altLa tuberculose et l’infection par le VIH sont deux pandémies majeures, en particulier dans les pays du Sud où le nombre de patients co-infectés ne cesse de croître. Ces co-infections posent des problèmes thérapeutiques complexes, en particulier du fait d’interactions médicamenteuses entre le traitement antituberculeux et les antirétroviraux dirigés contre le VIH. Il existe aujourd’hui peu d’options thérapeutiques. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande d’utiliser la Rifampicine pour le traitement de la tuberculose, et d’employer pour l’infection VIH l’Efavirenz en combinaison avec deux analogues nucléosidiques, par exemple le Tenofovir (TDF) et la Lamivudine (3TC). Malheureusement, la tolérance de l’Efavirenz n’est pas toujours parfaitement satisfaisante. De plus, l’efficacité de l’Efavirenz est compromise lorsqu’il existe une résistance du VIH à cet antiviral, ce qui est un risque en augmentation dans les pays du Sud. Enfin, il persiste quelques incertitudes sur la tératogénicité potentielle de l’Efavirenz chez les jeunes femmes en âge de procréer. Ce constat justifie qu’on recherche des alternatives thérapeutiques à l’Efavirenz.

L’essai Anrs 12180 REFLATE TB a étudié chez 155 patients débutant un traitement anti-tuberculeux avec la Rifampicine , l’efficacité et la tolérance d’une anti-intégrase, le Raltegravir, associée au TDF et à la 3TC. Cette étude de phase II a été réalisée en France et surtout au Brésil où la prévalence de la co-infection est particulièrement élevée, par le Pr Beatriz Grinsztejn (Laboratoire de recherche clinique sur le VIH/sida, FIOCRUZ, Rio de Janeiro) et par le Pr Jean-Michel Molina et le Dr Nathalie de Castro (Service des maladies infectieuses, Hôpital Saint-Louis, Paris) entre 2009 et 2012. Trois groupes de patients ont été étudiés : le premier a reçu la dose usuelle de Raltégravir (400 mg matin et soir), le deuxième a reçu une double dose de Raltégravir (800 mg matin et soir). Le troisième, enfin, a reçu la dose usuelle d’Efavirenz. Les trois groupes ont bien évidemment reçu les doses usuelles de TDF et 3TC ainsi que le traitement anti-tuberculeux.

Après 24 semaines de traitement, on constate une efficacité du Raltégravir similaire à celle de l’Efavirenz. En effet, 63 % des patients du groupe Efavirenz ont été traités avec succès, 76 % dans le bras Raltégravir (dose 400 mg deux fois par jour) et 78 % avec la double dose de Raltégravir. Ce succès était mesuré sur des critères virologiques (par le contrôle de la réplication virale, donc de la charge virale). Enfin, la tolérance du Raltégravir s’est avérée toute à fait satisfaisante quelle que soit la dose utilisée.

Ces premières données sur l’essai Anrs 12180 REFLATE TB communiquées en Late Breaker à la XIXe Conférence internationale sur le sida permettent d’envisager l’utilisation du Raltégravir comme une alternative à l’Efavirenz pour les patients co-infectés par le VIH et la tuberculose. Les données sur la pharmaco-cinétique, et donc sur les interactions entre molécules, devraient être présentées ultérieurement. Les résultats communiqués aujourd’hui permettent d’envisager un essai de phase III pour confirmer, ou non, sur un plus grand nombre de patients, l’efficacité et la tolérance du Raltégravir dans cette indication.

Pour en savoir plus :

Molina JM2,3., Grinsztejn B.1,, de Castro N.2,3, Arnold V.4, Veloso V.1, Morgado M.5,, Pilotto JM.6, Brites C.7, Madruga JV.8, Barcellos N.9, Riegel Santos B.10, Vorsatz C.1, Grondin C.4, Santini-Oliveira M.1, Patey O.11, Delaugerre C.2,3, Chêne G.4, Anrs 12180 Reflate TB study group.

A randomized multicentre open-label trial to estimate the efficacy and safety of two doses of raltegravir (RAL) to efavirenz (EFV) for the treatment of HIV-TB co-infected patients. Results of the Anrs 12180 Reflate TB trial. IAS 2012 Abstract THLBB01. Présenté le 26 juillet dans la session des Late Breaker.

1 - Instituto de Pesquisa Clinica Evandro Chagas, Fiocruz, Laboratorio de Pesquisa Clinica em DST/AIDS, Rio de Janeiro, Brazil. 2 – Université de Paris Diderot, Sorbonne, Paris, Inserm U 941, Paris. 3 - Hôpital Saint-Louis, Paris. 4 – Université de Bordeaux, Inserm U 897, Bordeaux. 5 - Instituto Oswaldo Cruz-Fiocruz, Laboratory of AIDS and Molecular Immunology, Rio de Janeiro, Brazil. 6 - Hospital Geral de Nova Iguaçu, Departamento de DST/AIDS, Nova Iguaçu, Brazil. 7 - Hospital Universitario Prof. Edgar Santos, Laboratorio de Pesquisa em Doenças Infecciosas, Salvador, Brazil. 8 - Centro de referencia e Treinamento DST/AIDS, Unidade de Pesquisa Sao Paulo, Brazil. 9 - Health State Secretariat Hospital Sanatorio Partenon, Porto Alegre, Brazil. 10 - Hospital Nossa Senhora da Conceiçao, Serviço de Infectologia, Porto Alegre, Brazil. 11 - CHG Villeuneuve-Saint-Georges, Département des maladies infectieuses et tropicales, Villeneuve-Saint-Georges, France.