altUn médecin chercheur de Gustave Roussy transforme la prise en charge des hommes atteints d’un cancer grave de la prostate en démontrant une augmentation de 38 % des chances de survie

Les résultats d’une grande étude clinique vont venir modifier les standards de traitement des patients atteints d’un cancer métastatique de la prostate qui étaient restés sans grand changement depuis 70 ans. Dimanche 4 juin, le Pr Karim Fizazi, chef du département d’oncologie médicale de Gustave Roussy, présente en conférence plénière au congrès de l’American Society of Clinical Oncology (Asco), à Chicago, l’étude LATITUDE dont les bons résultats vont modifier la façon dont ces patients seront traités. Les données seront publiées également dans le New England Journal of Medecine dimanche 4 juin.

Conférence plénière dimanche 4 juin à 14h40 dans le Hall B1 (Abstract disponible<http://abstracts.asco.org/199/AbstView_199_181729.html>).

“ Même si le cancer de la prostate est très sensible à une hormonothérapie, nous savons que les inhibiteurs de la testostérone n’éradiquent pas complètement toutes les cellules cancéreuses et qu’il reste une production d’hormone résiduelle. L’essai LATITUDE démontre que l’abiratérone, administrée dès la prise en charge du cancer en plus d’une hormonothérapie conventionnelle diminue d’environ 40 % le risque de décès et de plus de 50 % le risque de rechute du cancer après 2 ans et demi de suivi. Ces résultats majeurs vont changer la prise en charge des patients diagnostiqués d’emblée d’un cancer métastatique de la prostate ” décrypte le Pr Fizazi.

LATITUDE est une grande étude clinique comparative (double aveugle contre placebo), internationale et multicentrique (235 centres répartis dans 34 pays), de phase III à laquelle 1200 patients ont participé entre février 2013 et décembre 2014. Son objectif était de mesurer le bénéfice de l’abiratérone sur la survie globale et la survie sans progression du cancer chez des patients nouvellement diagnostiqués d’un cancer métastatique de la prostate. Promu par le laboratoire Janssen, le Pr Fizazi est l’investigateur principal de cet essai.

Avant 2015*, les patients atteints d’un cancer métastatique de la prostate étaient classiquement traités par hormonothérapie conventionnelle afin d’inhiber la fabrication de la testostérone par les testicules. Dans cette étude les patients ont reçu au hasard, en plus du traitement de référence (hormonothérapie conventionnelle), soit de l’abiratérone qui est une hormonothérapie de nouvelle génération qui empêche la production d’hormones androgènes par les glandes surrénales et la cellule cancéreuse elle-même, soit un placebo. La prednisone était associée à l’abiratérone pour compenser les principaux risques de ce médicament (hypertension artérielle et diminution du taux de potassium dans le sang). Les résultats ont démontré que l’ajout de l’abiratérone à l’hormonothérapie conventionnelle améliore non seulement considérablement le pronostic de ces patients (survie globale et survie sans progression de la maladie) mais aussi l’ensemble des complications liées à la maladie. La survenue de complications osseuses (douleurs, fracture, compression médullaire due à l’envahissement tumoral d’une vertèbre) sont décalées dans le temps.

L’abiratérone possède une AMM depuis 2012. Elle est utilisée actuellement comme arme de rattrapage chez les patients atteints d’un cancer de la prostate métastatique devenu résistant à l’hormonothérapie conventionnelle et en rechute avant ou après une chimiothérapie. “ L’avantage de ce médicament est qu’il s’agit d’un traitement oral qui est habituellement bien toléré. Ces importants résultats sont une très bonne nouvelle pour ces patients et nous pensons que le bénéfice sera encore meilleur avec un suivi plus long ” espère le Pr Fizazi.

D’autres résultats d’un essai clinique anglais de phase III testant le même médicament sont attendus.

La prochaine étape est l’étude européenne PEACE-1 promue par UNICANCER et dirigée par le Pr Fizazi qui évalue l’adjonction de l’abiraterone à un traitement « de base » renforcé comportant hormonothérapie conventionnelle et chimiothérapie. Les premiers résultats sont attendus à partir de 2020.

Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent en France, avec plus de 55 000 nouveaux cas par an. Dès le diagnostic, environ 10 à 15 % des patients ont des métastases qui sont osseuses et lymphatiques dans la majorité des cas. Il est la cause de 8 000 à 9 000 décès par an en France.

*En 2015, trois grands essais cliniques français, anglais et américains ont démontré le bénéfice de l’ajout d’une chimiothérapie au traitement hormonal dès le diagnostic d’un cancer métastatique de la prostate

Les explications du Pr Karim Fizazi en vidéo :

[capture_play-fizazi]<https://www.youtube.com/watch?v=9zFNJpLBULo&feature=youtu.be>