altUne nouvelle étude d’Eugene Caruso montre que nous percevons le temps comme si nous avancions vers l’avenir tout en nous éloignant du passé.

Le 18 mars 2013. On dit que le temps passe, qu’il s’envole, qu’il s’écoule… Nos descriptions du temps sont étroitement liées à nos expériences du déplacement dans l’espace. Une nouvelle étude de la Booth School of Business de l’université de Chicago suggère que les illusions qui influencent notre perception du mouvement dans l’espace influencent également notre perception du temps. Les résultats prouvent que nos expériences de l’espace et du temps sont encore plus liées que nous l’imaginions.

Cette étude, réalisée par Eugène Caruso, professeur associé de sciences comportementales à Chicago Booth et plusieurs autres de ses  collègues, est publiée dans Psychological Science, un journal de l’Association for Psychological Science.

« Il nous semble que les experts en psychologie ont négligé un fait important : au quotidien, nous n’évaluons pas le passé et le futur exactement de la même manière », déclare Eugene Caruso.

Grâce aux études sur la perception spatiale, nous savons que nous nous sentons plus proches des objets vers lesquels nous nous approchons que de ceux dont nous nous éloignons, même si ces objets sont exactement à la même distance. Comme nos perceptions du temps reposent sur nos expériences de l’espace, Eugene Caruso et ses collègues sont partis de l’hypothèse que la même illusion influençait probablement notre perception du temps, créant ce qu’ils appellent un effet Doppler temporel.

En interrogeant des étudiants d’université et des voyageurs dans une gare, les chercheurs ont découvert que les personnes percevaient les délais dans le futur (par exemple dans un mois et dans une année) comme plus proches du présent que des délais équidistants dans le passé (il y a un mois et il y a un an).

De même, les participants ayant répondu à une étude en ligne une semaine avant la Saint Valentin pensaient que cette fête était plus proche du présent par rapport à ceux interrogés une semaine après la Saint Valentin.

Ces résultats laissent supposer une relation entre le mouvement dans l’espace et les perceptions du temps. Pour établir un lien direct entre les deux, les chercheurs ont réalisé une quatrième étude dans un environnement de réalité virtuelle.

Les étudiants d’université, portant un casque de visualisation, étaient immergés dans une scène présentant une route à deux voies bordée d’arbres, d’éclairages publics et de bâtiments. Certains des étudiants avaient l’impression de marcher vers une fontaine bouillonnante se trouvant au bout de la route. D’autres pensaient qu’ils marchaient à reculons, s’éloignant de la fontaine. Ensuite, les étudiants ont signalé à quelle distance leur semblait être une date (trois semaines plus tard ou trois semaines plus tôt).

Seuls les étudiants qui avançaient dans la première partie du test ont signalé que l’avenir leur semblait plus proche que le passé. Ceux qui avaient ressenti un décalage entre leur mouvement (à reculons) et la direction de l’événement (le futur) n’ont pas éprouvé d’effet Doppler temporel.

Ces résultats confirment que nos perceptions du temps reposent sur nos expériences du mouvement dans l’espace : nous avons tendance à nous sentir plus proches du futur car nous avons l’impression d’aller dans cette direction.

Eugene Caruso et ses collègues soulignent que cette orientation vers le futur n’est pas simplement une excentricité de perception : ils pensent qu’elle sert un objectif important. Nous ne maîtrisons pas encore l’art du voyage dans le temps. Nous ne pouvons donc pas changer le passé. Mais nous pouvons nous préparer à l’avenir. Percevoir les événements futurs comme plus proches peut être un mécanisme psychologique qui nous aide à approcher, à éviter ou à faire face aux événements que nous rencontrons.

Les chercheurs espèrent explorer les aspects fonctionnels de l’effet Doppler temporel dans des expériences futures. Par exemple, l’effet est-il associé à un fonctionnement psychologique sain ? Les personnes qui présentent une asymétrie inverse (qui perçoivent le passé comme plus proche que le futur) sont-elles plus sujettes à des émotions négatives telles que la rumination et la dépression ? Le fait d’éliminer cet effet nous rend-il moins apte à créer des projets et à prendre des décisions pour l’avenir ?

Selon Eugene Caruso, « Cette étude est très importante car l’idée de la distance psychologique est essentielle dans la théorie et la recherche, dans chacun des sous-domaines de la psychologie (sociale, du développement, cognitive, clinique). Cependant, l’hypothèse implicite que la distance avec le passé est la même que celle avec le futur, existe toujours. »

Bien que les philosophes puissent débattre de la direction du temps, ces études suggèrent que notre expérience subjective du temps a clairement une direction.

« Nos travaux suggèrent plutôt qu’il existe chez les personnes une différence systématique des perceptions de la distance avec le passé et avec le futur », conclut Eugene Caruso.

L’étude complète, en anglais, est téléchargeable ici


A propos de l’University of Chicago Booth School of Business

L’University de Chicago Booth School of Business est l'une des « business schools » les plus prestigieuses au monde. Faculté « leader » incontestable et incontestée, elle se classe très régulièrement parmi le top dix et fréquemment parmi le top cinq des plus grandes écoles. Cette Faculté englobe bon nombre de disciplines prestigieuses et les diplômés issus de celle-ci occupent des postes stratégiques aux Etats-Unis et dans le monde entier.

La « Chicago Approach to Management Education » se distingue par la façon dont elle accroît la connaissance fondamentale, par sa rigueur et sa capacité d'adaptation aux challenges entrepreneuriaux. L'école propose des programmes MBA à temps plein ou partiel, un doctorat en administration (Ph.D.), une formation librement accessible et destinée aux futurs cadres et dirigeants (« open enrolment executive education ») et une formation personnalisée (« custom corporate education »).

Basée à Chicago, l’University de Chicago Booth School of Business possède deux autres campus à Londres et Singapour. Les effectifs sont cette année de 1 100 étudiants en MBA temps plein, 1 900 à temps partiel, dont 90 sur le Campus de Londres et 110 étudiants en doctorat d'administration (Ph. D.). Par ailleurs, six membres de la Faculté ont été récompensés par des prix Nobel d'économie. Parmi les élèves les plus prestigieux, on peut citer entre autres James A. Rasulo, Senior Executive Vice President de The Walt Disney Company, Bart Becht, PDG de Reckitt Benckiser plc, Brady Dougan, PDG du Crédit Suisse et David Booth, fondateur et co-PDG de Dimensional Fund Advisors. L’école porte son nom depuis 2008. www.chicagobooth.edu

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