu les études de toxicité réglementaires et la transposition industrielle pour la production du lot clinique de traitement selon les normes BPF (Bonnes pratiques de fabrication) assurée par Généthon*. Vingt patients seront inclus dans 5 centres investigateurs en Europe : en France (APHP Antoine Béclère), aux Pays-Bas (Academic Medical Center), en Allemagne (Hannover Medical School), et en Italie (Azienda Ospedaliera Papa Giovanni XXIII à Bergame et Federico II Hospital à Naples).
Pour Federico Mingozzi, à l’origine des travaux : « Ces résultats prometteurs nous permettent d’envisager un essai clinique d’ici, si tout va bien, fin 2016 ou début 2017. Je suis très enthousiaste à l’idée de poursuivre ce projet dont la force vient du fait que tous les acteurs — les chercheurs, les centres cliniques et les associations de malades (en France, Italie et Pays-Bas, très actives — travaillent de manière très étroite depuis 2013. »
Frédéric Revah, le directeur général de Généthon: « Ce nouvel essai sera un nouveau challenge pour Généthon. En effet, après avoir engagé le développement de traitements de thérapie génique pour des déficits immunitaires, pour des maladies du muscle et contribué au développement de traitements pour des maladies de la vision et du sang, Généthon va entamer le développement d’un candidat médicament pour le foie. Une nouvelle démonstration du savoir-faire de Généthon et de son expertise unique : développer et produire simultanément des traitements de thérapie génique pour des familles différentes de pathologies rares. »
Ces résultats ont été présentés le 7 mai 2015 lors de la session plénière de 10h30 (http://www.espghan2015.org/programme/).