altLa quantification de l’ADN du virus de l’hépatite B (VHB) est indispensable à la prise en charge la maladie. L’accès aux tests de biologie moléculaire est limité en raison de leurs coûts trop élevés pour les pays d’Afrique et d’Asie du Sud-Est. L’étude ANRS 12327 menée par Edouard Tuaillon (UMR 1058 de l’Université de Montpellier) et Dramane Kania (Centre Muraz, Burkina Faso) et leurs collègues virologues de l’action coordonnée 12 de l’ANRS valide un test moléculaire de faible coût, sur plateforme polyvalente ouverte et automatisée de PCR, pour le suivi de l’infection par le VHB dans ces pays à ressources limitées. Les premiers résultats de l’étude mettent en évidence la bonne sensibilité et spécificité du test sur plateforme ouverte et des résultats comparables à ceux des tests commerciaux sur automates fermés. Ces résultats préliminaires sont présentés en poster le 25 juillet 2017 à l’occasion de la 9ème Conférence scientifique sur le VIH (IAS 2017) organisée par l’International Aids Society et l’ANRS à Paris du 23 au 26 Juillet 2017.

L’infection chronique par le virus de l’hépatite B (VHB) touche près de 240 millions de personnes dans le monde, principalement en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud-Est. La prévalence peut y dépasser 8 % de la population générale. La prise en charge de l’hépatite B constitue un sérieux défi pour ces régions aux ressources économiques limitées. La quantification de l’ADN du virus est un paramètre clé et un préalable à la prise en charge de l’infection chronique par le VHB. Cependant, les tests commerciaux aujourd’hui disponibles ont un coût élevé, inadapté aux ressources de ces pays du Sud où la prévalence est pourtant la plus forte.


Les plateformes ouvertes testées en Afrique et en Asie du Sud-Est

L’essai ANRS 12327 dont les résultats sont présentés en poster ce 25 juillet à la conférence scientifique sur le VIH (IAS 2017) organisée par l’International Aids Society et l’ANRS à Paris porte sur la validation d’un test générique de quantification de l’ADN VHB par PCR sur une plateforme ouverte générique par comparaison avec les méthodes commerciales de référence (Roche ou Abbott). «En utilisant des appareils dits «ouverts», il est possible de choisir son test, de faire baisser les prix en faisant jouer la concurrence, de gagner en polyvalence afin de tester d’autres pathogènes que ceux prévus pour les appareils fermés, etc. Cette approche a aussi des limites : elle nécessite par exemple de s’appuyer sur les compétences de virologues qui maitrisent les principes de la biologie moléculaire. Mais c’est un frein qu’il est possible de dépasser: ces personnes existent ou peuvent être formées dans ces pays, où leur expertise est sous utilisée» décrit le Dr Edouard Tuaillon, chercheur au sein de l’UMR 1058 Pathogenèse et contrôle des infections chroniques à Montpellier et l'un des deux coordonnateurs de l’étude ANRS 12327.


Des premiers résultats concluants

Les résultats préliminaires présentés à l’IAS portent notamment sur 186 échantillons analysés en France, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso ou au Cambodge et présentant une concentration d’ADN de VHB supérieure à 1000 IU/ml. « En dessous de 2 000 UI/ml, si le foie va bien, l’hépatite est considérée comme inactive et le traitement peut généralement être évité. Utiliser des échantillons qui contenaient des concentrations d’ADN supérieures à 1 000 UI/ml nous permet ici de vérifier la sensibilité clinique du test », analyse le Dr Edouard Tuaillon. Parmi ces échantillons, 99 % ont été testés positifs avec le test générique, confirmant une bonne sensibilité et des résultats en adéquation avec ceux obtenus avec les méthodes commerciales de référence (Roche ou Abbott) sur automates fermés. Le test générique a également été mené sur des échantillons négatifs et a présenté une bonne spécificité. Les résultats portant sur d’autres paramètres sont eux encore en cours d’étude.

« Ces résultats intermédiaires sont très satisfaisants. La quantification de l’ADN VHB sur plateforme ouverte polyvalente avec un test générique dans un contexte de laboratoire de qualité permet d’obtenir des résultats fiables tant sur les virus africains qu’asiatiques », confirme le chercheur. « Nous n’avons pas d’espoir démesuré vis-à-vis de l’approche évaluée : elle ne résoudra pas à elle seule les difficultés de l’accès au diagnostic moléculaire partout où il est nécessaire. Néanmoins elle y contribue. Notre ambition est aussi de promouvoir l’indépendance, l’autonomie et la maîtrise des coûts en s’appuyant sur l’expertise de l’utilisateur plutôt que sur l’expertise marketing du fabriquant ». De nouveaux défis attendent déjà les scientifiques : en plus de terminer l’analyse des résultats obtenus dans cet essai, ils envisagent de porter l’utilisation de telles plateformes ouvertes à une large échelle, comme le fait d’ores et déjà le projet OPP-ERA1 dans le cadre du VIH. Autre piste, décliner les essais avec ce type de plateforme aux autres pathogènes prioritaires, comme la tuberculose ou le virus de l’hépatite C.

[1] Pour en savoir plus sur le projets OPP-ERA

Source :

Validation and scale-up of Hepatitis B viral load on polyvalent open PCR platforms in West African and

South East Asian countries. A study of the AC12 working group (ANRS 12327).

D. Kania1, F. Rouet2, K. Bolloré3, J. Nouhin4, R. Njouom5, T.D. Toni6, A. Maiga7, C. Toure-Kane8, N. Ngo-Giang-Huong9, A. Dagnra10,D.H.C. Le11, F. Lunel-Fabiani12, M.-L. Chaix13, J. Castéra-Guy14, J.-M. Da Costa Castro15, C. Rouzioux16, J.-C. Plantier17, E. Tuaillon18

1Centre Muraz, Laboratoire de Virologie, Bobo Dioulasso, Burkina Faso, 2Pasteur Institute in Cambodia, HIV/Hepatitis Unit,, Phnom Penh, Cambodia, 3UMR 1058 INSERM, Université de Montpellier, Montpellier, France, 4Pasteur Institute in Cambodia, HIV/Hepatitis Unit, Phnom Penh, Cambodia, 5Centre Pasteur of Cameroon,, Virology Unit,, Yaounde, Cameroon, 6CeDReS, CHU de Treichville, Abidjan, Cote D'Ivoire, 7University Hospital Gabriel Toure, Clinical and Microbiology Laboratory,, Bamako, Mali, 8CHU Aristide le Dantec, Laboratoire de Bactériologie-Virologie,, Dakar, Senegal, 9Associated Medical Sciences, Chiang Mai, Thailand, 10Centre National de Référence VIH-IST/PNLS, Lomé, Togo, 11Pasteur Institute, Department of Biomedical, Food Analysis and Health Service, Ho Chi Minh city, Vietnam, 12University Hospital of Angers, Laboratory of Virology, UPRES EA, Angers, France, 13Université Paris Diderot, APHP, Hôpital Saint Louis, Laboratoire de virologie, Paris, France, 14Omunis, Clapiers, France, 15Biocentric, Bandol, France,16Université Paris-Descartes, APHP, Laboratoire de Virologie, Hôpital Necker Enfants-Malades, EA 7327, Paris, France, 17CHU Charles Nicolle, Laboratoire de Virologie, Rouen, France, 18Université de Montpellier, Montpellier, France